« Les pays du nord ne sont plus la seule référence dans le monde de l’art »

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Emo de Medeiros, artiste pluridisciplinaire vivant entre la France et le Bénin, a participé à Art Paris Art Fair, Afriques Capitales à Paris au Printemps dernier et à 1:54 New York en mai. Parmi les concepts-clés de ses œuvres, le métissage ou plutôt « mètissage » entre Afrique et Occident et la rencontre entre créations traditionnelles et nouvelles technologies. Son œuvre Vodunaut #014 (Hyperthinker) 2017 a fait la couverture du dernier numéro du magazine papier d’Africultures, Afriscope.

 Que voulez-vous signifier en assemblant des matériels traditionnels avec des éléments des nouvelles technologies ?
Ce qui m’intéresse c’est de faire de l’art du XXIème siècle. Nous sommes à une époque de connexion généralisée. De changement qui n’a pas d’équivalent depuis l’invention de l’imprimerie. Cela entraîne des mutations dont nous ne percevons aujourd’hui que les prémisses. C’est une époque où l’humanité prend conscience qu’il y a autant à découvrir concernant l’intelligence artificielle qu’à propos de la spiritualité ou du rapport entre corps et esprit. Une époque où des savoir-faire et des outils distants de dizaines de génération coexistent. Une époque où les cultures les plus éloignées géographiquement sont activement ou potentiellement en contact.
C’est ainsi, en-dehors de mon utilisation d’outils et d’objets technologiques qui n’existaient pas avant le XXIe siècle, que je m’intéresse à des alliances inédites de matériaux et de techniques. Travailler avec des artisans béninois me permet de mobiliser des matériaux et des objets peu visibles ailleurs dans la création contemporaine. Mais ici se pose la question du terme « traditionnel ». Ces objets sont-ils plus « traditionnels » que le tabouret de Roue de bicyclette, ou la fenêtre de Fresh Widow, réalisés à une époque où la menuiserie n’était pas encore industrielle ? Je ne crois pas. Ces objets étaient des objets usuels, qui avaient des fonctions à l’intérieur de la société et de la culture dans lesquelles Marcel Duchamp vivait. Je puise dans mes deux cultures des éléments et des matériaux qui me semblent intéressants pour construire des propositions esthétiques. Tout est affaire de contexte : je pense que c’est la grande leçon et la grande nouveauté du XXI siècle. L’importance du contexte dans la préparation, dans la présentation, dans la création d’une œuvre d’art. Nous en prenons, je crois, une conscience beaucoup plus aiguë maintenant. L’explosion de l’Afrique s’inscrit dans ce déplacement de contexte : les pays du nord ne sont plus la seule référence dans le monde de l’art.

Que pouvez-vous dire par rapport à votre corpus théorique ?  Quels penseurs vous ont influencé ?
Mes influences sont d’abord des figures artistiques : chronologiquement les artistes anonymes des peintures rupestres de Sulawesi qui mélangent spiritualité et art pictural, fusionnant la trace de la main humaine et sa représentation, ou Léonard de Vinci – son invention du sfumato m’apparaît comme l’apparition d’une vraie 3D, par la matérialisation d’un espace tridimensionnel continu  par opposition à des couches d’espace –  jusqu’à Fela Kuti le musicien nigérian, dont l’œuvre mélange politique, performance et composition musicale. Ou encore Mondrian, dont la rigueur formelle et conceptuelle produit une forme artistique unique. Je pense aussi à Miles Davis, dont la place du silence à l’intérieur de son œuvre musicale m’a poussé à réfléchir à la place du vide à l’intérieur d’une œuvre plastique.
D’un point de vue strictement théorique, je suis très intéressé par Walter Benjamin. Je trouve que sa réflexion autour la notion de l’aura d’une œuvre d’art, est extrêmement puissante et fertile. Je m’inspire en particulier de la relation entre l’unique et le multiple, l’inscription dans le temps…
Je pense aussi au poète français Henri Michaux, dont l’œuvre littéraire est absolument géniale et dont on ne prend vraiment la mesure de l’œuvre visuelle qu’aujourd’hui. Sans oublier James Baldwin, à propos de la recherche par l’artiste de son intégrité, comme quête qui devrait être la métaphore du combat quotidien de tous les humains sur la planète. Mais je pourrais aussi citer Bob Marley, et l’invention d’une mythologie, en même temps que l’aboutissement d’une forme musicale nouvelle, ou bien Steve Reich et Drumming, qui opère la fusion entre musique savante et polyrythmie classique d’inspiration africaine.

La musique tient-elle une place importante dans votre création ?
Oui, absolument. Les barrières artistiques qui s’abattent aujourd’hui sont aussi des barrières entre les disciplines. Ce n’est pas pour rien que les muses de la mythologie grecque, qui étaient censées représenter les divinités tutélaires des arts, étaient sœurs. Il y a des processus de création parallèles, entre la musique et les arts plastiques, la musique et la peinture, et plus encore aujourd’hui, avec les outils numériques. En fait il existe une grande proximité entre un logiciel qui va permettre de créer et de composer de la musique, et un logiciel qui va permettre de monter ou de créer un film. Formellement ce sont des blocs, qui sont manipulés de façon très similaire. Encore une fois, ce qui m’intéresse c’est de fusionner différentes textures. Et la musique est clairement une de ces textures.

Pourquoi préférez-vous parler de « métissage » plutôt que de « créolisation » ?
Parce que pour moi le terme de « créolisation » limite géographiquement le concept. Lorsqu’on pense à la culture créole, on pense à un certain nombre de cultures qui se trouvent obligatoirement dans les Caraïbes, ou aux Etats Unis, à la Nouvelle Orléans par exemple. La notion de « poétique de la relation » de Glissant me semble entièrement valide et extrêmement puissante : la genèse de nouvelles formes, de nouveaux idiomes, de nouvelles œuvres, de nouvelles sensibilités, de nouvelles perspectives, etc. Mais il y a trois autres éléments fondamentaux  qui me font opter pour le terme « mètissage » que je n’écris pas « métissage », mais « mètissage » avec un accent grave. Le premier, c’est qu’on y trouve la racine du mot « tissage », « texte ». Le texte est en réalité issu de la métaphore du tissage. De la même manière qu’il y a des lignes verticales et horizontales dans un tissage, dans un texte il y a le paradigme et le syntagme. Le deuxième c’est le côté « méta ». On regarde ce processus, ce tissage s’effectuer, mais grâce à un déplacement de la perspective. De nouvelles perspectives sont générées, mais une « méta-perspective » est créée aussi. Le troisième, et c’est a raison pour laquelle j’écris « mètissage » non avec un accent aigu mais un accent grave, c’est que le terme est homophone à celui de la « mètis » grecque décrite par Jean-Pierre Vernant, la forme d’intelligence qui permet le voyage (Ulysse en est la personnification), l’exploration, l’adaptation à un monde en perpétuel changement, la compréhension de l’ailleurs et de l’autre, bref l’intelligence fluide et polymorphe de la mutation. C’est grâce à la mètis par exemple que Zeus devient le roi des dieux. Donc le « mètissage » pour moi c’est précisément le processus qui incorpore ce qui est autre, catalyse la mutation. Cela dit, le mot « métissage » (avec un accent aigu), est devenu un peu un « vieux mot » ou un « gros mot » car des tas de gens y voient une espèce de logique du moitié-moitié, du 50/50, de la reconnaissance d’essences pseudo-pures qu’on mélangerait, d’une hybridation mécanique, or le « mètissage » c’est exactement le contraire. Personnellement je suis 100% français et 100% béninois, les deux en même temps l’un et l’autre, l’un ou l’autre en fonction du contexte. La manière dont je vais parler, ou même la langue que je vais utiliser dépendra du contexte.

D’où vous viennent des idées comme celles d’un totem surélevé grâce à des boîtes de conserve ? Ou celle de déguiser des figures traditionnelles avec des masques de super-héros ? Signifient-t-elles que des vieux symboles résident sous les nouveaux ou que des nouveaux cherchent à remplacer les anciens ? 
Le terme clé ici c’est le « symbole ». Qu’est-ce que cela symbolise de mettre des boîtes de conserve à côté de statuettes rituelles du Bénin, (qui s’appellent bocio) ?  C’est une prise de position, ironique, qui interroge le ready-made et questionne le regard posé sur un artefact africain produit par un artiste africain. Je suis fréquemment invité au titre de mon 100% béninois…davantage qu’à celui de mon 100% français. Or mon utilisation de ces symboles, ce jeu de mise en relation symbolique, me permet de parler de transculturalité. Ces symboles sont déplaçables d’un contexte à l’autre. Leur essence et leur mode de fonctionnement sémantique demeurent, mais la manière dont ils sont liés au contexte où ils se trouvent, qui n’est pas forcément leur contexte d’origine, crée des connexions et des interrelations nouvelles. La totalité de ma pratique découle d’un seul concept, celui de « contexture ».

Que signifie la « contexture » ?
C’est un mot qui a été utilisé avant le mot « structure ». La structure a la racine latine de « stare », « se tenir debout », mais aussi « se tenir immobile », la « structure » c’est ce qui est constant, ce qui est stable, qui ne bouge pas. La contexture mobilise deux choses. Cette idée de contexte d’abord.  Par exemple celui dans lequel est montrée une œuvre d’art : une foire, une exposition personnelle ou collective ne « fonctionnent » pas de la même manière. Puis il y a la notion de texture. Par exemple dans la série des « Electrofétiches », on trouve d’une part une texture d’objet issu de l’art classique africain – qui est conservée dans un savoir-faire – mais aussi une texture discursive de l’art contemporain européen, via le ready-made ou le pop’art. Par exemple vu les clichés sur l’art dit « africain », les gens se disent « Ah tiens, on utilise des boîtes de conserve recyclées » alors qu’en fait ce sont des boîtes de conserve neuves qui justement sortent de l’usine avec cet aspect neuf, manufacturé qui caractérise les objets du désir de consommation. Au final, je veux proposer une œuvre qui déstabilise les catégories, qui demande une adaptation, une mètis du regard.
Toujours à propos de la même série, voici un autre exemple, qui montre peut-être davantage le passage entre l’art du XXe siècle et celle du XXIe siècle. Mes Electrofétiches incorporent une puce qui permet de connecter un smartphone, sur lequel apparait alors un texte propitiatoire. En pratique, littéralement, il s’agit d’une offrande. On offre de l’électricité à cet artefact. Et c’est cela qui fait en sorte que l’artefact envoie un message. Ce message, y compris envisagé sous l’angle de l’effet placebo constitue-t-il une parole opérante ? Ce qui m’intéresse, c’est d’obliger la personne à adopter une perspective où elle doit se confronter à ses propres croyances. Cette logique de questionnement m’intéresse. Et un Electrofétiche ne peut être, en termes de matériaux qu’une œuvre du XXIe siècle, puisqu’iI n’existait pas de puce NFC auparavant.

Pouvez-vous nous parler de l’œuvre  Kaleta/Kaleta ? Vous vous inspirez  d’une tradition du XIXe siècle appartenant à des Afro-brésiliens installés au Bénin. Une tradition composée de danses, chants et musiques, que vous transformez en une installation sonore et visuelle. Le tout en incluant aussi le public dans une mise en scène avec des masques de super héros, de mangas ou issus de traditions de différents pays.
Dans le deuxième tiers du XIX siècle, à la suite de la Grande Révolte de 1835 à la Salvador de Bahia, un grand nombre des révoltés qui étaient esclaves au Brésil ont été renvoyés en Afrique, notamment au Bénin. Je m’inspire aussi de mon histoire familiale, parce que mon père est originaire de Ouidah, une ville où il y a eu beaucoup de retours de ces Brésiliens qui se sont ensuite alliés aux descendants des Portugais, ainsi qu’aux natifs du royaume de Ouidah. Ils ont créé une tradition où, à la période de Noël et du Nouvel An, des enfants constituent des petits orchestres de percussions avec des tambours mais aussi toutes sortes d’instruments improvisés. Certains enfants jouent et chantent, et les danseurs, toujours entièrement masqués, sont appelés Kaleta. Ils circulent dans la rue, allant en procession de maison en maison pour présenter de petites performances. C’est une tradition qui mélange le carnaval brésilien, Halloween et des traditions de masques, et de danses, du Bénin. Je pourrais dire qu’avec ce projet, j’ai créé une contexture à partir d’une contexture. Kaleta/Kaleta est une installation vidéo performative : toute visiteur qui entre dans l’installation devient un performeur, qu’il le veuille ou non. C’est aussi une série photo, qui peut être présentée en dehors ou en même temps que l’installation, mais également une pièce musicale… Bref c’est un objet composite. Concrètement l’installation prend place dans un lieu clos divisé en deux espaces. Dans le premier espace, situé à l’entrée de l’installation, les visiteurs peuvent être masqués ou non. Dans le second espace, les visiteurs doivent obligatoirement mettre un masque avant d’entrer. De multiples écrans diffusent des vidéos, et il y a également plusieurs haut-parleurs qui diffusent le son. L’une des choses intéressantes pour moi est que les gens qui entrent dans cette installation s’attendent à assister à une performance. Or si vous vous trouvez face à 20 ou 30 personnes dissimulées derrière des masques, et qui vous regardent, c’est vous qui êtes l’objet de spectacle, le sujet de la performance. La question de la pression et de la norme sociale m’intéresse. Si je mets un masque tout seul, dans un endroit public, je vais sentir une pression sociale colossale, très difficile à supporter car tout le monde va me regarder. Mais cette pression se dissipe si je me trouve en face de quelqu’un qui porte le même masque que moi. Car c’est là que je découvre que mon visage est en fait caché, protégé. A l’inverse, deux personnes à visage découvert qui font face à une foule de 50 personnes qui les regardent, à moins qu’ils soient des performeurs, vont se sentir mal à l’aise. En revanche, ces deux mêmes personnes qui mettent des masques, qui se voient l’une l’autre, vont se sentir complètement et brusquement protégées. Et plus intéressant encore, c’est que la polarité de la pression sociale s’inverse : les 50 personnes qui vont être en face, s’il y a trois ou quatre personnes qui les regardent masquées, silencieuse vont se sentir, elles, les objets du spectacle. Par exemple, ce phénomène est très visible dans une vidéo documentant la présentation de Kaleta/Kaleta au Palais de Tokyo, à Paris.
Dans Kaleta/Kaleta les visiteurs ont le choix. On leur offre des masques pour entrer dans le second espace, l’espace Kaleta, mais ils peuvent circuler dans tout l’espace de l’installation. J’ai mobilisé le concept de « persona » de Jung, à savoir le masque social que nous portons tous en permanence dans l’espace public, donc les visiteurs peuvent choisir d’être des Persona, ou des Kaleta.
Et finalement, dans Kaleta/Kaleta, de fait, le paradoxe est que les visiteurs masqués deviennent davantage des spectateurs que ceux qui ne le sont pas : ils ont la liberté de regarder fixement n’importe qui de manière absolument protégée, en violation de la règle sociale quais-universelle qui interdit de dévisager des inconnus…

Parlons maintenant de l’œuvre Vodunaut #002 (Hypercharger ). Vous utilisez les cauris. Dans l’histoire, les cauris ont servi de monnaie d’échange matrimoniaux, de compensations mortuaires, mais aussi comme monnaie dans l’esclavage et la traite négrière. Elles sont devenues aussi des moyens de communiquer avec le monde des esprits (en Afrique ou au Brésil) et également des bijoux porte-bonheur ou tout simplement des ornements. Avec toute cette symbolique derrière, que signifient-elles dans votre œuvre ?
Je m’intéresse aux cauris parce que c’est un motif, qui comporte toutes ces significations symboliques. Il est devenu en lui-même presque un symbole, ou un cliché, un des éléments visuels les plus caractéristiques de l’Afrique…Mais, contrairement à ce que la plupart des gens pensent, le cauri vient d’Asie du sud-est. Il a d’ailleurs servi aussi de monnaie en Chine. Ce qui me fascine, personnellement, c’est que ce soit un objet dont la valeur n’est créée que parce qu’il vient d’ailleurs. Si on poussait la réflexion par rapport à la globalisation du XXIe siècle, on pourrait se dire que c’est un des premiers objets globalisés et dont la globalisation même constitue la valeur. Le déplacement en a fait un objet rare. Ce qui me captive dans ce symbole, c’est le fait qu’il soit un objet qui n’est pas ce dont il a l’air, qu’il comporte à la fois une valeur mystique et monétaire mais aussi qu’il illustre la notion de point de vue. Un cauri vu à l’horizontale ressemble à un œil ou à une bouche, alors qu’à la verticale il ressemble à un sexe féminin. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il intervient dans beaucoup de rites de fertilité. Sa symbolique est donc variable selon le point de vue.

Quel est le propos des vidéos placées à l’intérieur des casques de cauris ?
Ce sont des vidéos qui mélangent des choses que j’ai filmées avec d’autres images « ready-made ». Ces vidéos ont pour point commun de constituer des narrations non-linéaires, polysémiques et ambiguës, afin que le spectateur crée sa propre histoire.

Et les caméléons auxquels on a collé une plume, que représentent-ils ?
Ce sont des objets virtuels, qui pourraient être réalisés à partir de plumes et de caméléons séchés achetés dans le secteur des ingrédients « spirituels », ou « surnaturels » du marché de Dantokpa, à Cotonou au Bénin. Pour moi le caméléon est un symbole du caractère protéiforme de notre culture contemporaine. Dans ma pratique artistique je veux m’approprier cette caractéristique comme le caméléon s’approprie des couleurs de son environnement. Quant à la plume, elle évoque la transcendance, autant que l’écriture.

Il y a quelque chose que vous aimeriez-vous ajouter dans cet entretien sur votre démarche ?
En ce début de XXIe siècle, l’art est devenu encore plus important que ce qu’il était antérieurement. Il nous offre des intuitions sur ce que pourrait être notre monde. Et l’éclosion de la création contemporaine du continent est assez liée à la matérialisation et à l’intégration de quelque chose qui est plus global, plus planétaire. Cette connexion de la création du continent via le marché, via les institutions avec la culture globalisée, est l’indice que cette culture globalisée est en train de s’élargir et sortir d’une certaine homogénéité du Nord. Je pense que l’art est un des lieux où naissent les révolutions, où se cristallisent des nouvelles idées, perspectives et valeurs. Cette incorporation dans la culture globale d’éléments venus de sociétés et de cultures non issues de la diaspora européenne me semble être précisément ce qui est post-colonial, c’est un changement d’équilibre. Par exemple, pour ce qui concerne le continent africain, se trouver dans une période post-coloniale c’est faire voler en éclat la relation bipolaire qui existait entre colonie et métropole : même si elle n’est pas inactive ou inexistante, elle est désormais dépassée. Nous nous trouvons désormais dans la mise en réseaux de ces ex-colonies – je parle du Bénin par exemple – avec de nouveaux partenaires : la Chine, l’Inde, le Brésil… Le commerce, mais aussi les échanges culturels Sud-Sud croissent de manière exponentielle, et créent un enrichissement mutuel.
Enfin, concernant le numérique, il y a quelque chose d’inéluctable qui se passe. Internet est en train de modifier profondément les rapports entre les gens. Partout et en même temps. Ce qui change aujourd’hui sur le continent est cette connexion nouvelle, beaucoup plus intense avec le reste du monde. En Europe, il a fallu plus d’un siècle pour passer du téléphone à l’internet mobile 4G, 50 ans si l’on compte depuis la généralisation du téléphone filaire, et 15 ans si l’on compte à partir de la généralisation du téléphone mobile. Pour cette dernière phase par exemple au Bénin, il n’en a fallu que 8. Ce « rattrapage de connexion » est l’indice d’une nouvelle humanité qui émerge. On ne pense plus pareil, y compris politiquement quand on a accès à Wikipédia par exemple. De plus en plus de gens vont chercher des informations sur Internet, même si beaucoup continuent à être influencé par des médias traditionnels. Ce qui m’intéresse dans cette exploration c’est qu’elle est particulièrement déterminante sur le continent aujourd’hui et en particulier au Bénin. Le futur de notre planète est numérique, c’est en Afrique que les outils numériques se diffusent le plus vite aujourd’hui, et ce n’est que le début. Quoi rêver de plus intéressant pour un artiste ?

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