Cameroun, autopsie d’une indépendance, de Gaëlle Le Roy et Valérie Osouf
Diffusion sur France 5 à 21h35 (19h35 GMT)
Français
Avant-première du film qui analyse les dessous de la France coloniale au Cameroun.
Synopsis
Le 1er janvier 1960, le Cameroun accédait à l’indépendance et s’émancipait, officiellement sans heurt, de la tutelle française. Dans les faits, c’est une tout autre histoire qu’exhument Gaëlle Le Roy et Valérie Osouf. Historiens, politiques et victimes d’une sanglante répression orchestrée depuis Paris témoignent.
C’est une guerre dont on ne parle jamais. Du milieu des années 50 à la fin des années 70, la décolonisation du Cameroun s’est faite dans la violence… en silence.
Contrairement à l’Indochine ou à l’Algérie, rares sont ceux qui ont eu vent de la tragédie qui s’y est jouée, « comme s’il y avait une chape de plomb sur l’Afrique noire. Au fond, il ne s’est peut-être rien passé parce qu’il n’y a pas d’hommes là-bas. C’est une question que l’on peut vraiment se poser : on ne peut pas faire une tempête dans un verre d’eau parce que des nègres ont été massacrés… », pointe Moukoko Priso, secrétaire général de l’UPC (Union des populations du Cameroun).
Son parti, créé en 1948 par Ruben Um Nyobé, est le principal mouvement d’opposition au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Se dressant contre les petits arrangements qui laissent son pays sous la coupe française, ses hommes vont payer un lourd tribut.
Trente mille morts, cinq cent mille, peut-être davantage : les décomptes sont flous, même pour les historiens. En 1952, Um Nyobé part plaider la cause de l’indépendance à la tribune de l’ONU. A Paris, c’est la panique : pas question que cette partie de l’Afrique équatoriale ne bascule dans le camp communiste. L’UPC est dissous. Condamnés à la clandestinité, ses militants sont traqués, torturés, assassinés.
Um Nyobé tombe sous les balles de l’armée coloniale en 1958. Il sera interdit de prononcer son nom au Cameroun jusqu’en… 1991. Haut-commissaire de la République au Cameroun entre 1956 et 1958, Pierre Messmer, décédé depuis, se justifie face à la caméra : « Nyobé faisait régner la terreur. J’ai décidé de lui faire la guerre et de l’éliminer. Il refusait l’autonomie interne, il refusait la démocratie, donc il se mettait hors la loi et il le savait. »
Dans l’ombre, la main de la France…
La proclamation de l’indépendance n’a pas signé, loin de là, la fin des combats. En novembre 1960, Félix Moumié, le successeur de Um Nyobé, connaît le même sort : en exil à Genève, il est empoisonné par un agent des services secrets français. Aujourd’hui, sa veuve accuse : « Le général de Gaulle a tué mon mari. »
Autopsie d’une indépendancePendant des années, les indépendantistes de l’UPC sont pourchassés et abattus. Pour le général Pierre Semengue, ancien chef d’état-major de l’armée camerounaise, les choses sont claires : « Une partie de l’UPC n’a pas accepté cette indépendance et acontinué la lutte. Cette deuxième rébellion a été combattue par l’armée camerounaise. Encadrée au départ par les officiers français, puis au fur et à mesure par des officiers camerounais. »
Pour avoir le champ libre dans la brousse où les maquisards se cachent, l’armée va jusqu’à parquer quatre cent mille civils dans des camps. Comme au Vietnam, du napalm aurait été largué. D’un revers de main, Messmer dément mollement : « Ce n’est pas important… »
Pour ses richesses naturelles, son pétrole et ses forêts, il n’a, semble-t-il, jamais été question de laisser le Cameroun quitter tout à fait le giron français.
Si les deux journalistes n’abordent pas la situation d’extrême tension que traverse de nouveau le pays aujourd’hui, leur enquête a le mérite d’en éclairer, enfin, les causes.
Il faut voir le président Ahmadou Ahidjo (1960-1982) accueillir en grande pompe une poignée de chefs d’Etat africains pour le dixième anniversaire de l’indépendance. Parmi ses hôtes : Mobutu, Bokassa, Bongo. De grands amis de la France, emblématiques de la décolonisation à la française en Afrique subsaharienne…
Christine Guillemeau
Production : France 5 / Program 33
Synopsis
Le 1er janvier 1960, le Cameroun accédait à l’indépendance et s’émancipait, officiellement sans heurt, de la tutelle française. Dans les faits, c’est une tout autre histoire qu’exhument Gaëlle Le Roy et Valérie Osouf. Historiens, politiques et victimes d’une sanglante répression orchestrée depuis Paris témoignent.
C’est une guerre dont on ne parle jamais. Du milieu des années 50 à la fin des années 70, la décolonisation du Cameroun s’est faite dans la violence… en silence.
Contrairement à l’Indochine ou à l’Algérie, rares sont ceux qui ont eu vent de la tragédie qui s’y est jouée, « comme s’il y avait une chape de plomb sur l’Afrique noire. Au fond, il ne s’est peut-être rien passé parce qu’il n’y a pas d’hommes là-bas. C’est une question que l’on peut vraiment se poser : on ne peut pas faire une tempête dans un verre d’eau parce que des nègres ont été massacrés… », pointe Moukoko Priso, secrétaire général de l’UPC (Union des populations du Cameroun).
Son parti, créé en 1948 par Ruben Um Nyobé, est le principal mouvement d’opposition au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Se dressant contre les petits arrangements qui laissent son pays sous la coupe française, ses hommes vont payer un lourd tribut.
Trente mille morts, cinq cent mille, peut-être davantage : les décomptes sont flous, même pour les historiens. En 1952, Um Nyobé part plaider la cause de l’indépendance à la tribune de l’ONU. A Paris, c’est la panique : pas question que cette partie de l’Afrique équatoriale ne bascule dans le camp communiste. L’UPC est dissous. Condamnés à la clandestinité, ses militants sont traqués, torturés, assassinés.
Um Nyobé tombe sous les balles de l’armée coloniale en 1958. Il sera interdit de prononcer son nom au Cameroun jusqu’en… 1991. Haut-commissaire de la République au Cameroun entre 1956 et 1958, Pierre Messmer, décédé depuis, se justifie face à la caméra : « Nyobé faisait régner la terreur. J’ai décidé de lui faire la guerre et de l’éliminer. Il refusait l’autonomie interne, il refusait la démocratie, donc il se mettait hors la loi et il le savait. »
Dans l’ombre, la main de la France…
La proclamation de l’indépendance n’a pas signé, loin de là, la fin des combats. En novembre 1960, Félix Moumié, le successeur de Um Nyobé, connaît le même sort : en exil à Genève, il est empoisonné par un agent des services secrets français. Aujourd’hui, sa veuve accuse : « Le général de Gaulle a tué mon mari. »
Autopsie d’une indépendancePendant des années, les indépendantistes de l’UPC sont pourchassés et abattus. Pour le général Pierre Semengue, ancien chef d’état-major de l’armée camerounaise, les choses sont claires : « Une partie de l’UPC n’a pas accepté cette indépendance et acontinué la lutte. Cette deuxième rébellion a été combattue par l’armée camerounaise. Encadrée au départ par les officiers français, puis au fur et à mesure par des officiers camerounais. »
Pour avoir le champ libre dans la brousse où les maquisards se cachent, l’armée va jusqu’à parquer quatre cent mille civils dans des camps. Comme au Vietnam, du napalm aurait été largué. D’un revers de main, Messmer dément mollement : « Ce n’est pas important… »
Pour ses richesses naturelles, son pétrole et ses forêts, il n’a, semble-t-il, jamais été question de laisser le Cameroun quitter tout à fait le giron français.
Si les deux journalistes n’abordent pas la situation d’extrême tension que traverse de nouveau le pays aujourd’hui, leur enquête a le mérite d’en éclairer, enfin, les causes.
Il faut voir le président Ahmadou Ahidjo (1960-1982) accueillir en grande pompe une poignée de chefs d’Etat africains pour le dixième anniversaire de l’indépendance. Parmi ses hôtes : Mobutu, Bokassa, Bongo. De grands amis de la France, emblématiques de la décolonisation à la française en Afrique subsaharienne…
Christine Guillemeau
Production : France 5 / Program 33
English
Synopsis:
Independance under a scrutiny is an investigation into the history of Cameroon, focused on an’off-the-record » colonial war, its energy and strategy issues. It takes root at the heart of the French colonial project in central Africa ; and it branches out to the French African backyard and networks over a period spanning the dawn of the cold war to that of global economy. The violence, the number of victims and the silence surrounding the war France waged on Cameroon put it at the extreme end of the colonial domination relationship, crystallizing even into the structures of a racist imaginary world.
Directors:
Valérie Osouf & Gaëlle Le Roy
Independance under a scrutiny is an investigation into the history of Cameroon, focused on an’off-the-record » colonial war, its energy and strategy issues. It takes root at the heart of the French colonial project in central Africa ; and it branches out to the French African backyard and networks over a period spanning the dawn of the cold war to that of global economy. The violence, the number of victims and the silence surrounding the war France waged on Cameroon put it at the extreme end of the colonial domination relationship, crystallizing even into the structures of a racist imaginary world.
Directors:
Valérie Osouf & Gaëlle Le Roy
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