L’association AC-LEFEU est déterminée à faire entendre les quartiers populaires dans la campagne présidentielle. Les 21 et 22 février 2012, le collectif a investi un hôtel particulier, en plein cur de Paris, pour y installer son ministère de la crise des banlieues.
« C’est une sorte de piqûre de rappel. Puisque le centre-ville ne vient pas à la banlieue, c’est la banlieue qui vient à lui », ironise Mohamed Mechmache, président de l’association AC-LEFEU (Association Collectif Liberté, égalité, Fraternité, Ensemble, Unis), qui compte environ 500 adhérents.
C’est François Hollande le premier des candidats à avoir poussé la porte de l’éphémère ministère de la crise des banlieues : « Il ne parle pas explicitement des banlieues dans son programme. Il nous a affirmé que ses propositions concernant le logement ou l’éducation étaient avant tout destinées aux populations des quartiers en difficulté. Mais on voudrait que ce soit plus explicite, car cette omertà peut être aussi considérée comme du mépris », explique Mehdi Bigaderne, membre du collectif. La visite, au sein de cet hôtel particulier du quartier du Marais, mis à disposition par la Mairie de Paris, les 21 et 22 février, a duré un peu moins d’une heure, mais le rendez-vous a été pris avec le candidat socialiste pour discuter autour des propositions concrètes du collectif.
« Lors des dernières présidentielles, beaucoup de chèques en blanc ont été signés. On va discuter de l’application de nos propositions, on sera aussi là pour être un garde-fou », prévient Mehdi Bigaderne. Philippe Poutou, du NPA, Eva Joly, d’Europe écologie-les Verts, ou Clémentine Autain pour le Front de Gauche se sont également succédé au ministère éphémère, qui a depuis repris ses quartiers à Clichy-sous-Bois, au siège de l’association.
« Pas besoin d’avoir fait l’Ena pour être force de proposition », aime rappeler Mohammed Mechmache. « Il suffit de tirer sa légitimité du terrain, de l’échange, de l’écoute. »
Le terrain, AC-LEFEU est tombé dedans dès sa création. Au lendemain des révoltes sociales qui ont secoué l’hexagone en novembre 2005, des habitants de Clichy-sous-Bois, étudiants, travailleurs, chômeurs, fondent un collectif, l’Association Collectif Liberté, égalité, Fraternité, Ensemble, Unis (AC-LEFEU), misant sur les valeurs républicaines et la solidarité pour faire cesser le feu dans les banlieues françaises.
Le collectif est allé à travers tout le pays à la rencontre des habitants des quartiers populaires pour dresser des cahiers de doléances. Deux bus, 120 villes, plus de 20 000 constats récoltés. Un travail titanesque. Résultat ? Au cur des doléances, une revendication principale : l’égalité. C’était en 2006.
À la veille de ce nouveau scrutin présidentiel, l’histoire se répète. Le constat d’exclusion et d’inégalités n’a pas changé, et les quartiers populaires sont les grands oubliés de la campagne. Alors AC-LEFEU remet ça. Du 16 au 25 mars, les militants repartent en tournée, à la rencontre des habitants, pour continuer la conscientisation.
Un grand débat national à Paris est à venir, avant les présidentielles, pour réunir tous les acteurs rencontrés autour des problématiques des banlieues. « Car ces problématiques font boule de neige, insiste Mehdi Bigaderne. Des zones rurales à la situation réunionnaise, il y a urgence à lutter concrètement contre l’exclusion et les inégalités. »
Sur l’emploi
– Implanter Pôle emploi dans les territoires les plus touchés par le chômage et renforcer les moyens des missions locales.
– Mettre en place des partenariats avec les entreprises publiques.
– Lutter contre le travail précaire : favoriser les exonérations des charges patronales des petites entreprises, au bénéfice du CDI, et réévaluer le SMIC à 1 300 euros net par mois.
Sur le logement
– Inéligibilité des maires qui n’auront pas respecté l’obligation de 20 % de logements sociaux sur leur territoire.
– Application réelle de la loi de réquisition pour la construction de logements sur des terrains communaux, et pour les logements et bureaux vides.
Sur l’éducation
– Verser aux étudiants une allocation d’autonomie, assujettie à un devoir de réussite et d’assiduité scolaire.
– Créer des postes supplémentaires dans les zones d’éducation prioritaires, y compris en Outre-mer.
– Maintien des classes RASED – Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté.
Sur la santé
– La médecine scolaire devra être renforcée avec des ateliers de prévention des conduites à risques.
– Mettre fin aux déremboursements des médicaments.
– Supprimer le droit d’entrée à l’Aide Médicale d’état. Sur la sécurité publique.
– Rendre obligatoire la délivrance d’une « attestation de contrôle d’identité » lors de chaque contrôle.
– Création d’une instance de contrôle de la police indépendante.
Sur la citoyenneté
– Rendre le vote obligatoire.
– Reconnaissance du vote blanc.
– Fixer un nombre limité de mandats consécutifs.
– Départ à la retraite des élus de la République à l’âge légal, comme pour tous les citoyens.
Le samedi 14 avril 2012 à 10h30, le collectif organise un grand débat national sur les quartiers populaires au Centre Culturel de L’Espace – 93 Place de l’Orangerie – 93390 Clichy-sous-Bois (en face de la mairie).Cet article a également été publié dans le magazine Afriscope n° 25, paru le 15 mars 2012///Article N° : 10688