Cinémathèque africaine : la route est longue

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A l’occasion du Fespaco 97, rencontre avec Ardiouma Soma qui dirige la cinémathèque africaine de Ouagadougou : bilan et perspectives.

Il y a urgence ! Des films se perdent et c’est la sauvegarde du patrimoine culturel africain qui est en cause. On a plus aucune copie de Les Mille et une mains de Souheil Ben Barka, qui obtint pourtant l’étalon de Yennenga au Fespaco de 1979. La restauration du négatif de Paweogo (Sanou Kollo, Burkina Faso 1983) est urgente. Mais il faut trouver 80 000 francs…
Rien d’original : c’est en termes d’argent que se pose le problème.  » Les bailleurs de fonds sont moins sensibles à la conservation du patrimoine qu’aux nouveaux projets  » note Ardiouma Soma. Pourtant, lorsque Canal Horizons a voulu passer La Femme au couteau de l’Ivoirien Timité Bassori (1969), le négatif était inutilisable pour un tirage vidéo, et ô merveille, la cinémathèque disposait d’une copie neuve… Les originaux se dégradent ou se perdent : des laboratoires ferment ou les stockent mal. Où retrouver les films coproduits avec la Yougoslavie ou la Russie ? La cinémathèque est essentielle.
L’idée n’est pas neuve. On en parlait déjà en 1966 au Festival mondial des arts nègres de Dakar ! En 1973, la Fédération panafricaine des cinéastes choisit Ouagadougou pour constituer un stock de films à conserver : elle récompense ainsi la Haute-Volta de sa décision courageuse de nationaliser les salles. En 1985, la Fepaci demande à ses membres de céder des copies de leurs oeuvres pour constituer les premiers fonds d’une cinémathèque africaine. De 40 films en 1989, le stock passe à 160 films aujourd’hui, auxquels s’ajoutent les 400 films burkinabè déjà détenus par la direction de la production cinématographique.
Le CNC français procède aux études techniques pour l’aménagement d’un centre de conservation équipé pour le traitement et l’entretien des films (vérification, synchronisation, montage, visionnement, dépoussiérage) et le finance avec l’ACCT et l’Union européenne. Le Danemark aide au tirage des copies et le Burkina Faso prend les constructions en charge.
La cinémathèque trône aujourd’hui devant un immense chantier, futur site d’une salle de projections de 500 places qui programmera des séries de films comme dans les autres cinémathèques. Lorsque le lieu pourra de plus accueillir le MICA (marché de l’audiovisuel), des expositions et une cafetéria, le site deviendra un lieu permanent du cinéma africain et le centre du Fespaco. Mais l’Etat burkinabè, qui assume déjà les frais de fonctionnement et les sept permanents, manque de fonds et la construction traîne…
Chercheurs et étudiants peuvent aujourd’hui visionner à la cinémathèque, à condition d’en faire la demande écrite et motivée au secrétaire général du Fespaco. Le sérieux est de rigueur :  » les films ne sortent de la cinémathèque que sur l’autorisation des ayant-droits  » insiste Ardiouma Soma. L’outil est en place ; il ne demande qu’à se développer. Encore faut-il le nerf de la guerre…

///Article N° : 2566

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