Fiche Spectacle
Théâtre
THéâTRE
Refus (Le) – Adaptation et mise en scène de Jean Quercy
Ferdinand Oyono
Contributeur(s) : Jean Quercy, Mukuna Kashala, Frédéric Laurent, Robert Naná, Betty Bussmann, Eric Auvray, Paulin F. Fodouop, Gérard Probst
Date : 02 Novembre 2005

Français

Adaptation et mise en scène de Jean Quercy, d’après l’oeuvre de Jean Moulin et de Ferdinand Oyono

Le Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque
et de la Libération de Paris – Musée Jean Moulin
Le Lavoir Moderne Parisien
La compagnie Théâtre Averse
avec le soutien de la Ville de Paris et
du Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les
discriminations (FASILD)
présentent la mise en espace du spectacle : Le refus.

d’après « Premier combat » de Jean MOULIN et
« Le vieux nègre et la médaille » de Ferdinand OYNONO
© Editions de Minuit / Folio Gallimard

adaptation et mise en espace : Jean QUERCY
avec :
Eric AUVRAY, Betty BUSSMAN, Paulin FODOUOP, Frédéric
LAURENT, Gérard PROBST, Robert NANA, Mukuna KASHALA


Source image : * Reproduction du dessin de Pessin paru dans Le Monde du 11/11/1996 avec l’aimable autorisation de l’auteur



Le spectacle
Le point de départ du spectacle « LE REFUS » est le premier acte de résistance de Jean Moulin, raconté par un griot aux habitants d’un village africain : Juin 1940 Jean Moulin décide de ne pas se replier et de rester à son poste à la Préfecture de Chartres. Il veille aux bonnes conditions d’accueil et d’hébergement des habitants et des réfugiés et il attend l’ennemi. « Tenir bon pour maintenir un minimum d’armature sociale ». Les nazis se mettent en tête d’imputer des massacres de civils aux troupes africaines qui leur résistent et défendent la France. Jean Moulin refuse de cautionner cette propagande. Enfermé dans une cellule avec un tirailleur sénégalais, il tente au cours de la nuit, de se trancher la gorge pour ne pas céder.
A la fin des années 50 en Haute Volta le vieux Meka est décoré en l’honneur de ses fils morts pour la France. Il est rempli d’une grande fierté mais il comprend vite les limites des manifestations d’amitié des autorités coloniales qui l’ignorent dès la remise de décoration terminée. Abusant des boissons de la réception, il est ramassé par une patrouille qui le brutalise et l’enferme au poste pour la nuit. Parti de chez lui en héros, il rentre humilié en jurant de ne plus jamais chercher à fréquenter les hommes blancs. Le griot du village adoucit son amertume en lui faisant revivre la rencontre dramatique de son fils aîné et de Jean Moulin le 17 juin 1940.

Les partenaires du projet
Le spectacle est soutenu par le Musée Jean Moulin de la ville de Paris avec lequel la
compagnie a noué des relations de travail régulières et confiantes depuis la création de
« L’ETRANGE DEFAITE », d’après l’oeuvre de Marc Bloch, joué 120 fois au Musée de novembre 2001 à janvier 2005.

En terme de financement, le REFUS a déjà reçu les appuis de :
· la Ville de PARIS, déjà partenaire de « L’ETRANGE DEFAITE » et dont le maire adjoint, chargé de la mémoire du monde combattant a obtenu le soutien du projet,
· le FASILD Ile de France (Fonds d’action et de soutien pour intégration et la lutte contre les discriminations) qui, dès le début du projet, a marqué son intérêt pour ladémarche de notre compagnie et nous a apporté son conseil et ses contacts
Par ailleurs le FASILD Rhône Alpes est à l’origine de la présentation du projet à
l’occasion du Traces 2005 Forum régional des mémoires d’immigrés.

Les auteurs
LE REFUS est une adaptation par Jean QUERCY de deux textes différents :
« Premier combat » écrit par Jean MOULIN au début 1941 et publié en 1947
« Le vieux nègre et la médaille » de Ferdinand OYONO publié en 1956Jean Moulin né à Béziers en 1899, mort probablement dans un convoi de déporté en 1943, Jean Moulin fit une carrière dans l’administration préfectorale entre les 2 guerres (secrétaire général de la Somme, préfet de l’Aveyron puis d’Eure et Loir).
Il fait partie du cabinet de Pierre Cot, ministre de l’Air en1932 et en 1936.
Resté à son poste à Chartres en 1940 lors de l’arrivée des allemands, il se tranche la gorge pour ne pas signer un document diffamant les troupes sénégalaises.
Révoqué le 4 novembre 1940, il entre dans la clandestinité et rejoint le général De Gaulle à Londres. Celui-ci le charge d’unifier les mouvements de résistance en France.
Président du Conseil National de la Résistance, il est arrêté en juin 1943.
« Premier combat » est le seul ouvrage rédigé par Jean Moulin. Il s’agit du journal de bord du Préfet de Chartres durant les journées d’exode de juin 1940.
Durant ses loisirs, Jean Moulin dessinait. Il a laissé de très nombreuses caricatures et aquarelles. Il fréquentait les artistes parisiens, dont Max Jacob.

Extraits du spectacle

Yera Ah ces blancs ! Rien n’est facile avec eux. Quand il faut marcher, ils courent ! Quand il faut courir,
ils marchent. Et quand ils vous ont promis quelque chose, ce sont des tortues !
Et même des caméléons ! Il n’y a rien de bon à attendre d’eux !
Griot Tu ne peux pas dire ça comme ça Yera. Tous les blancs ne sont pas pareils.
Kelara Voilà !
Griot Ton père ne parlerait pas comme toi, même s’il attend depuis longtemps sa pension !
Yera Moi, je sais ce que je dis et il n’y a rien à changer, dans mes propos. Les soldats blancs de son
régiment, ils touchaient déjà leur pension avant même que mon père revienne en Afrique. Pourquoi
ça ?
Griot Tu as raison, ce n’est pas juste. Mais je peux te le dire, tous les blancs ne sont pas mauvais.
Yera Moi je n’en connais pas un seul qui soit bon.
Griot J’ai pensé longtemps comme toi Yera, mais aujourd’hui il y a des choses que tu ne sais pas et
que moi, griot, je sais !
Ecoute ! Ecoute Yera, écoute plutôt l’histoire ! A la fin tu changeras d’avis !
Noir.
Griot Regardez
Yera On n’y voit plus rien
Griot Prenez patience et écoutez !
Yera Justement je n’entends rien non plus
Kelara Moi non plus
Griot Chut, c’est Jean Moulin !
Yera Quoi, Jean Moulin !
Griot Chut, taisez-vous !
La radio : … dernières nouvelles du front : hier soir, le gouvernement a déclaré Paris ville ouverte à compter d’aujourd’hui 14 juin 1940 à midi. L’ensemble des forces militaires et civiles ont procédé à leur évacuation au début de la nuit. Les opérations ont été considérablement freinées par le flot de réfugiés qui ……
Noir.
Moulin Le courant est coupé… Ne bougez pas, j’ai des allumettes.
Moulin allume une lampe à huile.
Moulin Paris est pris ! Un réfugié vient de me confirme la nouvelle.
Pour notre secteur, je n’ai aucune précision sur l’avancée allemande mais les rues sont pleines de gens affamés.
Le centre d’accueil de l’hôpital déborde de réfugiés. Il faut servir des repas ici dès ce soir.
L’intendant m’a laissé un stock de rations avant de partir. Demandez aux employés de la Préfecture de vous aider à tout apporter.
Griot Vas-y Kelara, réponds-lui, tu viens de faire un tour en ville et tu lui racontes ce que tu as vu.

Pourquoi ce spectacle aujourd’hui ?
Le spectacle est construit sur la rencontre de deux univers très différents, celui de Jean Moulin et celui de Ferdinand Oyono.
Le livre de Jean Moulin est un journal de bord, reprenant heure par heure les événements vécus par son auteur à Chartres du 14 au 18 juin 1940. Le récit est sobre, sombre. Il fait découvrir l’état de décomposition de la société française de l’époque. Il décrit aussi la violence des premiers coups de la barbarie nazie dans notre pays.
Le récit de Ferdinand Oyono déborde de vie. C’est un roman, mais qui s’appuie sur les faits de la colonisation française en Afrique. C’est un texte où le rire tend à éclater à chaque instant et balaie, dans la scène finale, l’amertume des injustices de cette colonisation.
LE REFUS met en relation deux histoires qui se répondent à travers le temps, les lieux et les cultures. Il est construit sur un mélange joyeusement explosif.
Mais au-delà du plaisir que nous procurent la réunion de ces textes particulièrement originaux et le jeu d’une troupe débordante de vitalité, pourquoi monter le REFUS aujourd’hui ? En août 2004, nous avons vu enfin la République rendre solennellement hommage à des hommes d’Afrique, à l’occasion de la commémoration du Débarquement de Provence. Cet hommage était légitime et bien venu même s’il était tardif. Mais au-delà de l’hommage, que reste-t-il dans notre mémoire collective de faits survenus il y a 60 ans ? Il est frappant qu’au sein de notre pays des hommes et des femmes de bonne volonté se côtoient en ignorant largement le passé et l’histoire de leur voisin, malgré la part commune dans la reconstruction de notre liberté.
Les fils et filles de l’immigration ont su, même si certains ne le savent plus aujourd’hui, que la génération de leur grand-père a porté les armes pour défendre la France en 1940, 1943 et 1944, que certains d’entre eux sont morts sous les balles françaises à Thiaroyé, que les autres ont vu le montant de leur retraite « gelé » depuis 1959. J’ai été frappé par le fait que ces faits restent gravés dans la mémoire de beaucoup de français d’origine africaine. Qui le sait aujourd’hui parmi les français « de souche » ? Les enfants de la France libre (nous tous j’espère et pas seulement les descendants des Forces françaises libres et des résistants) peuvent être fiers que des français de tous milieux et de toutes les régions aient caché et protégé des personnes persécutées pendant la guerre. Parmi celles-là il y a eu des soldats africains qui ont ainsi échappé aux massacres commis par les nazis et à la captivité. Ils devraient savoir que Jean Moulin s’est coupé la gorge en juin 1940 pour ne pas accuser les tirailleurs sénégalais de prétendus massacres de civils. Combien d’enfants de l’immigration le savent-ils ? Il y a pourtant matière à être fier de ces racines, cette histoire commune et de cette fraternité. Moins de la façon dont on a remercié nos frères d’armes ensuite.
Le REFUS participe à un travail de mémoire. Il rappelle la dette des générations actuelles vis à vis d’une partie de leurs aînés des années 40. Il est aussi l’occasion de redécouvrir des motifs de fraternité au sein de notre société multiculturelle.
Jean Quercy

La démarche
Une mise en espace du spectacle permettant aux différents partenaires du projet de concrétiser leurs engagements, sera présentée au Lavoir Moderne Parisien LMP – Paris 18ème les 2, 3 et 4 novembre 2005, avec l’appui de plusieurs collèges du quartier de la Goutte d’Or.
Parallèlement, cette mise en espace sera présentée les 2 et 3 décembre 2005 au Théâtre des Asphodèles (Lyon 3ème) à l’occasion de TRACES 2005 Forum régional des mémoires d’immigrés.
Le spectacle sera créé au Musée Jean Moulin Mémorial Leclerc (Paris 15ème). au printemps 2006. Partenaire de la compagnie depuis 1999, ce lieu a une dimension symbolique forte par rapport au spectacle, puisque ce musée de la Ville de Paris a pour fonction de faire connaître la vie et la personnalité de Jean Moulin d’une part, du général Leclerc et ses compagnons de la 2ème DB d’autre part. Et on sait que cette armée fut composée pour plus de la moitié de troupes africaines Mais le musée n’a pas cependant vocation à être une salle de spectacle permanente.
Par ailleurs l’essence même du projet qui est à l’origine du REFUS, nous conduit à aller à la rencontre du public, là où il se trouve.
La compagnie THEATRE AVERSE a donc engagé dès cette année une démarche qui sort du schéma habituel de production et de diffusion d’un spectacle théâtral, d’aussi bonne qualité soit-il. Le thème du spectacle nous a incité à rechercher des partenariats avec des acteurs du domaine social ou culturel, notamment les enseignants et les associations impliquées dans l’insertion en France des populations d’origine étrangère et la lutte contre les discriminations et concernées par la mémoire du sacrifice des troupes africaines pour la défense et la libération de notre pays L’objectif est de faire surgir des motifs de fierté et de fraternité pour les jeunes générations qui connaissent mal l’histoire de leurs aînés.
Une série de contacts ont déjà été noués dans ce but par la compagnie THEATRE AVERSE et a suscité des propositions d’élargissement du projet. Une première association rencontrée souhaite organiser une exposition et des débats autour du thème des combattants africains. Un partenariat avec la compagnie pourra consister à faire intervenir au cours des manifestations organisées, des comédiens du spectacle pour dire des textes ou faire revivre des témoignages.
Une autre association a proposé de créer un échange entre les jeunes adultes qui fréquentent l’association et la troupe qui jouera le spectacle. Une forme d’implication de ces jeunes dans le spectacle peut créer une dimension dramatique forte pour le public et favoriser l’écoute.
La démarche va dans le sens d’une réappropriation de l’espace public par des personnes qui en ont été privées ou qui en ont difficilement l’accès.
D’ores et déjà sont prévues au premier semestre 2006, les représentations suivantes, en sus des représentations au Musée Jean Moulin : · à Pantin dans le cadre d’un travail préalable avec la Maison de quartier des Courtillères et l’association Les Pères Africains · à Villeneuve la Garenne dans le cadre d’un travail préalable avec les associations Approches 92 et Mes-Tissages · à Paris (1er) avec l’atelier de théâtre du Centre social La Clairière

Les prolongements en 2006 et 2007
A partir du travail effectué au Musée Jean Moulin, qui servira de lieu de création et de promotion auprès des media, l’ambition est de présenter LE REFUS en 2006 dans différents lieux d’Ile de France intéressés par le thème du spectacle et permettant de toucher un public peu habitué à fréquenter les grandes salles de théâtre.
Concernant l’Ile de France, on peut d’ores et déjà noter que le spectacle sera repris au Lavoir Moderne Parisien pour 15 représentations dans le cadre du Festival Rue Léon au cours de l’été 2006.
L’Espace Lino Ventura de Garges les Gonesse a fait savoir son intérêt pour présenter le spectacle au cours du 3ème trimestre 2006 et prévoit de mener un travail préalable avec des intervenants financés sur des crédits de la politique de la ville.
Par ailleurs, le travail de la compagnie est soutenu depuis 2003 par l’association Citoyenneté Jeunesse, dépendant du Conseil Général de Seine Saint Denis. Ce soutien a permis à des élèves des collèges et lycées de Villepinte, Tremblay, Aulnay et Pantin d’assister à notre précédent spectacle « L’ETRANGE DEFAITE ». En préalable à chaque représentation, Citoyenneté Jeunesse a organisé une rencontre entre le metteur en scène et les élèves dans leurs établissements. Ce soutien est renouvelé pour LE REFUS.
Le spectacle sera proposé dans différentes régions, en commençant par quatre d’entre elles qui abritent des lieux chargés de mémoire des combats des Tirailleurs sénégalais et de la Résistance :
· en Eure et Loir, la ville de Chartres est un lieu symbolique fort puisqu’il est le cadre du premier acte de résistance de Jean Moulin. Par ailleurs de nombreux corps de soldats africains furent découverts à l’issue des combats sur la commune de Chartrainvlilliers. Les enseignants du Lycée Fulbert en partenariat avec la Fédération des OEuvres Laïques (FOL) et l’ONAC, envisagent un travail pédagogique au cours de l’année scolaire qui s’achèvera par une représentation du spectacle à Chartres,
· en Rhône Alpes, autour des villes de Lyon, Calluire et de Chasselay, là où fut érigé en 1941 le « TATA », cimetière commémorant le massacre de troupes africaines le 21 juin 1940,
· en Basse Normandie où la mémoire des combats de la deuxième guerre mondiale est particulièrement forte mais où la place faite aux soldats d’origine africaine reste réduite,
· en Aquitaine, où plusieurs centaines d’anciens tirailleurs vivent aujourd’hui dans des conditions précaires, afin de pouvoir bénéficier des prestations sociales réservées aux résidents en France.
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