Soyons honnêtes, en choisissant la thématique de la littérature jeunesse, nous n’imaginions, aucunement, que les clichés soient encore si prégnants. La figure du petit garçon blanc est toujours la norme. La couleur de peau reste marqueur de différences culturelles et de rapport à une étrangeté.
Certes, nous ne prétendons ni être spécialiste, ni être exhaustif sur la question. Nous ouvrons juste ici un chantier.
Soyons clairs, nous ne défendons pas non plus l’idée qu’en littérature, un enfant ne puisse pas se représenter dans un personnage d’un autre sexe, d’un autre milieu socio-économique, d’une autre couleur de peau, d’une autre culture. Bien au contraire.
Non ! Seulement, nous partageons l’inquiétude de nombreux acteurs culturels et artistes rencontrés pour ce numéro, sur l’uniformité du discours et de son imaginaire. D’autant qu’il est clairement racialisé en littérature jeunesse.
Nous constatons ainsi que lorsqu’un enfant noir est représenté, il est rarement héros de l’histoire et / ou sa couleur de peau est un sujet en soi. Autrement dit, un enfant blanc peut être super-héros, écolier, sportif, voyageur ou quoiqu’est-ce, un enfant noir sera d’abord
un enfant noir.
Ou alors, le personnage noir va être le véhicule d’une altérité caricaturée, notamment dans les récits situés en Afrique, et dans les représentations de la migration. Souvent, il est simplement là pour évoquer une origine africaine emplie de clichés. L’Afrique lointaine, des animaux sauvages et des guerres.
Dès lors, ni le patrimoine culturel, ni l’histoire commune entre l’Afrique et l’Europe ne sont ni correctement ni suffisamment écrits et transmis. Toutefois, la chercheure Anne Schneider relativise ce constat vis à vis de l’Afrique du Nord où un travail a été réalisé par davantage d’auteurs.
Oui ! Nous questionnons ici les outils pédagogiques proposés aux générations futures pour grandir, se représenter le monde, le penser et y trouver sa place. D’autant que le climat politique actuel continue de propager l’exclusion, le racisme, le sexisme et fabrique de la violence symbolique.
Nous mettons en avant, dans ce numéro, d’autres héros et héroïnes, qui permettent d’élargir les propositions actuelles afin de nourrir l’imaginaire de tous et de toutes.
Nos héros sont d’abord des parents qui, faute de trouver une offre suffisante, écrivent et dessinent eux-mêmes. Ils organisent des espaces de transmission, d’apprentissage, d’échanges. En ouvrant par exemple le champ au multilinguisme présent de fait sur le territoire et sa transmission comme héritage jusque-là tu. Ils participent aussi à la nécessaire écriture d’une histoire africaine dégagée des clichés exotisants.
Ces initiatives sont salutaires et urgentes pour TOUS les enfants, pour qu’ils puissent grandir en pensant le monde avec ouverture, partage, échange. « Nous devons élever nos fi lles autrement. Nous devons élever nos garçons autrement ». Et ce dossier répond à cet appel de l’écrivaine Chimamanda Ngozi Adichie
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