Cinéma d’animation : une nouvelle écriture

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En janvier 2001 est prévu à Abidjan le premier festival du cinéma d’animation africain, Les Nuits animées du Griot. Une production méconnue et plus importante qu’on ne le croit.

Lors du premier panorama du cinéma d’animation africain organisé en juin 1993 au festival d’Annecy, Bruno Edera recensait dans un petit opus publié à l’époque environ 200 titres de réalisations individuelles et une dizaine de séries de télévision. Depuis, le genre se développe avec l’arrivée des étudiants formés en France et ceux qui étudiaient à l’Est.
L’Egypte reste la grande productrice. Le Caire avait déjà il y a soixante ans un studio de dessin animé où naquirent les réalisations des frères Frenkel dont la série Mish Mish Effendi (1936) pouvait concurrencer les Mickey Mouse et les Betty Boop d’Amérique. Aujourd’hui, la production est télévisuelle, très chantée, parfois mélangée avec des images réelles, notamment avec les films de Mouna Bouenes.
C’est de Tunisie que va sortir prochainement le premier long métrage d’animation africain : Le Sous-marin de Carthage de Zouhaier Mahjoub. Ce n’est pas un nouveau venu : sa maison AZA Production travaille depuis les années 70.
En Afrique noire, de jeunes réalisateurs vont sur les traces des pionniers comme le Nigerien Mustapha Alassane dont les grenouilles animées ont marqué le cinéma africain. Des réalisations ambitieuses émergent au Sénégal, au Ghana, au Nigeria, au Cameroun (télévision).
Quant à l’Afrique du Sud , un studio du Cap a produit une cinquantaine d’épisodes sur des légendes africaines mais ces films sont en afrikaaner et en anglais. William Kentridge continue une production pléthorique et très personnelle, notamment de films d’animation au fusain :  » Je n’ai jamais cherché à illustrer l’apartheid mais les dessins et les films ont sans doute été engendrés et nourris par la société martyrisée que celui-ci laisse dans son sillage. Je m’intéresse à l’art politique, c’est-à-dire à un art d’ambiguïtés, de contradictions, de gestes inachevés et de dénouvements incertains. Un art (et une politique) où l’optimisme est gardé sous surveillance et le nihilisme maintenu à distance « .
L’enjeu actuel est bien sûr la formation aux nouvelles technologies d’animation, ce à quoi veut contribuer le futur festival d’Abidjan, d’autant plus que l’on voit certaines télévisions acquérir le matériel nécessaire. Cela permettra de réaliser du dessin animé alors que l’importance des coûts rabattaient souvent les réalisateurs vers le papier découpé ou les marionnettes. Le récent succès de Kirikou la sorcière du Français à l’enfance guinéenne Michel Ocelot va doper les projets.
L’animation a jusqu’ici privilégié la sauvegarde du patrimoine oral et mit l’accent sur les contes. Les Aventures de Leuk le lièvre d’après Senghor (diffusées en France en 1997 sur la 2) posaient ainsi les valeurs permettant l’affirmation d’une identité culturelle africaine. Une nouvelle façon de raconter des histoires se dégage cependant aujourd’hui, plus ancrée dans la remise en cause des normes comme dans Le Joueur de cora de Cilia Sawadogo (Burkina Faso, cf. Africultures 16) sur le conflit entre une jeune fille et son père qui n’accepte pas que sa fille ait choisi un fiancé d’une autre caste, ou bien dans l’environnement urbain, comme le dernier film du Congolais (RDC) Kibushi Ndjate Wooto où dans une ville, un ministre a un accident de voiture et sera sauvé par un jeune…  » On offre beaucoup à l’enfant mais on l’écoute de moins en moins  » remarque cet auteur dont les films ont été primés par de multiples festivals internationaux pour leurs qualités poétiques. Il travaille à l’heure actuelle avec l’atelier Graphoui de Bruxelles qui, depuis 1988, produit des films avec des artistes du Burundi, Mali, Bénin, Sénégal, Burkina Faso… tout en promouvant l’émergence de cellules de cinéma d’animation en Afrique à mêmes de produire de façon autonome.

///Article N° : 1062

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