Fiche Disque
Musique
ALBUM 2008
Gambari 79
Sana Na N’Hada
Genre : Album
Date de sortie : 30 Octobre 2008

Français

Lors d’un voyage au Mali en 2006, quelques notes de hoddou (guitare traditionnelle Malienne) entendues au marché central de Bamako m’ont fait tendre l’oreille.
La chanson s’appelait « Gambari ».
Je suis remonte à la source de son, une modeste échoppe de cassettes et j’ai acheté une copie au vendeur.
La copie a été dupliquée par le vendeur lui-même sur une cassette sans marque, a l’aide d’un radio cassette « double deck ». « Bara Sambarou/Gambari 79 » était écrit à la main sur une étiquette blanche collée.

De retour à Londres, la magie de cette chanson fut si forte que je décidai de sortir cette chanson sur mon label Totolo.

Après quelques mois, je retournai donc au marché central de Bamako et je demandai au vendeur de cassettes d’où venait ce son et qui était Bara Sambarou son auteur, et ou pourrais-je le rencontrer.
Sa réponse m’envoya à 800 Km au nord à Mopti la capitale du peuple Peul, ou je rencontrai Kola, le manager et producteur de Bara, lui-même un vendeur de cassettes très connu a Mopti.
Le lendemain Kola m’emmena à Konsa, le village ou Bara vit avec une partie de ses femmes et de sa famille.

Lors de notre entrevue, assis sur un tapis et autour d’une cruche de lait caille, Bara m’a écouté parle pendant une demi-heure sans intervenir, puis m’a dit « ok » et m’a serré la main.


Je suis donc revenu à Bamako avec Kola afin de digitaliser la cassette originale qu’il gardait dans une boîte en bois au fond de son échoppe. La cassette était une vieille TDK poussiéreuse et sans boîtier.

Bien sûr le son était très loin de l’audiophilie, et j’ai donc demandé de l’aide à Kassin, l’un des plus talentueux jeunes producteurs de Rio de Janeiro (Orquestra Imperial, +2, Artificial, etc.…) qui a fait un superbe travail de restauration et d’embellissement du son et a mis en stéréo ce qui était à l’origine un master mono.

À ce stade, et tout heureux que j’étais d’avoir enfin un master CD, j’étais très conscient qu’un album « Gambari 79 » était virtuellement invendable en Europe.
Qui a l’ouverture d’esprit, le temps et l’oreille pour apprécier une chanson de 30 minutes, enregistrée en 1979 sur un radiocassette enregistreur, chantée dans une langue étrange et supportée par un hoddou (guitare Malienne traditionnelle) solitaire ?

J’ai donc entrepris de filmer un documentaire sur Bara Samabarou, en espérant qu’en ayant la possibilité de découvrir et de voir le plus grand griot Peul encore vivant, d’apprécier son charisme et ces histoires, l’accès a sa superbe musique serait facilité.

Bara est ce qu’on appelle au Mali un « grand griot », il est en fait le « patron » des griots Peul.
Cela se voit dans ses richesses, terres, maisons, voitures, bétail, etc.… qui lui ont tous été donnes par les gens pour qui il a chanté.
Mais cela se voit aussi à travers le respect et l’amour que ses amis, ses voisins, et son peuple en général lui témoigne.
Comme le dit quelqu’un dans le film, « Lorsque tu écoutes Bara chanter, si tu es Peul, même si on te tuait tu ne ressentirais rien ».

Gambari est une chanson dédiée aux et chantée uniquement pour les Diawando, habitants d’une des régions du pays Peul, et qui sont considérés comme de très bons commerçants.
Le gambari est une étoffe de laine d’agneau que les Diawando ramènent entre autres du Nigeria après y avoir vendu leur bétail. Lorsqu’ils reviennent au pays Peul, ils montrent le gambari qu’ils ont acheté, et cela assoit leur bonne réputation et les rend populaires spécialement auprès des femmes.

Le hoddou est la guitare traditionnelle et ancestrale Malienne. Il a quatre cordes et sa taille varie selon le modèle et le choix de l’interprète. Il est composé d’une caisse de résonance naviforme recouverte d’une peau de tête vache séchée, et d’un manche cylindrique tailles dans le bois. Certains griots fixent au sommet du manche un « boubal », pièce de métal fine et plate de la taille d’une main. Cette pièce de métal trouée à espaces réguliers sur sa circonférence par des anneaux de fer, résonne au rythme des mouvements de l’instrument, des percussions des doigts et de la vibration des cordes et produit un son d’accompagnement typique, comme vous pourrez l’entendre sur Gambari 79. Enfin le joueur utilise des « seguele », mot Peul qui désigne des onglets fabriques avec des bouts d’os fixes a l’index et au majeur de l’instrumentiste par de fines lanières de cuir. Ces segules, servent à la fois à adoucir la brûlure des cordes sur les doigts et d’instrument de percussion lorsqu’elles viennent frapper la peau de la caisse.

Comme le dit Bara « Je prends beaucoup de plaisir à jouer du hoddou et cela donne aussi du plaisir aux gens. Pour jouer tu dois avoir une blessure de l’âme : sans cette blessure tu ne peux pas jouer. »

En écoutant Gambari et en regardant ce film vous serez vous aussi à même de juger si Bara Sambarou a cette « blessure »




Cet album s’accompagne d’un dvd comportant le documentaire « Bara Sambarou, un griot Peul », d’un live et de bonus.
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