Où situer Marie Ndiaye ?

Print Friendly, PDF & Email

Marie Ndiaye ? Une romancière de qualité ! Mais où la situer ? Tentative de réponse à travers la découverte de son dernier roman primé au Fémina, Rosie Carpe.

Heureuse récipiendaire du prix Fémina, Marie Ndiaye est sereine. Son discours de réception laisse seulement percer le regret de ne pas avoir pu partager avec Jérome Lindon, récemment décédé, qui dirigeait les éditions de Minuit, la joie d’avoir été désignée pour l’attribution de cette distinction. Marie Ndiaye est aussi discrète. L’écriture de son œuvre, qui compte à ce jour huit romans, ne s’accompagne pas d’une intense présence sur la scène publique et médiatique. Elle se situe en retrait, presque à la marge, des différents champs littéraires : le champ littéraire français et les champs littéraires africains, tant ceux qui se construisent dans les pays africains que ceux qui s’élaborent en Europe.
La logique de l’attribution de critères identitaires, qui prévaut généralement dans toute approche critique, se heurte ici à de nombreuses interrogations. Où situer Marie Ndiaye et son œuvre, à quel ensemble – ethnique, national, transnational –, rattacher cette production littéraire ? S’il paraît impossible, et pas nécessairement souhaitable, de balayer d’un revers de plume la situation de métisse de la jeune femme (fille d’une mère française blanche et d’un père sénégalais noir), cette information ne constitue en rien une grille d’analyse pertinente.
Marie Ndiaye ne s’inscrit dans aucun courant littéraire constitué ou en voix de constitution. Son œuvre ne signe aucun renouveau d’une négritude littéraire aujourd’hui révolue, ce qui ne signifie d’ailleurs pas que les revendications de ce courant idéologique et esthétique soient, elles, entièrement obsolètes. Sa production ne s’ancre pas non plus dans des courants régionalistes transnationaux dont la créolité antillaise pourrait être la référence essentielle. Il est également impossible d’intégrer son œuvre à des catégories littéraro-ethniques en voie de constitution : la littérature des « beurs », la littérature des immigrations en général. Le modèle multiculturaliste nord-américain qui inspire ces constructions catégorielles, comme c’est souvent le cas, se révèle fortement inopératoire. Pourtant, l’œuvre n’est pas orpheline : publiée aux Éditions de Minuit, elle place d’emblée la romancière dans la tradition du Nouveau Roman qui privilégie une démarche esthétique plutôt qu’une posture identitaire. Au-delà de ces constatations, somme toute très banales, sur la complexité de l’appartenance, demeure une œuvre d’une intense complexité. Rosie Carpe, le dernier roman qui vient tout juste d’être primé, constitue à cet égard une passionnante voie d’entrée dans la production de Ndiaye.
Des êtres paumés en quête d’un lieu
Le roman s’ouvre sur une arrivée : Rosie Carpe et son fils Titi, jeune garçon maladif, débarquent en Guadeloupe où le frère de Rosie, Lazare, ne les attend pas. C’est un jeune homme antillais et noir, Lagrand, qui vient recueillir l’enfant et sa mère pour les conduire auprès des personnages de la famille Carpe, tous déjà installés dans l’univers insulaire. Cette scène n’est en fait que le deuxième départ. Le lieu de l’origine n’est pas Paris et sa banlieue, que quittent l’enfant et sa mère pour traverser les eaux, mais la petite ville de Brive la Gaillarde. Dans cette ville a longtemps résidé toute la famille Carpe avant que le noyau familial ne se décompose pour éclater en différents atomes qui poursuivent, tant bien que mal, leur errance en France métropolitaine et dans son prolongement administratif insulaire : la Guadeloupe. Brive la Gaillarde, lieu de l’origine peu décrit, a néanmoins une charge symbolique très forte. Brive est une synecdoque qui renvoie, tout au long du texte, aux parents Carpe. Au-delà du lieu, Brive désigne le noyau familial de l’origine, littéralement « le ventre des Carpe ». Périphrase et synecdoque se font ainsi écho. De ce ventre chaud et mou qui a toutes les caractéristiques du noyau ethnique chaleureux et clos vont devoir s’extirper les deux enfants Carpe. À l’instar de nombreux personnages du roman français du XIXème siècle, Rosie et Lazare « montent » à Paris en quête d’une hypothétique réussite. La réussite escomptée, dans cette France de la fin du vingtième siècle, est ici universitaire. L’identité tribale, celle héritée de Brive, bloque assurément tout processus d’insertion dans la bonne société parisienne, ce dont Rosie, en dépit de son flottement existentiel, est parfaitement consciente :
« À Paris Rosie et Lazare n’étaient rien. Rosie n’était même pas certaine d’être bien la fille qu’on appelait Rosie, large et haute dans les miroirs fugitifs. Et son frère Lazare, loin de Brive et délivré des Carpe, tremblait de n’être plus rien, à Paris, déchaîné mais errant. Il avait peur, savait Rosie, de n’être encore moins que rien, plus tard, lorsque serait venu le temps où il ne pourrait plus passer pour un étudiant. Elle sentait leur solitude à tous les deux, profonde, impénétrable. Elle sentait aussi, d’une manière plus floue, à quel point il leur était difficile, arrivant de Brive et du ventre des Carpe, d’espérer acquérir le langage et le mode de pensée de la bourgeoisie moyenne d’où venaient la plupart de leurs condisciples. Ils étaient si peu de choses, pensait Rosie, Lazare et elle, sur l’échelle des positions sociales, et, par ailleurs, Brive et les parents Carpe leur avaient si peu appris, si peu légué, hormis la gêne, la docilité, et une sorte de béance maussade et défiante devant les imprévus de l’existence. »
Dans un premier temps, celui de l’exil parisien, La Brive perdue ne génère pourtant pas de discours fortement nostalgiques. La rupture se consomme, le lien qui rattache les personnages à l’origine se défait définitivement lorsque les parents Carpe se retrouvent eux aussi en banlieue parisienne, dans la ville d’Antony où ils sont découverts, vivant dans un pavillon de banlieue, par une Rosie Carpe errante. Dès lors, la charge symbolique dont le lieu est porteur se déplace, se pare d’autres portées métaphoriques. Il ne demeure de Brive qu’une image qui progressivement devient lancinante : celle du magnolia du jardin familial. La racine perdue de l’arbre de la ville natale est donc entièrement métaphorisée par l’image du magnolia : métaphore arboricole d’une autre métaphore végétale qu’est la racine unique. C’est en Guadeloupe, au milieu d’arbres étrangers, seulement nommés, pas même soumis à un quelconque traitement exotique, que s’impose le souvenir lancinant du magnolia familial doublé d’une autre image empruntée à la prose proustienne, celle du petit pan de mur jaune :
« Lazare, avait entendu Lagrand, sous le couvert silencieux des acomats-boucans, des gommiers, des châtaigniers-pays, dans l’ombre marine des arbres géants, avait alors songé à une certaine maison jaune de Brive la Gaillarde, à certains magnolia jamais revu dans la magnificence de Brive la Gaillarde, et il avait compris, avait-il dit à Lagrand, que rien de ce qu’il pourrait trouver en Guadeloupe ne le rendrait jamais aussi pleinement heureux que l’évocation d’un petit jardin planté d’un magnolia dans les faubourg de Brive la Gaillarde. »
Progressivement, sous l’irrémédiable pression des échecs successifs de la tribu Carpe en Guadeloupe, l’image de Brive la Gaillarde devient obsédante. Le toponyme devient le centre d’un discours collectivement produit par une tribu en perte de repères spatiaux et temporels. L’arbre-totem s’impose comme un souvenir cristallisant l’enfance perdue. Brive et la ville guadeloupéenne des Abymes se répondent en un complexe jeu de miroir :
« Ils atteignirent la place de la Victoire et arrêtèrent un taxi.
– Aux Abymes, dit Lazare. […]
Jade cria :
– A Brive la Gaillarde !
– Brive la Gaillarde ? demande le chauffeur.
– Non, dit Lazare, rue Flory, aux Abymes. »
« A Brive, j’avais une maison vraiment très bien, avec, devant, un magnolia extraordinaire ! cria Lazare »
« Je me sentais atrocement mal. Je me suis rappelé qu’autrefois, à Brive, je dénichais les œufs dans le jardin, à Pâques, sous le magnolia. Je cherchais les œufs en chocolat avec ma sœur Rosie qui sautillait derrière moi »
Riches en polysémie (le substantif « Gaillarde » laissant ouvertes plusieurs interprétations), le toponyme de l’origine renvoie ainsi à une géographie semi-réaliste, semi-fantas(ma)tique d’une France profonde avec laquelle les personnages entretiennent un lien toujours ambiguë. Etres des marges, les personnages quittent « les faubourg de Brive la Gaillarde » pour la banlieue parisienne. Paris n’est qu’un nom sémantiquement vide : aucun monument, aucun lieu ne lui sont associés. La sortie hors du ventre des Carpe se double d’une sortie hors du ventre de Paris. Antony, en banlieue parisienne, devient le lieu maudit où se réalisent les premières fortes mutations identitaires, la construction des identités sociales. Rosie, à l’instar de la Fanny de En Famille qui est serveuse au restaurant « Le Coq hardi » (« hardi » comme Brive est « gaillarde » !), devient hôtesse dans un hôtel. Progressivement, le personnage bascule dans une réalité grotesque, objectivement cauchemardesque, mais jamais véritablement interprétée comme telle. Max, le gérant de l’hôtel, fait quotidiennement l’amour avec Rosie, filmé par sa propre femme. Docile, Rosie attend que les choses se fassent et se passent. De cette liaison, dont est fugitivement suggérée la perversité sans que cette dernière ne s’insère dans un discours moraliste, naîtra Titi : un enfant malingre, d’emblée condamné au sacrifice, fort différent des « enfants pour la France » dont les affiches natalistes vantent les heureuses vertus, « l’irradiante plénitude des petites chairs colorées ». Pourtant Titi, se dit avec angoisse Rosie, « n’en était pas moins un enfant pour la France au même titre que les bébés onctueux et charnus de la photo », dignes de la plus parfaite campagne eugéniste. Dans cette banlieue bétonnée transpire une existence glauque ; entre supermarché et immeubles conçus à l’identique se creuse un espace propice au totalitarisme de l’hyper-modernité, lequel recycle les produits d’un passé fasciste comme en témoignent les multiples insignes militaires qui hantent l’appartement de Rosie. Cette insertion dans le quotidien d’objets de guerre suggère et dissimule, banalise avec perversité la réalité de la guerre .
De nombreuses failles dans le réel ont déjà été ouvertes dans la toile de la fiction lorsque Rosie, au hasard d’une promenade, découvre les parents Carpe dans un pavillon de banlieue et constate, sans avoir lu Sartre, que son père « joue mal au jardinier ». C’est à la faveur d’un projet fort novateur : exporter en Guadeloupe un nouveau concept sexuel sur le mode des réunions Tupperware que la famille Carpe émigre en Guadeloupe. Rosie et le petit Titi, qui s’est entre temps largement dégradé, finiront ainsi par rejoindre le reste de la famille .
De cette île, que personne ne connaît avant d’y partir, se détachent quelques clichés prégnants, conçus et construits pour être identifiés comme tels. En lieu et place d’une villa avec piscine (« piscine élisabethtaylorienne »), secrète espérance de Rosie, une case créole passablement décatie sert de gîte. Rosie Carpe, après bien des métamorphoses, finira toutefois par vivre dans la maison rêvée avec vaste jardin et piscine. « Route de la traversée » et « Perle des îles », la marina où travaille la mère de Rosie, cristallisent autant de fantasmes purement creux qui agitent les personnages. Rien ne justifie la vie de la famille Carpe en Guadeloupe, sinon un vague désir de s’enrichir au demeurant très vite oublié. L’errance devient statique. La vie s’écoule, tout aussi morne qu’en banlieue parisienne, dans la rumeur du meuglement des bœufs, baignée par une sous-culture télévisuelle (« Questions pour un champion ») qui est exactement identique à celle qui sévit en métropole. La tribu Carpe, enrichie de quelques autres personnages du cru, se traîne sans trop d’énergie à Pointe-à-Pitre voir le film « Astérix et Obélix : La revanche des Gaulois ». Cette revanche des Gaulois en terre insulaire sera elle aussi un horizon sémantique quasiment creux. Les Gaulois comme les Noirs semblent fatigués et Rosie, dès son arrivée, est sensible aux questions sociales qui outrepassent ici les questions de pigmentation de la peau : « Vous crachez à mes pieds mais c’est sur vous que vous crachez pareillement, sur vos pieds bien chaussés de jeune Français huppé et dans le coup. Je suis sûre que les raisons d’en vouloir à quelqu’un comme vous […] sont plus nombreuses que celles d’en vouloir à une fille de ma sorte ». L’ironie qui parsème l’écriture ajoute une note supplémentaire à un tableau d’ensemble marqué par une atmosphère absurde d’où le sens semble s’être depuis longtemps tari.
« Si Lazare pouvait être Lazare » ou les avatars de la mutation identitaire.
À l’instar de tous les précédents romans de Marie Ndiaye, Rosie Carpe explore les avatars de la mutation identitaire. Dès son arrivée, Rosie craint de reconnaître Lazare sous les traits d’un jeune homme noir. Or la jeune femme estime avoir vécu suffisamment d’épreuves sans qu’il ne soit besoin d’en vivre plus : « […] de ne pas le [Lazare] découvrir dans la peau d’un nègre la rassurait tout au fond d’elle. J’ai connu assez de surprises, j’ai vécu assez de miracles, songea-t-elle pauvrement, alors, si Lazare pouvait être Lazare… »
Si la coïncidence entre soi et soi, un des principes de l’identité, n’est pas remise en question à travers la figure de Lazare, l’identité nominale se trouve soumise à de multiples fluctuations. Comme Fanny de En Famille, dont le vrai prénom a été oublié par tous, les personnages transforment leur identité nominale, effacent le prénom de l’origine. La nouvelle identité leur permet d’accroître leur capital symbolique, d’effectuer une subtile mutation sociale : « J’en avais assez, vous savez, de m’appeler Madame Carpe, La Carpe, comme disaient certains. Il n’y a plus de Danielle Carpe, monsieur Lagrand. Il n’y a plus que Diane, gérante de La Perle des Iles, future jeune maman de nouveau. J’ai une vie, et puis je m’offre une autre vie, monsieur Lagrand, parallèlement à la première, pas à la suite, comprenez-vous ? » Aucun personnage ne parvient réellement à coïncider avec ce qu’il est, ni même avec ce qu’il voudrait être. La métamorphose physique, le changement nominal affectent sans cesse leur identité. Lagrand semble le seul être doué d’une conscience. Mais dans le regard hagard de Rosie sa couleur ne semble pas véritablement constitutive de son identité physique, elle apparaît comme un accident de parcours, nullement soumis pourtant à un décryptage raciste. Au-delà de la question de la représentation du Noir dans le regard du Blanc, question fort présente dans le texte négro-africain, la couleur de Lagrand est interprétée comme une élégance passagère, un aimable caprice, ainsi Rosie est-elle sensible à la « nuance de sa peau qu’il semble avoir choisie par coquetterie pour aller avec le Toyota et les mocassins de daim » .
C’est le personnage de Titi, nommé Barbapapa par Lazare et l’un de ses acolytes, qui subira la plus grande métamorphose. D’emblée situé sous le signe du malheur, parce que conçu sous le double regard d’une caméra et de la femme l’amant de Rosie, fantasme voyeuriste ici poussé à l’extrême, Titi est condamné à figurer la victime rêvée, le bouc émissaire qui devra payer pour les errements de la tribu Carpe, pour l’incapacité à construire une identité sociale stable. L’enfant malingre que les toniques vêtements sportifs ne parviennent pas à rendre plus gai sera condamné au sacrifice. « Agneau du sacrifice » selon sa mère, il mourra exposé au soleil après avoir consommé de la mort-aux-rats. Il renaîtra pourtant, en une résurrection aux allures quasiment christiques, sous les traits d’un professeur (figure parodique du fonctionnaire métropolitain) alors que Rosie a perdu le second enfant qu’elle portait et pour lequel elle cherchait avidement un père. Dans le ventre de Rosie se joue l’absurde tragédie de la famille Carpe en errance et en déshérence dans le département d’outre-mer.
Rosie Carpe : roman des Antilles ?
Rosie Carpe dérange nos habitudes de lecture. L’image que le roman véhicule des Antilles est proprement inédite dans le champ des littératures nègres. Elle ne l’est pas moins si l’on envisage son inscription dans le champ littéraire français. Les clichés exotiques apparaissent à la surface du texte mais sont immédiatement déconstruits. Nulle poétique de la Relation, nul marquage créoliste, nulle identité ultra-marine déclinée sur un mode lyrique mais bien plutôt dispersion, sur un mode fantastique et fantasmatique, du lien familial et social. Rosie Carpe déconstruit, détruit l’ethnicité dont elle renforce le caractère doublement fictif : fictif parce construit et parce qu’ayant pour cadre la fiction romanesque. Comme dans les précédents romans, la famille est au centre du propos : une famille que l’on quitte, que l’on retrouve en morceaux épars, que l’on appelle secrètement de ses vœux lorsqu’elle vient à manquer : là réside d’ailleurs toute la tragédie de Lagrand, cet homme dont la mère est folle et qui ne parvient lui-même à fonder une famille. Absurde prolongement de l’espace administratif français, les Antilles ne parviennent à exister que comme dans le prolongement symbolique d’une sous-culture française pesante, gluante et massifiante. Tout se réduit à une sombre histoire de famille donc de meurtre et de fantasmes de destruction. Blancs et Noirs coexistent dans la même névrose identitaire. Roman familial, au sens freudien du terme, Rosie Carpe n’en pose pas moins un ensemble de questions sociales aiguës. La situation peu reluisante de cette tribu blanche n’est pas sans rappeler l’analyse lucide faite par Maryse Condé à propos du film Blancs Gachés : « […] ces Européens d’un genre nouveau témoignent de l’effondrement de la pyramide sociale d’antan. Le Blanc – et le titre le soulignait ironiquement – n’est plus seulement le planteur méprisant, le maître possesseur d’esclaves et d’habitations à la tête du morne. […] Il peut être un ex-citadin lassé des contraintes de la société industrialisée. Il peut être un chômeur. Il peut même être un SDF ».
L’intrusion du merveilleux dans le réel ne répond en rien aux prescriptions fortement auto-exotiques d’un Alejo Carpentier. Se construit une nouvelle forme de fantastique. Rosie Carpe se situe à la marge des idéologies de l’identitaire, mais en revanche au cœur d’enjeux inscrits dans une modernité en panne de sens où totalitarisme et fascisme se glissent dans les failles du réel, ce qui était déjà le cas dans la prose fantastique de Julio Cortazar. L’errance est stérile, l’identité est dangereusement fluctuante, jamais perçue sur un mode euphorique. Son caractère palinodique est récurrent. Les ventres des femmes portent des enfants condamnés au sacrifice ou au meurtre sans que l’écriture n’emprunte les voix du dolorisme pour retracer un parcours symboliquement très chargé. Un parcours qui mène du ventre des Carpe, le nid douillet de l’ethnicité villageoise, au ventre de Paris vers le ventre de Rosie. Rosie : une Cendrillon en mal d’un prince noir dont la couleur de la peau s’accorderait délicatement avec des « mocassins de daim », un prince qui viendrait la délivrer de la glu existentielle dans laquelle elle se débat…

///Article N° : 2102

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Laisser un commentaire