L’association France Télés Diversités milite pour faire avancer la politique en faveur des minorités au sein du groupe audiovisuel. Selon ses membres, France Télévisions ne mérite pas le label diversité attribué en 2014.
France Télés diversité est une association créée en 2009 par plusieurs salariés de France Télévisions dont certains avaient été victimes de discrimination. C’est le cas de Malik Bouketir débarqué en 2005 de la direction du service des sports de France 2. Lui et cinq autres personnes dites « issues des minorités visibles » ont été écartées « sans autre explication qu’on réorganise », dénonçait le Club Averroès (1) en novembre 2008. La création de l’association est d’abord plutôt bien accueillie par France Télévisions qui uvre alors à trouver une respectabilité dans le domaine de la diversité. Jean-Marc Souami, présentateur de la météo et membre de l’association témoigne « des gens nous ont contacté parce qu’ils étaient discriminés […] Parmi eux certains qui étaient en CDD depuis 15 ans, qui s’appelaient Mohamed et qui voyaient passer devant eux des Pierre, Paul et Jacques. »
Remy Pfimlin est nommé PDG de France TV en 2010 et affiche comme priorité l’obtention du Label Diversité. Parmi les mesures, la formation des cadres pour éviter les discriminations mais aussi la multiplication des contrats d’alternance avec des jeunes handicapés, boursiers ou habitants des zones urbaines sensibles. L’entreprise compte environ 140 alternants dont environ une dizaine de journalistes. Malheureusement ils sont rarement conservés après leur contrat. Martine Boucher, responsable de la diversité explique : « L’entreprise doit maîtriser ses effectifs et connaît un plan de départs volontaires. Ces publics ont donc peu de chance d’être recrutés, c’est clair dès le départ pour eux mais il arrive quand même que certains soient embauchés, conformément aux engagements pris dans l’accord contrat de génération. »
Malgré de bons audits, l’AFNOR (2) refuse de délivrer le label en novembre 2013. « Lors du passage en commission, nous avons eu des questions sur des dossiers individuels sur lesquels les réponses apportées n’ont pas été jugées satisfaisantes. » d’après Martine Boucher. Ce refus est le résultat de l’action de France Télés Diversités et de plusieurs syndicats. Jean-Marc Souami raconte « Plusieurs dossiers graves de discriminations n’avaient pas été réglés. Ils ont eu le label en 2014 contre l’avis de tous les syndicats dans l’entreprise. Le label diversité finalement c’est une grande mascarade de l’État pour faire croire que les entreprises sont modèles. »
En 2010, France Ô est intégrée à la TNT dans le but affiché par France Televisions de favoriser la cohésion sociale et est désignée comme la chaîne de la diversité. Un attribut que réfute totalement le monsieur météo de FR3 : « France Ô n’est pas la chaîne de la diversité, c’est une chaîne ghetto. On y met tous les présentateurs de couleur ou qui ont un nom à consonance maghrébine. A la direction des programmes, il y a quelques années, on m’a dit « c’est bien gentil mais j’en trouve pas des gens compétents issus de la diversité. »
La nomination de Delphine Ernotte à la présidence de France Télévisions ne suscite pas grand enthousiasme chez Souami. Persuadé que la parité hommes-femmes va progresser, il reste dubitatif concernant les autres diversités. « Elle n’en a pas parlé dans sa candidature. Nous avons envoyé une demande de rendez-vous mais nous n’avons toujours pas de réponse de sa part. »
(1) Club Averroès : créé en 1997, il regroupe des professionnels des médias qui militent pour la promotion de la diversité dans les médias français
(2) Association française de normalisation : c’est une société spécialisée dans la certification de systèmes de management, de services et de compétences.Lire aussi notre entretien avec Mémona Hintermann : « Que fait le gouvernement ? Où est sa politique de diversité ? » ///Article N° : 13207