Zaïna, la cavalière de l’Atlas

De Bourlem Guerdjou

Print Friendly, PDF & Email

Première étape : Himalaya. Côté succès public, la recette du dépaysement ethno a fait ses preuves (Atanarjuat, L’Enfance d’un chef, Le Dernier trappeur etc.). Avec ses grandes étendues minérales et ses paysages à couper le souffle, l’Atlas n’a rien à envier aux plus hautes montagnes. Ancrez-y une histoire simple où le problème principal est de se déplacer et donc d’affronter les éléments, baignez le tout dans une musique enveloppante et le tour est joué. L’affrontement des hommes trouve son ampleur dans le spectacle des décors. Une jeune fille, Zaïna, y est objet de passion, occasion de trahison, enjeu d’engagement.
Deuxième étape : Les Aventuriers de l’arche perdue. Il ne suffit pas que les hommes se battent au sabre ou se poursuivent dans le désert, il faut du suspens et du dépassement. Une crête enneigée fera l’affaire, goulot d’étranglement mais seul échappatoire face aux méchants.
Troisième étape : Ben Hur. Puisque Zaïna a pour fonction d’aider son père à dépasser sa culpabilité d’avoir répudié sa mère par conformisme aux idées reçues et à le sortir de l’infernal duel avec son rival, autant lui donner le beau rôle : initiée au maniement des chevaux, elle s’imposera dans la course finale. Ce n’est pas dévoiler l’histoire que d’annoncer le happy end : on sait dès le départ que dans une conception si classique du film de genre, tout ne peut que bien se finir après avoir frisé la catastrophe !
Tout cela est ainsi prévisible, formaté, superficiel, bien pensant et fait pour plaire (et ça marche : prix du public à Locarno). L’économie de dialogues qui privilégie les regards scrutateurs et les gestes emblématiques a la légèreté d’une pierre tombale. La systématisation du français dynamite la volonté d’ancrage culturel. Les ralentis ou superpositions n’ont d’épique que leur intention et le film ne cesse de s’épuiser dans ses tentatives esthétiques. Voilà une bien décevante tentative de cinéma populaire par l’auteur du beau Vivre au paradis qui, par sa peinture de l’immigration algérienne des années 60, avait justement marqué car il n’en faisait jamais trop ! On nous dira que c’est un film familial mais nos enfants ne méritent-ils pas mieux que ce semblant de conte ? Les moyens mis dans le film ne parviennent pas à faire de cette jeune héroïne le personnage positif que le scénario voudrait bâtir. Comme le dit le dialogue : « Il y a des choses au monde que l’or ne peut acheter ».

///Article N° : 4075

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Laisser un commentaire