Immatriculation temporaire

De Gahité Fofana

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Son père s’appelle Camara Laye et ce n’est pas un hasard : les images d’Epinal de l’Afrique s’envoleront bien vite lorsque ce jeune métis français déboule en Guinée-Conakry pour y retrouver son père. L’amère rencontre se fera après une mystérieuse attente dont on se dit qu’elle doit être protection, initiation à la violence des rapports en situation de pauvreté. Immatriculation temporaire, magnifique essai, est ainsi essentiellement un regard : la ville et ceux qui la peuplent sont l’objet d’une rencontre, celle d’un homme silencieux mais déterminé et de ceux qui l’accueillent, milieu trouble, royaume des combines et des boites de nuit. Fofana (qui joue lui-même le rôle principal) retrouve alors cette ambiance qu’il affectionnait déjà dans le magnifique Temedy, ce souci de capter l’envers du décor, les atmosphères nocturnes, le cadre de vie et la désillusion. Silences et regards en disent long sur les attentes et les incertitudes, et certaines choses discrètes ne se filment qu’à travers un rideau. Car ce regard respecte profondément son sujet, ne l’utilise jamais. L’image serre sur les corps ou les lieux, la caméra se porte à l’épaule dans les déplacements, le cadre joue sur les lignes, les ombres, les silhouettes, les lumières pour rendre le trouble que ressent ce fils à la recherche d’un père absent, d’une Afrique qui se soustrait à lui. Il lui faudra accompagner John Kra et Sylla sur un coup foireux pour arriver à participer à ce qui l’entoure. « Tous les chats fouillent dans les poubelles mais seuls les chats imprudents tombent dedans » dit le proverbe pulaar : cela ne pouvait bien se terminer…

2000, 77 mn, 35 mm, coprod Arte France, Léo & Cie, FGF, image : Peter Chappell, mus. : Sékou Kouyaté, avec Fatoumata Kanté (Rama), Gahité Fofana (Mathias Lénault), Yves Guichard Traoré (John Tra), Ibrahima Sano (Sylla).
///Article N° : 2070

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