Une autocritique dans les guerres de la critique des cinémas africains

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Le texte schizophrénique qui va suivre est une tentative de dialogue avec moi-même dans ma réflexion sur ce qui est nécessaire à la critique des cinémas africains. Cela a commencé par une communication présentée lors de la conférence de l’AEGIS à Londres au cours de l’été 2005, une communication dans laquelle je présentais mes arguments contre la question de l’authenticité dans les études africaines, et de l’utilité limitée de la majorité des lieux communs dans la critique des cinémas africains depuis des décennies (1). Après cette communication, j’ai passé une année au Sénégal à enseigner à l’Université Cheikh Anta Diop. A Dakar, j’étais en permanence confronté aux effets que la globalisation génère dans le paysage urbain. Je ne pouvais pas quitter mon appartement sans être le témoin des empiètements de constructions érigés par les riches le long de la Corniche, sans être accosté par des mendiants dans la rue, sans être le témoin des réalités qui conduisaient des centaines de jeunes hommes à braver l’océan pour un voyage de plusieurs milliers de kilomètres pour essayer d’atteindre l’Europe. Cela a profondément marqué la façon dont mes préoccupations ont émergé, me plaçant dans un nouvel espace critique par rapport à ma position de Londres en 2005.
Mon texte présente cette dissonance sous la forme d’un dialogue, avec des ripostes à moi-même insérées en italiques dans le texte original que j’avais écrit pour cette conférence de 2005. Pour commencer, donc, je voudrais rappeler que j’avais intitulé mon texte de Londres, « Out with the Authentic, In with the Wazimamoto ». On peut trouver une autre version de ce texte dans l’introduction de mon livre sur les cinémas africains paru en 2007, un livre qu’on pourra consulter pour mieux connaître le développement que je me propose d’opérer au sujet de la critique des cinémas africains (2).

Il est temps d’opérer une révolution dans la critique des cinémas africains. Une révolution contre les vieilles formules fatiguées qui se sont déployées pour justifier des pratiques cinématographiques mais qui n’ont pas fondamentalement changées en quarante ans. Il est temps pour que s’élèvent de nouvelles voix, un nouveau paradigme, une nouvelle vision – un nouvel Aristote qui inventerait la poétique dont nous aurions besoin aujourd’hui pour traiter des cinémas africains.
Temps pour qui ? Quelles sont les voix critiques qui comptent ? La vision de Dakar m’amenait à me poser continuellement cette question. Depuis l’Occident, on considère que les tendances critiques dominantes sont universelles, que ce qui peut être lu régulièrement sur le sujet est compréhensible partout dans le monde et que, en dernière analyse, ce sont les universités des pays occidentaux qui sont le lieu d’un véritable travail critique.
Qu’est-ce qui n’allait pas avec les anciennes approches ? La pensée stéréotypée de Ferid Boughedir et Teshome Gabriel appartenaient à une époque où les engagements contre le colonialisme et le néocolonialisme étaient largement partagés par la gauche et, en un sens, formaient la colonne vertébrale de la pensée progressiste (3). Si le problème est que certains n’ont pas reconsidéré ces engagements, cela ne diminue pas pour autant leur validité originale en rapport avec une situation donnée. D’un autre côté, ces approches avaient un prix qui n’a pas été évalué à l’époque, et avec des hypothèses sur la libération nationale qui étaient énoncées comme si la question de l’Etat-nation ne nécessitait pas elle-même un réexamen. On aurait très bien pu admettre que le problème se situait aux niveaux de cibles qui auraient été mal définies plutôt que par rapport à la question du didactisme, c’est-à-dire au niveau de ce qui était visé par de vieilles métropoles coloniales déclinantes, des pouvoirs occidentaux secondaires ou des Etat-nations, plutôt qu’au niveau de ce que nous avons été conduits à considérer comme les forces systémiques plus vastes du capitalisme tardif.
Des cibles sont difficiles à identifier de manière significative, surtout avec le recul. Les certitudes dogmatiques qui apparaissent aujourd’hui si datées s’accordaient tout à fait avec les cinémas créés par Sembène Ousmane, Hailé Gerima, Sarah Maldoror, et Med Hondo, et constituaient l’épine dorsale d’une pratique cinématographique qui mobilisait une classe entière d’intellectuels. D’un autre côté, ils ne nous ont laissé aucuns outils pour comprendre les cinémas de Djibril Diop-Mambety, Abderrahmane Sissako, Jean-Pierre Bekolo ou Mahamat Salah Haroun, sans parler de toutes ces pratiques qui explosent régulièrement à travers les diverses pratiques vidéographiques, en commençant par celles de Nollywood.

Il est temps d’aller vers quelque chose de trash, pour commencer, quelque chose tout droit sorti d’un manuel de vidéo nigérian. Quelque chose de sexy, sans les poses banales de fesses exotiques, pirouettes en ventilateur pour touristes. Temps pour quelque chose de violent, sans l’obscénité de la brutalité triviale, rendant trivial les abus phallocentriques, sans la violence accompagnant la Vérité qui garde la main haute sur la pensée ou la différence. Surtout, c’est le recours aux truismes sécurisants et confortables qui doit être perturbé par cette nouvelle critique, le défi de ce nouveau Third Cinema.
Banales pour qui ? Pour les Européens puisque les danses africaines font partie du folklore et qu’on s’attend ainsi à les voir dans les films « africains », et parce que l’érotisme, dans la culture visuelle européenne, est quasiment de rigueur. A travers l’Afrique, les expressions ouvertes de l’érotisme sont offensantes sur le plan culturel, pour ne pas dire tabou. C’est encore une question qui est liée aux fausses représentations passées et présentes de l’Afrique par l’Europe, notamment quand il s’agit d’éclairer la sexualité féminine.
Le tabou au Sénégal et ailleurs en Afrique a toujours cours ; il est beaucoup plus limité en Europe. Pour une bonne partie du continent, les Guerres Culturelles deviennent des Guerres Morales, à tout le moins dans leurs formes les plus illuminées comme cela apparaît à travers les évangélistes et les mouvements islamistes (tels les Ibadi) qui ressurgissent, des mouvements qui abondent de nos jours. L’appel à contrer de tels mouvements militants et conservateurs est toujours plus facile à faire depuis l’étranger.
Par « truismes », je veux faire référence à des questions banales ou surévaluées et à des clichés. Ce que les Européens ont entendu encore et toujours peut correspondre à des choses qui n’ont jamais réellement été établies en Afrique, puisque les publics visés normalisent les « vérités » au sujet du « continent noir » pour les adapter à leurs propres hypothèses. Tandis que les publics européens sont traités comme s’ils avaient besoin d’être informés sur l’Afrique, les publics africains n’ont pas besoin d’être informés sur eux-mêmes. D’un autre côté, « être informé » pourrait impliquer d’exposer des questions telles que l’inceste, l’homosexualité, lesquelles sont des sujets tabous en Afrique, tandis que les exposer aux Européens reviendrait à exposer son propre linge sale à des étrangers.

Dans le Festival du cinéma de quartier de Dakar, en 2006, un film traitant de la question de l’inceste a gagné le grand prix des étudiants des écoles de cinéma. Dans ce film, la fille qui a été abusée sexuellement parle dos à la caméra et le sujet est abordé comme s’il ne l’avait jamais été auparavant. Et cela, malgré le fait que Vehi Ciosane ait été publié il y a plus de 40 ans. (4)
Peut-être ne devrait-on voir dans ces truismes que des notions qui serviraient à combattre le modernisme, des notions que nous avons utilisé pour élaborer un parcours des principales vaches sacrées. Je vais en faire la liste et suggérer des façons de les réduire en miettes, en empruntant les sentiers inhabituels vers la liberté ultime de ces nouveaux prestidigitateurs, de ces nouveaux équilibristes
Je liste ci-dessous les schibboleths critiques dominants que je souhaite traiter, ceux dont le caractère problématique doit, selon moi, être mis en avant.
1. Le film africain est important dans la communication de l’histoire, dans la correction des fausses représentations passées de l’histoire ;
2. Le film africain est important pour contrer Hollywood et les fausses représentations de l’Afrique dans les médias de masse ;
3. Le film africain représente la société africaine, le peuple africain, la culture africaine ;
4. Le film africain devrait être le lieu de la vérité ;
5. Le film africain est africain.
Les représentations de l’histoire sont marquées par deux problèmes : 1) L’histoire, du point de vue occidental, prend le statut d’histoire universelle. C’est la problématique d’Edouard Glissant dans Le Discours antillais, quand il oppose les histoires locales à la notion occidentale d’une « Histoire » universelle (5). 2) La vérité historique est cernée par la notion de fausse représentation par opposition à celle de précision, passant sous silence les problèmes soulevés par la notion de représentation elle-même. Il s’agit là d’une conception limitée de la mauvaise conscience qui échoue à traiter des questions problématiques en jeu à travers les notions essentialistes d’authenticité.
Le poststructuralisme occidental est sceptique vis-à-vis des politiques identitaires, vis-à-vis d’une représentation qui serait capable d’énoncer une vérité ou la vérité elle-même. C’est ce que Neil Larsen identifie dans le modernisme comme la crise
de et dans la représentation (6). En Afrique, le sentiment que les dangers sont trop grands et trop immédiats existe, trop grands et trop immédiats pour des questions qui nous conduisent à la textualité plutôt qu’à la réalité ; le « il n’y a pas de hors-texte » (7) n’a pas de poids face à l’immédiateté du réel. C’est comme si le Nord et le Sud ne partageaient pas le même discours, à moins que nous puissions prendre en considération un film comme Le Complot d’Aristote (1996), lequel commence par un rendez-vous ironique des deux bords.
Dans
In My Father’s House (1993), le territoire commun proposé par Appiah se situe au sein de l’humanisme, mais cela obstrue à la fois les questions poststructuralistes sur la vérité et les questions afro-centristes sur une mobilisation politique adéquate (8). Le dispositif postcolonial lui-même est divisé de manière radicale par le malaise lié aux attaques poststructuralistes envers la métaphysique de la présence et de l’idée, issue des Lumières, d’un sujet unifié. La subjectivité à l’intérieur de la désintégration de la communauté entre dans sa propre crise dystopique, comme le montre Achille Mbembe (9). Au Sénégal, les questions épineuses de la représentation renvoient à chaque fois à la xénophobie politique du Nord qui serait dirigée contre l’Islam.
La forme habituelle de cette question peut être perçue à travers les péripéties et le scandale qui ont entouré les caricatures danoises de Mahomet. En 2006, à Dakar, ces caricatures ont été considérées comme particulièrement insultantes, et les journaux qui avaient été censurés et réprimés par le Président Wade ont alors appelé à la suppression de ces caricatures malgré leurs propres appels, un peu auparavant, pour la défense de la liberté de la presse quand Wade est tombé à bras raccourcis sur le journal
Sud qui avait publié un entretien avec un leader des rebelles de Casamance. Il est plus difficile d’ignorer au Sénégal la peine causée par ces caricatures, ou par les mots utilisés par des leaders occidentaux dénigrants des Africains (des mots comme « marée noire » employés par Chirac, ou d' »émigration choisie » employés par Sarkozy) que dans les pays occidentaux où ils sont considérés comme liés à des questions marginales.

Une inversion des principes arbitraires tels que je les avais rapportés dans mon article original pourrait ouvrir à cinq nouvelles façons de voir ces questions-clés, quelque chose que nous pourrions considérer comme un ensemble africain de préoccupations.

1. Le Remplacement de l’Histoire. Jean Marie Teno dans Afrique je te plumerai (1992) en propose une version où il veut contrer l’histoire coloniale. Sembène faisait la même chose dans Emitaï (1971). Cependant les comédies légères et les romances sociales qui sont les plus populaires auprès des téléspectateurs sénégalais ne considèrent pas du tout ce genre de chose. Et si l’Histoire affleure jamais, c’est pratiquement pour être une ennuyeuse version officielle. L’héritage de Senghor apparaît encore dans les pièces présentant des figures nobles et importantes de l’histoire africaine qui sont montrées au théâtre Sorano, ou sous des formes plus intellectuelles, comme avec le roman de Boris Boubacar Diop, Les Tambours de la mémoire (10). Ce sont des textes qui peuvent encore s’adapter aux attentes de la haute culture.
Peut-être qu’une partie de l' »Histoire » s’est éloignée d’une correction des fausses représentations du passé vers une célébration personnelle de l’Histoire, comme dans le récit du griot. L’Histoire, en fait, comme dirait Jameson, a disparu, et la notion postmoderne d’un éternel présent prédomine, comme cela a toujours été le cas dans la culture populaire. L’Histoire a été remplacée par le feuilleton, le théâtre (11), le spectacle télévisé. Même les derniers films de Sembène vont dans cette direction : les figures de l’histoire dans
Faat Kiné (2000) sont désormais les images d’affiches de cinéma dans un récit qui est au plus près des romances de famille. La Vérité, qui était autrefois l’objectif de la haute conscience, est devenue une partie de la marge.
La question est donc, avec celle de la fin de l’Histoire, qu’est-ce qui a pris sa place ? Une nouvelle critique des cinémas africains devra faire face à un présent qui refuse les orientations téléologiques vers le changement qui avait marqué le
Third Cinema en tant que cinéma engagé. En d’autres termes, au lieu d’un cinéma du changement, c’est un cinéma qui est plus près du statut d’objet de la société de consommation, avec sa notion de style en cours, de mode, et surtout, de valeur exprimée dans les termes des produits de base du capitalisme. Inversement, il porterait la marque d’un cinéma tourné vers la mort, comme dans Si Gueriki de Idrissou Mora Kpai (2003) et Daratt de Mahamat-Saleh Haroun (2006).

2. La fin de l’Afrique comme Autre. Les questions des fausses représentations de l’Afrique dans le regard de l’Europe ont également disparu. Elles ont été remplacées par le regard de l’Afrique sur l’Europe, et ce regard est nourri par les médias populaires, la télévision, les films. Ce regard est marqué par un ordre matériel concret rempli de voitures de luxe, de villas, d’avions, au côté des images télévisées des pays occidentaux. Beaucoup de Dakarois ne sont plus obligés de demeurer à distance du riche, comme par le passé. Bien qu’ils puissent voir le mode de vie du riche comme étant en conflit avec les manières africaines traditionnelles, comme de manger pendant le Ramadan, ils le regardent aussi comme un signe de succès et de prestige qui serait à rechercher. En bref, la pauvreté dirige le regard de l’Afrique, et l’économie globalisée impose cette question dans tous les coins du continent. Nous nous sommes donc déplacés d’un intérêt pour les fausses représentations vers une vie avec les effets réels de la mondialisation.

3. Le besoin d’un leadership national. Les Sénégalais écrivent des romans qui sont proches de la fiction populaire mais qui reflètent encore un intérêt pour un leadership national, pour un gouvernement dirigé par une personne honnête et capable. En résumé, au lieu d’instituer un système révolutionnaire comme le socialisme africain qui sauverait son époque, comme le pensait Sékou Touré, Modibo Keïta, Julius Nyerere, Léopold Senghor, le FLN en Algérie, Abdul Nasser, Nelson Mandela – la génération du Soleil des indépendances -, désormais, la question qui se pose est celle d’un gouvernement honnête et en particulier d’un leader qui pourrait être un modèle pour la jeunesse.

4. La femme africaine moderne. La question des femmes est liée à la précédente comme le portrait du bon leader remplaçant le mauvais suggère maintenant que l’ancienne relation abusive entre les hommes et les femmes peut désormais être contestée par la femme moderne africaine. Elle est considérée comme celle qui a quitté le village au profit de la ville, et qui a été éduquée, comme le montrent les personnages de Ndella dans Les Tambours de la mémoire, ou de Rama, la sœur de El Hadj dans Xala (1974), ou le personnage-titre de Faat Kiné (2000) et sa sœur Aby.

5. La Fin du Patriarcat. La figure du Vieil Homme, du Mzee ou du Sage – le grand timonier qui validait le patriarcat après l’indépendance – est maintenant devenue soit fragile, fragilisée, diminuée, soit malveillante et, ainsi, elle est finalement dépassée. La crise n’est pas simplement une crise de la représentation, comme ce qui révèle, suivant la définition du modernisme et du post-modernisme de Neil Larsen, une crise de la représentation elle-même, mais une crise de la figure du patriarche qui est en train d’être remplacée dans l’imaginaire populaire par les jeunes femmes, comme dans Puuk Nini de Fanta Nacro (1996) ou Les Saignantes de Bekolo (2006), par des jeunes tsotsis dans Le Complot d’Aristote (1996), et plus récemment par des enfants soldats, la version la plus récente des enfants des rues des années 80 et 90. Et c’est la preuve d’une anxiété au sujet d’un patriarcat fragilisé, non pas concernant son renversement de fait vu qu’il reste encore très présent en Afrique. Les exemples peuvent être perçus à travers le leadership actuel, avec des hommes comme Wade, et les institutions sociales telles que le gouvernement, les universités avec leurs recteurs et leurs enseignants qui sont très largement des hommes, aussi bien que dans les familles ordinaires où le pater familias s’assoit encore en bout de table. Même au niveau des étudiants, les amicales ou les organisations sont conduites par de jeunes hommes, et de manière plus importante, dans la classe, ce sont les hommes qui, de manière caractéristique, soutiennent leurs points de vue avec le plus de force. D’une manière qui ne doit pas surprendre, le patriarcat est lié à une puissante normalisation de l’hétérosexualité, de sorte que le tabou au sujet de l’homosexualité demeure très dominant, mais l’anxiété quant à sa perpétuation abonde. Comme l’attestent les attaques récentes contre Karmen Geï de Joseph Ramaka (2001).

Il n’y a pas d’Histoire à représenter, à corriger, à travers le cinéma. Il n’y a qu’une autorité qui se représente elle-même et qui, dans son pouvoir, représente des images et un récit en tant qu’ils font autorité, qu’ils sont autorisés, qu’ils sont officiels, ou pire encore, qu’ils sont réels. Les archives peuvent varier entre Londres et Dakar, et on peut régulièrement entendre un appel à une nouvelle perspective, d’un point de vue afro-centriste. Mais la compréhension du passé comme une rationalisation d’hypothèses implicites sur l’histoire elle-même, et les hypothèses épistémologiques construites au sein de l’historicisme, n’apparaissent jamais. « C’est arrivé ainsi » serait le telos d’une telle pratique cinématographique, alors que les récits historiques sont devenus omniprésents dans les efforts habituels pour corriger les maladies du passé. Néanmoins, la correction est aveugle dès lors qu’elle s’appuie sur les mêmes valeurs progressistes, les mêmes compréhensions du mouvement téléologique de l’histoire que les récits seraient chargés de défier. Un argument identique est utilisé par Catherine Belsey dans son analyse du réalisme classique comme ce qui renforce les valeurs dominantes, de la même manière que le discours du « sens commun » employé dans le réalisme est ce qui est responsable de notre vision du monde à travers ce qui apparaît comme étant familier, c’est-à-dire l’ordre symbolique dominant. Le réalisme ne perd pas son épistémologie conservatrice en changeant le sujet qui perçoit le monde ; il renforce plutôt l’idéologie dominante en désamorçant le pouvoir de la critique tout en soutenant les hypothèses habituelles concernant le réel.
Tandis que l’épistémologie peut rendre compte du point de départ dans la création d’un texte ou le déploiement d’un discours, elle ne peut pas défaire le travail de refamiliarisation et de reterritorialisation effectué par les conventions génériques du réalisme. Ceci étant dit, il est maintenant clair à mes yeux que la magie du réalisme magique s’appuie sur une défamiliarisation vis-à-vis des normes occidentales, et est réalisée de manière substantielle par des écrivains expatriés plutôt que par ceux qui continuent de vivre et de publier sur le continent africain.
Dans « Cars Out of Place », Luise White montre combien les récits populaires africains qui cherchent à donner du sens aux véhicules d’urgences que sont les camions de pompier ou les ambulances ont donné lieux à des « mythes urbains » largement diffusés, prenant la forme d’histoire « wazimamoto » – motor-wizardry ou histoires de vampire. White appelle à une révision de nos notions d’authenticité, et affirme que « l’étude de vampires coloniaux est authentique non pas à cause d’une quelconque légitimité de ces voix que je cite, mais parce qu’elle engage l’écriture sur le monde colonial avec les images et les idiomes produits par les sujets eux-mêmes » (12). Cependant, ce ne sont pas seulement les récits historiques occidentaux et « autorisés » qui doivent être subvertis, mais toutes les notions d’authenticité elles-mêmes, comme il n’existe pas de lieu depuis lequel on pourrait se tenir afin d’évaluer cette « authenticité ». Il s’agit d’une notion centrale de la déconstruction, et elle concorde avec les notions lacaniennes, elles-mêmes subversives, de « méconnaissance » qui perturbe toute prétention à l’identité. Si une identité est « authentique », la connaissance de soi-même ne pourra provenir que d’un autre lieu que le soi afin d’observer, de manière réflexive, l' »authenticité » de cette identité. D’où vient donc cette connaissance au sujet d’un soi qui se tient à l’extérieur et qui observe l’autre ou observe le soi observant ? Ce modèle du sujet divisé, fondamental pour toute pensée poststructuraliste, détruit toute tentative pour soutenir la présence de l’authentique. Butler pousse ce raisonnement plus loin en prétendant que les identités du sujet sont performatives (performed), que la métaphysique de la présence repose de manière conformiste sur des présuppositions patriarcales qui fonctionnent comme une idéologie, c’est-à-dire qui naturalise ou authentifie les systèmes de pouvoir existants.
Dans la plupart des travaux, la performativité l’emporte sur l’essentialisme. Malgré la présence, dans l’Université sénégalaise, de notions comme celles de performativité, ou même d’évolution, celles-ci sont généralement abordées avec un certain scepticisme. Cette incrédulité s’appuie sur une compréhension des principes de l’Islam sénégalais, aussi bien que des notions idéologiques de ce qui est naturel et normal, qui renforce les différences dans les identités sexuelles.
Plutôt que vers l’authenticité, c’est vers l’acte de domestication que nous pourrions nous tourner, avec l’idée que toute production culturelle, toute image, et tout idiome est le produit d’un processus qui engage ce qui est autre pour le rendre familier ou identique. Ce serait tout particulièrement vrai des images. L’apparition de la caméra au XIXème siècle puis de l’image cinématographique en 1895, a introduit de nouvelles technologies dans les anciens styles et modes d’expression. Il a fallu du temps à Seydou Keïta puis à Malick Sibidé pour qu’ils s’approprient la photographie de studio d’Afrique francophone et réalisent leurs propres travaux. De la même manière, l’image cinématographique en Afrique a moins été inventée que recréée, représentée de nouveau, ainsi que le contexte africain pour la compréhension et la production des images du savoir le faisait lui-même sentir.
L’anxiété au sujet de l’authenticité et de l’engagement politique que l’ancienne critique doit essayer de négocier doit être lue à travers l’insistance permanente et dogmatique selon laquelle les films sérieux répondent aux fausses images et que la fausse Histoire est produite par l’Occident. A travers l’évaluation du travail de conscientisation, de désenchantement du public à l’égard de sa mauvaise conscience, comme ce projet communément admis l’implique, nous devons évaluer l’anxiété qui reste à débusquer à travers cette notion d’authenticité que cette anxiété serait censée protéger. Ceci explique le fait que ces cinq principes arbitraires cités précédemment soient révélateurs d’une préoccupation permanente pour la question de l’authenticité dans la critique des films africains : l’authenticité dans la représentation de l’Histoire, de la culture et du peuple, de l’image cinématographique, de la vérité, et de l’africanité. A la place de l’authenticité, nous devrions considérer les lieux de pouvoir, les appareils institutionnels qui rendent compte du contrôle de la production de l’image, de la « vraie » vérité, c’est-à-dire l’idiome et son contenu. Le « qui parle » devient ici « qui peut produire le discours », « qui peut disséminer le discours », « qui peut contrôler sa production ».
La critique de films africains récents pose, de manière récurrente, la même question que celle énoncée ci-dessus : qu’est-ce qui s’est réellement passé et qui aura la possibilité de dire la véritable histoire ? ; qui sont vraiment ces gens, et que sont réellement leurs vies ? ; quels sont les véritables problèmes qu’ils doivent affronter et surmonter aujourd’hui ? ; comment peut-on affronter les véritables forces qui ont subjugué notre peuple, les empêchant d’évoluer ? etc. Ces questions sont désormais des impasses.
C’est encore plus le cas quand nous considérons les effets totalement débilitants de la globalisation à travers l’Afrique, et l’inadéquation totale des anciennes doctrines pour les aborder.
Les questions qui avaient été préoccupantes pour la majorité des discours critiques contemporains dans des journaux importants comme Screen, questions telles que le rôle du désir, des technologies de production, de l’identification sexuelle (gendering), du pouvoir institutionnel, la subversion des rouages capitalistes ou corporatistes dominants, ou les valeurs masculines dominantes, sont souvent écartées comme étant occidentales, féministes, universalistes etc. Comment pourrions-nous aller au-delà de ces positions incompatibles ?

Avant de me mettre en route pour l’Afrique en 2005, mon objectif était de renverser les modèles dominants de pensée qui ont contrôlé et limité les approches des cinémas africains depuis les premières publications de Teshome Gabriel et Ferid Boughedir – des modèles critiques trop didactiques, réductionnistes, dogmatiques, et limités. L’idée de la réalisation cinématographique comme « griotologie » illustre cette approche depuis le début. Au cours des premiers pas du cinéma africain, il était admis que la superficialité du divertissement qui était accordé à l’expression des sentiments subjectifs, l’imagination, et les émotions devait être subordonnée aux besoins sociaux plus importants identifiés par une critique engagée, par un cinéma engagé. La conception, issue de Chinua Achebe, de l’auteur comme pédagogue n’a pas été contestée. En revalorisant l’imagination dans nos critiques, nous pouvons obtenir un rapport plus significatif à l’idéologie que celui déployé au cours des années 60. Le travail de l’imagination, comme Žižek nous le rappelle, émerge dans l’écart au centre de l’ordre symbolique, « le manque, le vide dans le Réel mettant en marche le mouvement symbolique de l’interprétation. » (13) En tentant de considérer cet écart fondamental dans nos façons de donner du sens à l’intérieur de nos ordres symboliques, un excès est généré qui débouche sur l’imagination et, dans ce processus, l’édifice de l’idéologie est construit. Le rejet originel de l’imagination comme pur divertissement a seulement conduit à la ré-instanciation du même ordre symbolique dominant que l’engagement était censé subvertir. La relation entre l’idéologie et l’imagination devrait indiquer la voie pour une nouvelle approche du cinéma africain.
A la suite de White, je voudrais rechercher dans les images et les voix africaines non pas une forme plus élevée de créateur authentiquement africain mais quelque chose de plus apparenté au « travail critique » des « tsotsis » de Bekolo, ces jeunes gangsters si amoureux du cinéma d’action que ce dernier les nomme, les regarde, et leur parle de façon à expliquer leur propre monde et leur rébellion contre les « pères » du cinéma africain. Il en résulte une tension entre le passé et le présent, laquelle déstabilise les voix magistrales de « ceux qui savent », et qui fait de la place pour celles plus sarcastiques, stupides, et fantasmagoriques qui se tiennent désormais dans les ruines des salles de cinémas, avec en mains les dernières productions piratées d’Hollywood, Bollywood, et Nollywood.

On peut entendre dans ces paroles que j’écrivais en 2005 l’influence des Cultural Studies, à travers leur focalisation sur la culture populaire et une politique marxiste ou progressiste. En même temps, il s’agit là d’une position poststructuraliste qui insiste sur le fait d’aller au-delà de la métaphysique de la présence, suivant ainsi les traces de Derrida en premier lieu, de Butler ensuite, et finalement de Spivak et Bhabha. Aucun d’entre eux ne m’est tombé dessus comme un bagage de plus à mettre de côté ; mais cela me préparait mal à affronter ce qu’on rencontre en premier lieu en retournant à Dakar, à savoir l’impact dramatique des politiques néolibérales. L’immédiateté, sinon la « réalité » de l’opulence, de la richesse, et du pouvoir des classes sociales supérieures par opposition avec la dégradation considérable de la vie de la majorité des pauvres, appelle à l’action, à l’action par rapport à la globalisation telle qu’expérimentée dans sa réalité la plus crue. La vieille politique est inadéquate pour affronter cela ; les positions confortables de l’engagement des années 60 sont désormais sans utilité dès lors que les opposants définis si clairement comme des néo-colonialistes français dans Xala (1974), ou ailleurs simplement comme de riches Européens ou Américains, ont été supplantés par des entités sans visages, bureaucratiques et de la globalisation que sont le Banque Mondiale et le Fonds Monétaire Internationale. Les organismes internationaux, les ONG, la « communauté internationale », souvent associés aux Nations Unies et à l’Occident, ont remplacé les anciennes formes de puissances extérieures. La vieille Linguere Ramatou, sous prothèses, dans Hyènes (1992) de Djibril Diop a remplacé la jeune et androgyne Anta et le refrain de « Paris, Paris » dans Touki Bouki (1973). Cette transition impossible d’une période à l’autre est ce que doit accomplir une pratique cinématographique actuelle.

Postscript, post-2005

Dans Guelwaar (1992), Sembène a créé la figure d’Hélène, la prostituée qui est l’amie de la sœur de Guelwaar. Elle est représentée de manière positive, contrairement à Oumi, la seconde femme francisée et assimilée de l’El Hadj qui, dans Xala, a été abattue dix-sept ans plus tôt, et anticipe le rôle-titre de Faat Kiné, la femme moderne émancipée. Les deux sont représentées au sein de l’économie d’une norme hétérosexuelle dont les hypothèses ne sont jamais remises en question – le gouffre entre les conceptions du féminisme occidental et celles du féminisme africain demeure considérable.
L’image finale de Guelwaar (1992) représente l’esprit de la révolution comme étant transmise à une jeunesse éclairée prête à rejeter l’aide occidentale. Si la solution implicite du film est l’autosuffisance – à côté d’une harmonie communautaire basée sur le nationalisme culturel, l’afro-centrisme, et l’élimination d’un leadership corrompu et dépendant -, on doit se demander quelles hypothèses concernant l’authenticité et la pensée originaire gouvernent désormais une nouvelle version de la résistance et de la pensée révolutionnaire. Un virage vers la troisième vague féministe africaine aborderait en fait le cœur de ces problèmes dans la mesure où l’authenticité et la pensée originelle sont fondées sur des conceptions essentialistes et logocentriques de l’identité.
Ma réaction à l’appel du film de Sembène à refuser l’aide étrangère a considérablement changé après que j’ai été témoin, petit à petit, de la marque si flagrante de l’aide internationale dans le paysage africain : elle rend incompétent, elle est humiliante, de manière très semblable à ce que Sembène proclamait à travers Guelwaar. La scène inoubliable qui décrit cela est celle où Guelwaar fait un discours dans lequel il conclut en étendant ses mains, pour se moquer de l’Etat comme d’un mendiant, et en disant « merci, merci », aux donateurs internationaux – un Etat dont les représentants étaient des spectateurs dans les tribunes.
Sembène s’est positionné lui-même comme un griot africain dont le récit parle au nom de la communauté. Les critiques comme Teshome Gabriel et Frank Ukadike voyaient cela comme quelque chose qui diffère de la focalisation occidentale sur l’individu. Cependant, ce que nous avons vu, c’est que les problèmes de la communauté dans les cinémas africains sont exprimés à travers des protagonistes dont la fonction, comme celle du héros, est de représenter le groupe. On pourrait prétendre que la formule hollywoodienne crée un centre d’attention sur la psychologie individuelle par contraste avec les drames sociaux dans les films et la littérature africaine, mais la structure demeure la même, à savoir, celle de la présentation d’un problème focalisée sur un protagoniste, le développement d’une crise en conflit avec d’autres, limitant la résolution, et ensuite l’intervention qui permet la résolution. Catherine Belsey fournit la description-clé de cette clôture qui caractérise le texte réaliste classique – une description qui fonctionne avec Things Fall Apart aussi bien qu’avec Guelwaar ou d’autres films de Sembène : « L’histoire va inévitablement vers la clôture laquelle est aussi le dévoilement, la résolution de l’énigme à travers le rétablissement d’un ordre dont on sait qu’il a précédé les événements de l’histoire elle-même » (14). Elle ajoute plus loin que « le mouvement du récit réaliste classique vers la fermeture assure la réintégration d’un ordre, parfois un nouvel ordre, parfois un ordre ancien, mais qui est toujours intelligible parce que familier « . (15) Je soutiens que ce mouvement est caractéristique de l’école de Sembène, et c’est pourquoi la compréhension de la position idéologique figée précède l’embarquement des personnages dans l’intrigue. En d’autres termes, le cinéaste sembènien est dans la position de celui qui est censé savoir tel que défini par Lacan, et cela met le spectateur à la place du récepteur passif de ce savoir plutôt que dans celle du participant actif dans la découverte dudit savoir, comme les avocats du Third Cinema tels que Tomas Alea Guttierez ou Solanas et Gettino l’auraient dit.
La question qui se pose, finalement, est de savoir quel est le prix payé par les cinéastes africains du réalisme social traditionnel, tels Sembène, Hondo, Maldoror, Cissé, Kaboré, Ouédraogo, et les autres depuis les années 60 et 70 ? Est-ce que leur approche des questions de dépendance, de domination sociale et politique, de combat pour la libération les a conduits à une série de fermetures désormais incompatibles avec les modèles théoriques en cours ? Est-ce que la troisième vague du féminisme apporte une ouverture qui nous permet d’aller au-delà de cette chaîne ? On peut situer la possibilité d’une nouvelle perspective éthique à travers ce que Derrida pourrait appeler l’excès du terme occlusif. Cette possibilité est à l’opposé de l’histoire rabâchée et anti-théorique qui identifierait le post-modernisme à un relativisme. Elle est plutôt proche de la position de Bhabha qui recherche la différance comme le lieu d’une résistance au colonialisme. Je propose de considérer les moments, les actes manqués, hors-cadre ou non-dits, comme les lieux où nous devons rechercher cette nouvelle position éthique. Cela va à l’encontre de cinquante ans de rhétorique révolutionnaire africaine en faveur d’une libération, une rhétorique construite sur une insistance à répondre aux prétentions contradictoire et bruyante de l’humanisme d’où est issu le colonialisme, à travers la propre version africaine d’un sujet unifié et justifié. Des pratiques cinématographiques africaines plus récentes indiquent que nous sommes entrés dans une époque où d’autres voix peuvent émerger dans les fissures du texte, et nous pouvons discerner de telles voix dans les œuvres de cinéastes tels que Djibril Diop-Mambéty ou Jean-Pierre Bekolo, ouvrant le chemin pour Abderrahmane Sissoko, Mahamat-Salah Haroun, Joseph Ramaka, Idrissou Mora Kpai, Fanta Régina Nacro, et Khady Sylla.

traduit de l’anglais américain par Samuel Lelièvre

1.N.d.T.: on trouvera un compte rendu de cette table ronde de l’AEGIS 2005 dans Samuel Lelièvre « Les cinémas africains à l’AEGIS 2005 », Africultures no. 65, (2005), pp.208-214.
2. Kenneth W. Harrow, Postcolonial African Cinema, Indianapolis / Bloomington, Indiana U Press, 2007.
3. Ferid Boughedir, Le cinéma africain de A à Z, OCIC, Bruxelles, 1987 ; Teshome Gabriel, Third Cinema in the Third World. The Aesthetics of Liberation, University of Michigan Research Press, Ann Arbor, 1982.
4. Ousmane Sembène, Vehi Ciosane ou Blanche-Genèse. Suivi du Mandat, Présence africaine, Paris, 1965.
5. Voir Robert Young, White Mythologies, Routledge, London, 1990 ; et Edouard Glissant, Caribbean Discourse, University of Virginia Press, Charlottesville, 1989.
6. La définition que donne Larsen du modernisme englobe toutes les différences dans la perspective que j’essaie d’établir ; cf. Neil Larsen, Modernism and Hegemony. A Materialist Critique of Aesthetic Agencies, University of Minnesota Press, Minneapolis, 1990. Dans ce cas, comme dans celui de Jameson, pour qui le capitalisme tardif est entièrement considéré depuis la perspective de Londres, New York, ou Los Angeles, l’étalon économique de base marque la culture comme s’il s’inscrivait dans la Culture. Larsen écrit « ma thèse (…) est que le modernisme, en tant qu’idéologie dominée, mais pas de manière spécifique, par le royaume de l’esthétique, est le contraire (…) d’une ‘crise dans la représentation’ historiquement objective qui affecte la construction de ce que sont initialement les identités sociales et politiques. Cette crise (…) est le résultat de la modernisation du capital lui-même au cours du XIXème siècle, notamment dans la période qui a conduit à la transformation du classique capitalisme de marché au capitalisme d’Etat et à l’impérialisme (…) la ‘crise dans la représentation’, entraînant également une ‘crise dans l’action’ : le sentiment que l’action sociale et historique est exercée par des sujets liés à la société comme un tout par des liens représentationnels de l’identité (…) vacille face à des évènements indiquant que les ‘héros’ traditionnels ont été usurpés par des forces anonymes. Le modernisme découle de cette crise – qui en retour se comprend comme dérivant d’une fausseté intrinsèque résidant dans une opération purement conceptuelle, la représentation – et la renverse. Cette crise dans la représentation devient une crise de la représentation : la représentation ne ‘fonctionne’ plus, ne permet plus d’offrir au sujet un accès cognitif à l’objet.«  (p. xxiv).
7. N.d.T. : en français dans le texte.
8. Kwame Anthony Appiah, In My Father’s House, Oxford University Press, New York and London, 1993. D’où l’appel de Spivak pour des « essentialismes stratégiques », et l’attirance de Gilroy pour la solidarité noire et les exigences politiques dans Black Atlantic. Modernity and Double Consciousness (Harvard University Press, Cambridge, 1993).
9. Achille Mbembe, On the Postcolony, University of California Press, Berkeley, 2001.
10. Boris Boubacar Diop, Les Tambours de la mémoire, L’Harmattan, Paris, 2000.
11. C’est le terme sénégalais pour désigner les soap operas avec des épisodes autonomes.
12. Luis White, « Cars Out of Place », in Tensions of Empire, F. Cooper and A. L. Stoler (dir.), University of California Press, Berkeley and Los Angeles, p. 438.
13. Slavoj Žižek, Looking Awry, MIT Press, Cambridge (MA) / London, 1998, p. 8.
14. Catherine Belsey, Critical Practice, Routledge, London, 1980, p. 70.
15. Catherine Belsey, op. cit., p. 75. (N.d.T. : C’est l’auteur qui souligne).
Oeuvres citées

Appiah, Kwame Anthony. « Is the’Post-‘ in’Postcolonial’ the’Post-‘ in’Postmodern’? » In My Father’s House. New York and London: Oxford University Press, 1993.
Belsey, Catherine. Critical Practice. London: Routledge, 1980.
Bekolo, Jean-Pierre. Aristotle’s Plot. 35 mm. 70 min. JBA Production, BFI. France/Zimbabwe. 1996. Bekolo, Jean-Pierre. Les Saignantes. Digital betacom. 92 min. Quartier Mozart Films, é4 Television. France/Cameroon. 2005.
Diop, Boris Boubacar. Les Tambours de la mémoire Paris: L’Harmattan, 2000.
Glissant, Edouard. Caribbean Discourse. Trans. Michael Dash. Charlottesville: University of Virginia Press, 1989.
Haroun, Mahamat-Salah. Daratt. 96 minutes. Chinguitty Films, Entre chien et loup, Goi-goi productions, Fonds sud cinéma, New Crowned Hope, Tele-Chad, Arte France Cinéma. Chad. 2006.
Kpai, Idrissou Mora. Si Gueriki. 62 minutes. Centre National de la Cinématographie, France 5, Les Films de raphia, Lichtblick Film und Fernseh produktion (1), Noble Films. Benin, France, Germany. 2003.
Larsen, Neil. Modernism and Hegemony: A Materialist Critique of Aesthetic Agencies. Minneapolis: University of Minnesota Press, 1990.
Mbembe, Achille. On the Postcolony. (2000). Trs. Murray Last, Steven Rendall, and Janet Roitman. Berkeley: University of California Press, 2001.
Nacro, Fanta. « Puk Nini. » 32 minutes. Burkina Faso 1995.
Ramaka, Jo. Karmen Gei. 86 minutes. Canal + Horizons, Canal +. Senegal.2001.
Sembène Ousmane. Emitai. 103 min. Films Doomireew. Senegal. 1971.
Sembène Ousmane. Faat Kine. 35 mm. 120 min. Doomireew. Senegal. 2000.
Sembène Ousmane. Guelwaar. 35 mm. 115 min. Channel IV, Doomireew, France 3 Cinéma, Galatée Films, New Yorker Films, Westdeutscher Rundfunk (WDR). Senegal. 1992.
Sembène Ousmane. Vehi Ciosane, ou Blance-Genèse. Suivi du Mandat. Paris: Présence africaine, 1965.
Sembène Ousmane -. Xala. 123 min. Société Nationale de Cinématographie/ Filmi Doomireew. Senegal, 1974.
Teno, Jean-Marie. Afrique, je te plumerai. 16 mm. 88 min. Les Films du Raffia.Cameroon,1992.
White, Luise, « Cars Out of Place. » In Frederick Cooper and Ann Laura Stoler, eds. Tensions of Empire. Berkeley and Los Angeles: University of California Press, 1997.
Young, Robert. White Mythologies: Writing History and the West. London and New York: Routledge, 1990.
Žižek, Slavoj. Looking Awry. (1991). Cambridge, MA, and London: MIT Press, 1998.///Article N° : 9464

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