Comme une isle :

Entre intime et politique

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Comme une isle, création autobiographique de Leïla Cukierman, directrice du théâtre d’Ivry – Antoine Vitez, mise en scène par D’de Kabal, explore les raisons de l’engagement politique, mêlant avec habileté l’intime et le politique. Sur scène, Leïla Cukierman, D’de Kabal et Nina Miskina, deux générations réunies, déclament, slament ou encore rapent le texte.

« Je suis juive, je suis noire, je suis devenue communiste ». Ces mots résonnent tout au long de la pièce écrite par Leïla Cukierman, directrice du Théâtre d’Ivry – Antoine Vitez. Comme une isle était jusqu’au 24 novembre 2012 sur les planches du Grand Parquet, drôle de chapiteau installé dans le 18e arrondissement de Paris où le public et les artistes se croisent avant et après le spectacle.
Ancienne adhérente du Parti communiste français, Leïla Cukierman qui se revendique toujours de cette idéologie monte sur les planches pour témoigner de son engagement. L’introspection débute dans une atmosphère intimiste. Antillaise par sa mère, juive par son père, elle porte en elle les pans les plus sombres de l’histoire. Sa mère « une métisse descendant de l’abomination », son père « ayant échappé à l’abomination », Leïla Cukierman est nègre malgré sa peau blanche, juive mais sans religion. Elle trouve dans le communisme une façon de réconcilier les différentes facettes de son identité. À travers le prisme du marxisme, elle aperçoit également une explication à l’esclavage et au génocide des juifs.
Petit à petit l’intime se mêle au politique et la pièce prend une autre dimension. Le décor, sobre, fait d’un bureau, d’une étagère et de quelques chaises est mis sens dessus dessous : un résultat n’est pas sans rappeler les barricades. Du « Code Noir à la soumission du marché tout puissant », en passant par les indépendances de la seconde moitié du XXe siècle, sans oublier les récentes profanations de cimetières juifs, les bouleversements de l’histoire sont passés en revue, ayant sur le spectateur l’effet d’un appel à agir sur le monde. Les raps de D’de Kabal et Nina Miskina font tantôt écho au texte agissant comme des slogans, tantôt, ils s’en éloignent pour y poser un regard critique bienveillant.
Faire vivre, grâce au chant, au rap ou encore slam, toutes les voix qui animent les questionnements à l’origine de l’engagement militant, tel était l’intention de Leïla Cukierman lorsqu’elle a confié son texte rappeur D’de Kabal qui n’en est pas à sa première expérience théâtrale. En effet, celui qui se décrit comme un expérimentateur découvre le métier de comédien à partir e 1998 avant de fonder en 2005, RIPOSTE, sa propre compagnie.
Interaction entre différentes formes artistiques, Comme une isle est aussi le fruit d’un échange entre plusieurs générations. « Les plus jeunes nous permettent de conserver notre capacité à s’indigner et à espérer, grâce à ces échanges nous construisons quelque chose ensemble », explique Leïla Cukierman. Les trois artistes, de générations différentes, semblent néanmoins sur la même longueur d’onde. « Le propos de Leïla correspondait tellement au mien, qu’il m’a été difficile d’apporter une distance au texte », admet D’de Kabal. Si Comme une isle parvient parfois à retranscrire cet échange entre deux générations, l’engagement y demeure essentiellement pensé en termes d’organisations politiques, un parti pris assumé par les artistes. « Il faut remettre du questionnement dans l’art, il est rare que l’on parle de communisme chez les artistes aujourd’hui, même si ce n’est pas la seule voie », regrette Leïla Cukierman. Un choix qui laisse entrevoir une certaine nostalgie et entretient le mythe de l’âge d’or de l’engagement militant des années 1960-1970. Dans ce contexte, Comme une isle se lit évidemment aussi « communisme ».
Les prochaines dates
Samedi 8 décembre 2012 à 18 heures au théâtre André Malraux – 102, avenue du Général de Gaulle – 94550 Chevilly-la-Rue
Vendredi 25 janvier 2013 à 20 h 30 au théâtre Jean Vilar – 1 rue Paul Signac – 94110 Arcueil
Vendredi 15 février 2013 à 20 h 30 au Train Théâtre – 1 rue Aragon – 26800 Porte-les-Valence
Samedi 23 février 2013 à 20 h 30, dimanche 24 février à 17 h 30 à L’espace Gérard Philipe – 26 rue Gérard Philipe – 94120 Fontenay-sous-Bois
Jeudi 16 mai 2013 à 20 h 30 au Théâtre Arlequin – 35 rue Jean-Raynal – 91390 Morsang-sur-Orge

///Article N° : 11183

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