Pendant longtemps, et aujourd’hui encore, la simple évocation du vocable de danse africaine dite contemporaine a toujours donné voie à des controverses de tous genres.
L’inopportune association de la danse africaine à une forme artistique contemporaine qui semble porter de forts accents occidentaux en est la justification première. Le riche champ sémantique utilisé (danse contemporaine africaine, danse africaine contemporaine, danse traditionnelle africaine, danse créative, danse de création
) pour décrire ce nouveau mouvement artistique en dit long sur toute la complexité du débat.
Mais, ma réflexion ne se positionne aucunement dans un élan de questionnement d’une certaine authenticité africaine de la danse contemporaine ou, si l’on préfère, d’une remise en cause de la contemporanéité de la danse africaine. Ce serait d’ailleurs illusoire et prétentieux de ma part de vouloir en cerner les contours ici.
Le point de mon propos est de livrer une analyse critique de l’évolution de la danse contemporaine au Burkina Faso, avec de temps à autre une brèche sur le continent africain, en m’appuyant sur l’observation empirique que j’ai pu en faire en tant qu’administrateur culturel. Cette circonscription géographique de ma démarche répond à un souci d’efficacité et surtout à un constat : la danse contemporaine au pays des Hommes intègres, après avoir brillé de tous les feux, aborde, depuis la deuxième moitié des années 2000, une pente descendante a priori latente, mais profondément significative.
Passée l’ère de la triade d’actions culturelles (ballets nationaux, musées nationaux et semaines culturelles) mise en place par les nouveaux États africains indépendants, trois événements majeurs sont venus catalyser la création chorégraphique sur le continent, et particulièrement au Burkina Faso.
Le premier fait marquant a lieu en 1977. À l’instigation du président Léopold Sédar Senghor, Maurice Béjart ouvrait à Dakar Mudra Afrique dont il confia la direction artistique à Germaine Acogny. Sur le tableau des effectifs de la première promotion de cette prestigieuse école de danse figurent en bonne place les Burkinabé Lassann Congo et Irène Tassembédo. Si le premier décide de rentrer au bercail avec l’intention – audacieuse, délibérément patriotique et un peu loufoque (2) – de partager ses acquis avec la jeune génération de danseurs, la danseuse d’ébène (3) donnera une toute autre orientation à sa carrière artistique. Elle s’installe en France pendant une vingtaine d’années où elle crée la compagnie d’Ébène. Entre ses tournées, elle n’oublie pas de retrouver son Burkina Faso natal pour organiser des stages de danse, faire ses créations et plus tard, dès 1998, diriger pendant quelques années le Ballet National du Burkina. Elle revient définitivement en 2007 au pays pour mettre son art au service des jeunes danseurs au sein son école, EDIT (École de Danse internationale Irène Tassembédo), inaugurée en novembre 2009.
Les prémisses d’une véritable nouvelle danse seront données par ces deux devanciers. En 1993, le spectacle Yennenga qu’Irène Tassembédo donne à voir dénote d’une esthétique déconcertante. À l’issue d’une formation au centre culturel français, Lassann Congo, pour sa part, crée, entre autres, le spectacle Ya Botto. Échappant à la compréhension du public et du jury de la SNC (4) 1994, ce spectacle reçut un prix spécial et, l’année suivante, le Grand Prix National de la création chorégraphique lancé par le ministère en charge de la culture.
C’est au tournant des années quatre-vingt-dix que se produit le deuxième fait marquant. Le vent de l’ouverture démocratique qui a soufflé sur le continent a été concomitant de l’éclosion d’une nouvelle forme d’expression corporelle : la danse contemporaine. En 1993, la chorégraphe française Mathilde Monnier pose ses valises en Afrique le temps d’une audition pour sa pièce Pour Antigone. Des artistes africains, dont Salia Sanou et Seydou Boro, sont retenus pour retrouver leurs pairs européens et américains en France. Aussi étonnant que cela puisse paraître, rien ne prédestinait le premier, officier de police et le second footballeur, à devenir des danseurs permanents au Centre Chorégraphique National de Montpellier pendant une dizaine d’années. Dès 1995, ceux-ci fondent la compagnie Salia nï Seydou au sein de laquelle ils créent des pièces qui joueront sur les plus prestigieuses scènes du monde entier. Par-delà ce succès qui leur vaut tous les lauriers – distinctions honorifiques en France, au Burkina et par la Francophonie, entre autres – les chorégraphes burkinabè développent une véritable politique de promotion de l’art chorégraphique dans leur pays. Dès 1997, ils mettent en place des sessions annuelles de formation en danse, pour les jeunes danseurs ouagalais et bobolais, qui vont évoluer trois ans plus tard en une plateforme de rencontre, d’échanges et de diffusion : les Rencontres chorégraphiques de Ouagadougou – Dialogues de corps. Mais, leur engagement ne s’arrête pas en si bon chemin. Lancée dès lors, l’idée d’un centre de développement chorégraphique à Ouagadougou verra le jour en 2006, essentiellement grâce au financement de la coopération française.
En 1995, l’association Afrique en créations, rattachée à l’organe de coopération culturelle du ministère français des Affaires étrangères AFAA (5), lance à Luanda en Angola les premières Rencontres chorégraphiques d’Afrique et de l’Océan Indien. C’est le troisième fait marquant. Avec son concours Danse l’Afrique Danse offrant des récompenses alléchantes (prix compris entre 30 000 F et 100 000 F, suivis d’une tournée internationale), cet événement continental a permis, en l’espace d’une décennie, à la danse africaine de connaître une évolution fulgurante. De jeunes talents et structures éclosent partout sur le continent, tout comme les festivals : Atout africain au Bénin, Dialogues de corps au Burkina Faso, MASA (6) en Côte d’Ivoire, Dense Bamako Danse au Mali, On marche au Maroc, Rencontres Chorégraphiques de Carthage en Tunisie, Kaay Fecc au Sénégal, Abok i Ngoma au Cameroun, FNB Dance Umbrella en Afrique du Sud, etc. À l’international, le succès des créations africaines est indéniable. Au goût du jour, elles connaissent des programmations, parfois exclusives, dans les grands théâtres européens. D’autres grands rendez-vous comme les Ateliers du Monde 2001 et 2002, organisés par l’AFAA en marge de Montpellier Danse, les rencontres professionnelles Africalia et les colloques se multiplient.
Jusqu’au début des années 2000, toute la rhétorique sur la création chorégraphique africaine dressait un bilan plutôt positif de son évolution. Après l’École des Sables que Germaine Acogny ouvrait en 1998 à Toubab-Dialaw, les espoirs d’un lendemain meilleur pour le mouvement ont été portés à leur paroxysme avec l’annonce de la création d’un centre de développement chorégraphique à Ouagadougou.
Tous les regards étaient rivés vers Ouagadougou en 2006. Au mois de décembre, en marge de la 6e édition de Dialogues de corps, Salia Sanou et Seydou Boro inauguraient le Centre de Développement Chorégraphique La Termitière (7). Ce laboratoire de danse, calqué sur le modèle des CDC en France, allait apporter une clé de résolution à l’une des nombreuses difficultés qui menacent le secteur de la danse en Afrique, notamment la question cruciale des espaces de formation, de création et de diffusion.
En tant qu’étudiant en stage, je découvrais à la fois ce nouveau lieu et la danse contemporaine. Grande, ma fascination n’est pas tant venue de l’éblouissement de voir les corps se mouvoir d’une autre façon que, paradoxalement, de toute la dynamique humaine que cet art avait réussi à mettre en branle. Danseurs, chorégraphes, régisseurs, techniciens, administrateurs, directeurs de festivals et programmateurs, venus en masse, foisonnaient dans l’enceinte de la Termitière, du centre culturel français Georges Méliès et du jardin de la musique Reemdogo.
Jusqu’en 2009, les deux sessions de formation professionnelles à l’année ne désemplissaient pas de danseurs venus des quatre coins du monde. La programmation artistique du festival Dialogues de corps donnait à voir des spectacles de qualité, tandis que le seul studio de danse ne pouvait pas accueillir toutes les compagnies en résidence. Cerise sur le gâteau, la Termitière bénéficiait également de soutiens financiers annuels et pluriannuels de la part des partenaires.
Toutefois, ce développement rapide de l’art chorégraphique africain va se heurter dès 2008 à la crise économique mondiale. La réduction des lignes budgétaires allouées aux arts et à la culture qui en a résulté est venue exacerber une situation financière déjà bien précaire, surtout pour les créateurs des pays du Sud, sous perfusion financière occidentale.
Au Burkina Faso, on assiste depuis ces six dernières années à un ralentissement considérable de la dynamique de la création chorégraphique. À la quasi-inexistence de soutiens financiers publics et privés au plan local s’ajoute la raréfaction des cadres de présentation des travaux des artistes. Au-delà du tout nouveau Ouagadougou International Dance Festival (OIDF), lancé par Irène Tassembédo en janvier 2013, et de Dialogues de corps, la programmation en danse à l’Institut français du Burkina Faso se fait davantage parcimonieuse. Les danseurs eux-mêmes affichent un désintérêt de plus en plus croissant pour les espaces de formation proposés qui sont, étonnamment, pris d’assaut par les autres danseurs africains et européens.
Une lecture panoramique de la danse africaine permet de saisir un glissement des foyers de création vers d’autres contrées africaines. Un mouvement qui semble être significatif et s’accompagner d’un déplacement de l’intérêt et du soutien des partenaires du Nord. Après avoir baissé les rideaux de la sixième édition de son festival Duo Solo Danse au mois de juin 2013 à Saint-Louis, Alioune Diagne (compagnie Diagn’Art) est en tournée internationale sous l’égide de l’Institut Français. Depuis 2008, le Béninois Marcel Gbeffa, lauréat Visa pour la Création 2013, s’active au sein de son centre Multicorps à maintenir le flambeau de la danse dans son pays. Il y offre un large éventail de cours et d’ateliers à l’endroit des amateurs, des semi-professionnels et des professionnels : éveil artistique, capoeira, street dance, yoga, zumba, danse classique, danse contemporaine, modern jazz, etc. Après avoir été associé aux éditions 2011 et 2012 de l’événement Dansons maintenant ! de la Fondation Zinsou de Marie-Cécile Zinsou, il poursuit avec elle son intervention en danse dans les écoles auprès des enfants défavorisés. Faisant partie des très rares danseurs encore actifs au Niger, avec son compatriote Abdallah Ousmane, Maman Sani est en permanence entre deux avions pour présenter son travail. Il a lancé à Niamey en 2012 la première édition de Rue Dance Niger à l’instar du Congolais Florent Mahoukou, qui lui dirige Rue Dance à Brazzaville. En Côte d’Ivoire, Ange Aoussou est à pied d’uvre pour relancer la création chorégraphique émoussée par la décennie de crise politico-ethnique. Son festival Un Pas Vers L’Avant, au titre très évocateur, est à sa deuxième édition cette année. Tandis que ses compatriotes essaient aussi d’apporter leur pierre à l’édifice à travers des événements comme Afrik Urban Arts Festival et des stages, la 8e édition du MASA, après une longue rupture, se tiendra du 1er au 8 mars 2014 à Abidjan. Timidement, Liadi Adedayo essaie de maintenir le cap au Nigeria avec son festival Trufesta, tout comme son compatriote Qudus Onikeku dont les créations ne finissent pas d’épater. Au Nord du continent, on retrouve la Marocaine Hind Benali qui, à travers son événement Action Danse, propose des formations et accueille des spectacles. En Afrique centrale, la danse est l’apanage des Tchadiens Hyacinthe Abdoulaye Tobio avec son festival Ndam Ndam Leï et de Ahmed Taigue qui a lancé l’an dernier les Rencontres chorégraphiques internationales de N’Djaména, Souar-Souar.
Dans ce climat de précarité économique généralisée, choisir de vivre et de travailler au Burkina Faso et en Afrique de façon générale relève d’un engagement patriotique. Tant les difficultés et les défis du secteur de la danse contemporaine, relevés il y a plus d’une dizaine années par des observateurs avisés, restent d’une actualité prégnante. Rares sont ceux parmi les artistes locaux qui, en dehors des contrats sporadiques avec d’autres compagnies burkinabè ou étrangères, parviennent à tirer leur épingle du jeu. Ainsi, la seule voie de sortie du tunnel semble être l’exil vers l’Europe où le goût pour les créations africaines est encore prononcé. Le succès des chorégraphes ayant acquis une renommée internationale étant étroitement lié à leur ancrage, temporaire ou permanent, dans l’Hexagone (Germaine Acogny, Alphonse Tierou, Serge Aimé Coulibaly, Irène Tassembédo, Georges Momboye, Koffi Kôkô, Opiyo Okach, pour ne citer que ceux-là), on comprend la facilité des jeunes danseurs africains à céder à l’expatriation. La compagnie Kongo Ba Teria est aujourd’hui dispersée entre Souleymane Badolo à New York et Lacina Coulibaly voyageant entre le Burkina Faso et les États-Unis. Ousséni Sako, ancien membre de Kongo Ba Teria et de la compagnie Salia nï Seydou, s’est installé à Lyon où il essaie de refaire peau neuve. Même son de cloche pour Boukary Séré, directeur artistique de la compagnie Ba, basé à Quimper. Chez la compagnie Téguerer, les projets personnels de Sayouba Sigué, vivant à Lyon, Adonis Nébié et Drissa Kafando, également membre du groupe musical Burkina Electric, semblent prédominer sur le travail collectif. Issa Aimé Ouédraogo n’est plus revenu au pays depuis qu’il s’est envolé pour Nice. Des danseurs bobolais, on retrouve, entre autres, Filibert Tologo en Suisse, Sibiri Konaté en Finlande et Issa Sanou, engagé dans la compagnie Hervé Koubi en France. Les Ivoiriens Jean Ronsard Irié Bi et Krochet Yao Kouassi, longtemps installés au Burkina, ont récemment tenté l’aventure d’un ailleurs prometteur.
Faut-il voir dans ce mouvement tendanciel des jeunes créateurs africains vers l’exil le signe d’un fléchissement sans retour de la danse ? Pas tout à fait, car fort heureusement certains d’entre eux pensent à revenir s’investir dans leurs pays. Les exemples au plan panafricain ne manquent pas et corroborent bien cela : Germaine Acogny, Irène Tassembédo, le binôme Salia Sanou-Seydou Boro, Opiyoh Okach, etc.
Depuis ces dernières années, les danseurs burkinabé ont entamé un retour progressif au bercail, non pas pour se réinstaller, mais pour entreprendre diverses activités artistiques. Installé pendant longtemps à Columbus, Ohio, aux États-Unis et maintenant à Iowa City, Olivier Tarpaga a sollicité une résidence à la Termitière en septembre 2011 et en juin 2013 pour la création de sa pièce Declassified, réunissant sur le plateau quatre danseurs burkinabé – dont les étudiants du programme Je danse Donc Je Suis (8) Ousséni Dabaré et Abdoul Aziz Dermé – et trois musiciens. Il a également débuté la première étape de création du duo Let me be avec le jeune Romual Kaboré, issu du même programme, et la danseuse singapourienne Bernice Lee. En août 2012, il lance à Ouagadougou Nomad Express, un festival international des arts multiples. Après une collaboration avec le chorégraphe italien Sergio Argiolas autour de la pièce La Strada Nella Valigia (La route dans la valise) et Gnongô Koumben (Rencontre), toutes deux présentées en 2011 à la Termitière, Boukary Séré a organisé au début de cette année un stage de danse et de sculpture sur bronze au profit de stagiaires français. Parallèlement à son action au sein de la Termitière, Salia Sanou s’est associé à la chorégraphe italienne Rossella Xillovich pour lancer depuis fin 2011 un stage international de danse à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.
Si l’action des artistes burkinabè expatriés permet de percevoir des lueurs d’espoir pour la danse contemporaine au Burkina Faso, ce sentiment est davantage renforcé par la nouvelle génération de danseurs formés à la Termitière et à l’EDIT. Ils constituent une bonne pépinière de jeunes talents qui feront la danse de demain.
Formés à diverses disciplines artistiques (danse, jeu d’acteur, technique vocale, éducation artistique, scénographie, etc.), les jeunes du programme Je Danse Donc Je Suis du CDC La Termitière font l’objet de sollicitations diverses de la part de chorégraphes renommés. Salamata Kobré, Ousséni Dabaré, Romual Kaboré et Adjaratou Savadogo ont été repérés en 2011 par le chorégraphe Herman Diephuis pour interpréter sa pièce Objet Principal du Voyage dont la troisième tournée débutera au mois de septembre prochain. Parallèlement, Romual Kaboré a monté, avec la collaboration de l’écrivain français Jean-Pierre Hamon, un magnifique solo, Séparation dans le monde de la séparation. Entrepreneur, Marius Sawadogo organise depuis 2011, avec l’enseignante française Alexandra Blin, un stage de découverte et d’initiation des enfants à la danse africaine. Après son passage de trois mois au CND en 2011, Abdoul Aziz Dermé a été invité au mois de juillet à présenter son solo Woongo (L’arrivée) en Équateur. Mariam Traoré, Robert Kiki Koudogbo, Marius Sawadogo et Mahamadi Dabré ont été sélectionnés par la Termitière et Nyanga Zam pour le projet Regards partagés. À la suite de la première étape qui a abouti à la pièce Constellation, présentée à Bruxelles et à Ouagadougou en 2012, il est prévu une seconde phase de travail au mois de septembre 2013 à Bruxelles. Cette fois-ci, Abdoul Aziz Dermé remplacera Marius Sawadogo qui a été retenu, avec Adjaratou Ouédraogo, pour une formation de trois mois au Centre National de la Danse (CND) à Paris.
Dans les rangs de la première promotion de l’EDIT, se distingue Souleymane Koné alias Ladji, un passionné du hip-hop, dont le solo Maa Labyrinthe a retenu l’attention de la critique au festival Duo Solo Danse 2013. Au sein de JUMP (Jeunes unis pour un mouvement positif) qu’il a créé en 2009, il organise des répétitions pour les jeunes de son quartier désireux de découvrir la culture urbaine hip-hop. Mais, il y a aussi la belle Ida Faho et Florent Nikiéma qui nous réservent certainement de belles propositions artistiques.
Par ailleurs, le projet Engagement Féminin lancé en 2008 par la compagnie Auguste-Bienvenue aura, à n’en point douter, une incidence positive sur la création chorégraphique locale et africaine. En effet, comme l’ont imaginé ses initiateurs Auguste Ouédraogo et Bienvenue Bazié, il permettra de corriger le constat amer d’une danse africaine à dominance masculine. Les ateliers de danse, les résidences de création et les tournées qui s’en suivent ont pour but de « faire bouger les choses » (9). C’est-à-dire de proposer un rééquilibrage des forces de propositions artistiques en promouvant un leadership artistique féminin conséquent. Les deux pièces issues du projet, Dans Un S’Y Mettre et Écoute Ma Musique, n’ont pas manqué d’attirer l’attention des professionnels bordelais et de l’University of Yale aux États-Unis où elles ont été présentées. La pièce Chambre noire chorégraphiée par Valérie Rivière de la compagnie française Paul les Oiseaux a reçu la même attention. Elle a été vue à Bordeaux en 2011 et à Ouagadougou dans le cadre de Dialogues de corps 2012.
En l’espace de vingt ans, la danse contemporaine a fait des avancées significatives en Afrique, tant au niveau des propositions chorégraphiques que des espaces de formation, de création et de diffusion. Elle a fait et continue de faire l’objet d’un intérêt croissant de la part des artistes africains qui s’y investissent corps et âme et des partenaires européens qui y voient une source de renouvellement de leur programmation artistique à destination de leurs publics.
Au Burkina Faso, après un passage dans le creux de la vague, elle est en train d’amorcer un nouveau virage de son histoire. La nouvelle génération de danseurs formés à l’école des pionniers du mouvement tiendra sans doute les rênes de la création chorégraphique africaine.
Mais, par-delà une simple observation de son évolution, il convient de s’interroger sur l’avenir de cet art qui peine encore à s’imposer. Les publics africains se reconnaissent-ils dans les propositions chorégraphiques des artistes africains ? Se pérennisera-t-elle si elle devait continuer à dépendre financièrement de l’extérieur qui lui-même connaît une austérité financière ? Comment arriver à susciter l’intérêt des décideurs politiques et économiques nationaux pour une discipline artistique dont ils ne perçoivent pas forcément la nécessité ? Autant de questions auxquelles des réponses concrètes doivent être apportées pour assurer à la danse africaine de continuer à exister.
1. Chargé de Missions du Centre de Développement Chorégraphique La Termitière (CDC) et Administrateur de la Compagnie Auguste-Bienvenue.
2. Il a, en effet, décliné de nombreuses propositions contractuelles pour revenir au pays à une époque marquée par de fortes pesanteurs socioculturelles et une quasi-absence d’opportunités.
3. Cette appellation fait référence au film documentaire du même nom réalisé par Seydou Boro sur Irène Tassembédo.
4. Semaine Nationale de la Culture.
5. Association Française d’Action Artistique, devenue Culturesfrance et aujourd’hui Institut Français.
6. Marché des Arts du Spectacle Africain.
7. Cette dénomination s’inspire de cette citation de maître Titinga Frédéric Passéré selon laquelle « si une termitière vit, c’est qu’elle ajoute de la terre à la terre ».
8. C’est un projet triennal (2010-2012) qui a été initié par l’organisme belge Africalia sur un financement de l’Union Européenne, avec la collaboration du CDC La Termitière et de Donko Seko de Kettly Noël, ainsi que des structures de réinsertion sociale, le RIOEV au Mali et l’ANERSER au Burkina. Objectif visé : favoriser l’épanouissement personnel, le développement socioculturel et l’intégration sociale des jeunes en difficulté à travers l’art.
9. Cette citation est tirée de l’article « Faire bouger les choses ! Engagement féminin et dynamiques sociales de la danse contemporaine en Afrique » de Sarah Andrieu et Nadine Sieveking, publié sur le site Internet de Africultures, la revue des cultures africaines.///Article N° : 11793