Bénarès

De Barlen Pyamootoo

Print Friendly, PDF & Email

Adapté du premier roman du réalisateur-éditeur Barlen Pyamootoo (Le Seuil/ éditions de l’Olivier), ce film doux et attachant est tourné en créole mauricien, une langue magnifiquement imagée où le français est trop créolisé pour se comprendre sans sous-titres. Dans un pays où l’on roule à gauche et où l’anglais est langue nationale, les localités s’appellent Pamplemousse ou Curepipe. Ou bien Bénarès, d’où sont issus Nad et Mayi qui se rendent à Port-Louis pour y chercher deux filles. Mais là, c’est sans doute pour les besoins du film, pour évoquer cette ville sacrée où les Hindous vont mourir pour gagner leur place au paradis.
Mayi affirme qu’il y est allé pour se faire valoir auprès des deux prostituées qu’ils ramènent dans la plate-forme du pick-up de Jimmi, le vieil homme qui leur sert de chauffeur dans leur aventure. Maurice est petite mais le temps s’allonge dans ce voyage qui fera tout le film. Il ne s’y passe pas grand chose, sinon les petits détails d’une approche sentimentale où les prostituées ne se plaignent jamais et deviennent des copines avec qui on discute de la vie. Jimmi raconte la fermeture du moulin à cannes, le chômage, le déclin du village. Les paysages défilent, jamais carte-postales mais vibrant de couleurs et de lumières. Un rythme s’installe, en phase avec ces personnages diserts et timides, dont la vie semble se résumer à peu de choses mais dont la simple humanité s’installe peu à peu.
Lorsqu’au retour, le jour fait place à la nuit, l’espace de la plate-forme devient un huis-clos intime où l’on se s’épanche pas mais où les cœurs s’ouvrent. Pourquoi rester dans ce trou du monde qu’est Bénarès, que l’on voit tout entier par derrière le moulin ? Pourquoi ne pas partir comme le chauffeur Sam que l’on a pas vu depuis trois jours, énigme qui occupe la tête au point de croire le voir dans un bar ? Pourquoi ne pas aller voir Bénarès, la vraie, celle où l’on converge pour une place au paradis ? Peut-être parce qu’à Bénarès en île Maurice, une vie est possible.

///Article N° : 4601

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Laisser un commentaire