« Au Congo, la danse contemporaine devient plus populaire »

Entretien d'Olivia Marsaud avec Chris Babingui

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À 23 ans, il est danseur professionnel depuis cinq ans et a intégré la Compagnie Maho de Florent Mahoukou, à Brazzaville, en 2008. Il fait partie des interprètes de la pièce Wake Up, créée par Florent Mahoukou et le Sud-Africain Gregory Maqoma, dont le work in progress a été montré à Johannesbourg lors de la biennale Danse, l‘Afrique danse !

Comment est née votre vocation ?
Petit, je dansais pour le plaisir, dès 5 ans, dans mon quartier. Il y avait des répétitions de ndombolo, et les musiciens appelaient des volontaires. J’étais tout le temps volontaire ! Les gens me donnaient de l’argent pour m’encourager. Mes parents n’aimaient pas ça mais j’avais la tête dure… On a déménagé, j’ai découvert la danse traditionnelle puis le hip-hop vers 14 ans. J’ai commencé à en faire pour le succès et pour les filles. Ça a marché ! Je n’avais jamais rêvé être danseur, je voulais être homme d’affaires.
Votre rencontre avec Florent Mahoukou ?
Il m’a repéré pour faire une formation. Aujourd’hui, si je bouge comme ça, c’est grâce à lui. C’est mon père de danse. La danse contemporaine demande une immense concentration. Au début, j’étais trop statique. Florent m’a dit : pour être à l’aise et naturel, danse-là comme du hip-hop ! Avec lui, je suis tombé dans la création. J’écris beaucoup et j’ai envie de créer comme lui. Tel père, tel fils. Je suis d’ailleurs en train de travailler sur un solo, Ibonabo (« comme ça, comme ça »), inspiré de mes souvenirs pendant la guerre civile de 1999. Avec ma famille, on a fui Brazzaville jusqu’au fin fond du pays. J’ai vu des gens se faire tuer, brûler, j’ai entendu les obus. Et aujourd’hui, c’est toujours les mêmes problèmes…
Quelle est la situation du danseur contemporain aujourd’hui au Congo ?
C’est difficile car il n’y a pas d’école et très peu de salles de répétition. On est obligés de se créer nos propres lieux. On répète tous les jours de 9 heures à 19 heures, parfois sans manger. Souvent, il n’y a aucun projet en vue mais on travaille quand même, juste pour nous. Il y a encore quelques années, personne ne connaissait le contemporain au Congo. Florent Mahoukou a créé un festival de danse dans les rues, ça a popularisé le style, les gens s’intéressent plus.
Il vaut mieux travailler à Pointe-Noire ou Brazzaville ?
De grands chorégraphes comme Florent ou Biedefono Delavallet viennent de Pointe-Noire. Les gens commencent là-bas et développent leur art à Brazza, une ville où l’on peut avoir la chance de rencontrer d’autres professionnels d’Afrique et d’ailleurs qui viennent donner des cours.
Vous vivez de la danse ?
Je gagne ma vie, oui. Enfin, ma vie, je la cherche encore : je ne suis pas arrivé là où j’ai envie d’être. Je veux devenir un Florent Mahoukou, un Faustin Linyekula, un Gregory Maqoma. Je veux être comme les grands et je le serai !

Lire également l’entretien avec [Gregory Maqoma].///Article N° : 11079

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