Fespaco 2005 : nécessité de la critique

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Arrivée en force de l’Afrique du Sud, omniprésence burkinabée, forte présence du Maghreb sont les lignes fortes du Fespaco 2005, avec à la clef un pari sur l’avenir.

Les enjeux du cinéma sud-africain
Lorsqu’était primé un film sud-africain lors de la proclamation du palmarès au Stade du 4 août de Ouagadougou ce samedi 5 mars, un grand drapeau sud-africain apparaissait dans les tribunes en même temps que des cris de joie : les Sud-Africains étaient très présents à ce Fespaco, en films et en nombre, et défendaient leur cinématographie, pourtant fort disparate, comme on supporte une équipe de foot. Il est largement compréhensible qu’une nation longtemps isolée et exclue et qui se ravive peu à peu en multipliant ses productions culturelles soit fière de la reconnaissance apportée : le palmarès de ce Fespaco 2005 y a contribué en primant cinq fois et dans les meilleures places trois longs métrages sud-africains de la sélection. Comme le confiait Idrissa Ouedraogo après la cérémonie, cela devrait aiguillonner le cinéma francophone dans le sens d’une plus grande professionnalisation, thème de cette édition. Car de l’Afrique australe arrive un cinéma fruit d’une véritable industrie du cinéma.
Si le jury a délibéré si longtemps, c’est bien que s’il admettait que ce professionnalisme sud-africain devait être reconnu, il était partagé entre des films fort différents entre eux, qui ne défendent pas la même vision et donc pas la même esthétique. L’attribution par sa majorité de l’Etalon d’or à Drum de Zola Maseko est une concession au grand public : passionnant par son éclairage historique sur une période marquante où des journalistes d’investigation tentaient avec courage de résister à la fascisation progressive du régime prônant l’apartheid, Drum suit avec un budget conséquent les codes esthétiques et narratifs d’une production hollywoodienne, jusque dans le fait que les coproducteurs américains ont imposé pour le rôle principal un acteur américain au jeu certes brillant mais stéréotypé.
La plupart des films de cinéma présentés au Fespaco sont issus de coproductions : là n’est pas le problème. Il se situe plutôt dans le degré de formatage esthétique et de contenus induit. Zola Maseko s’en explique dans notre entretien, notant bien qu’il n’est pas prêt de recommencer l’expérience !
En filigrane, derrière ce choix d’un film aussi polissé, la majorité qui s’est dégagée dans le jury voulait applaudir le fait que l’Afrique peut générer des productions n’ayant techniquement rien à envier au reste du monde. On retrouve là le vieux complexe du marginalisé et son inhérente contradiction : en se réclamant comme les autres, on souscrit au formatage généralisé au lieu d’affirmer une recherche esthétique propre qui permettrait d’imposer une image de soi originale. A quoi bon s’auto-congratuler de reproduire du cinéma américain ? N’est-ce pas s’enfermer dans la marginalisation en laissant progresser la globalisation ?
On retrouve ce même état d’esprit dans le refus du Fespaco d’organiser un jury de la critique sous l’égide de la Fipresci (fédération internationale de la presse de critique de cinéma) comme c’est le cas dans tous les grands festivals internationaux. Le prétexte invoqué d’une clause imposant à tous prix d’être dotés d’au moins deux millions de FCFA (3000 euros) alors que les prix de la critique, distinction honorifique, ne sont dotés nulle part au monde a fait écrire la Guilde africaine de réalisateurs et producteurs dans l’éditorial de son bulletin n°12 : « Un certain essentialisme foncier nous pousse à croire qu’on est différents – un cas spécial sur la terre ; qu’il faut nous traiter comme une exception. Avec toujours la même rengaine : les cinéastes africains sont pauvres, ils ont besoin de ces prix pour vivre, il faut les aider, n’est-ce pas. »
Le challenger de Drum, Zulu love letter (lettre d’amour zoulou) de Ramadan Suleman, dont nous avons déjà célébré la pertinence tant thématique qu’esthétique lors de sa présentation aux JCC de Carthage en octobre 2004, est un film autrement plus exigeant, ni rassurant ni ripolin, basé sur une réelle introspection de l’état de l’Afrique du Sud aujourd’hui, dans sa difficulté de transposer dans la sphère privée le discours officiel de réconciliation. Ramadan Suleman a ainsi reçu le prix de l’Union européenne, bien doté mais moins en vue, qu’il avait d’ailleurs déjà obtenu pour son premier long métrage Fools au même Fespaco.
Max and Mona de Teddy Mattera prend pour thème la mort qui rôde dans une Afrique du Sud rongée par le sida sur un mode drôle et déjanté : un jeune venu du village a la faculté de déclencher les pleurs dans les enterrements alors qu’on ne sait plus pleurer, ce qui remplit les poches de son oncle opportuniste mais ne résout pas ses problèmes avec les gangsters. Même s’il tend parfois à reproduire les codes du clip excité, le prix Oumarou Ganda de la première œuvre lui convenait parfaitement, par l’appel qu’il constitue à un cinéma nouveau et différent, moins consensuel et plus dérangeant.
Fort heureusement, le jury a délaissé le quatrième film sud-africain en sélection, Beat the drum (Bats le tambour) de David Hickson : sous couvert de bonne intention (la lutte contre le sida), le film est un pur produit de l’idéologie blanche sud-africaine : image décorative d’une Afrique du Sud magnifiée à laquelle on s’identifie, cinéma blanc qui filme des Noirs et notamment un enfant forcément bonne bouille et pas méchant, rédemption du mauvais Blanc qui découvre la voie du bien sans remettre en cause son pouvoir, sentimentalisme larmoyant pour faire passer le tout.
Dans le même ordre d’idée, le Fespaco permettait également de voir dans la section panorama le récent ours d’or du festival de Berlin : U-Carmen ekhayelitsha, de Marck Domford-May, l’opéra Carmen tourné en xhosa mais avec la musique de Bizet dans une township, superbe mais désolant placage anachronique d’une culture sur une autre sans que cette dernière n’ai rien à y redire.
Omniprésence burkinabée
Si la sélection officielle comportait quatre films sud-africains, elle comptait également quatre films burkinabé, les deux pays se partageant ainsi à eux deux 40 % de la sélection. Si cela se justifiait pour le cinéma sud-africain (qui avait encore quatre films dans la section panorama), c’est beaucoup moins le cas pour le cinéma du pays hôte (qui n’en avait qu’un au panorama) et pose la question de la composition uniquement nationale du comité de sélection. Une internationalisation de ce comité permettrait de limiter ce type d’excès qui décrédibilisent l’ambition panafricaine du festival.
Comment sinon expliquer la présence en compétition du premier long métrage d’Apolline Traoré, Sous la clarté de la lune¸ réalisé en quinze jours avec des bouts de ficelle, dont la piètre interprétation du Français et la faiblesse du cadre et de la mise en scène ne cessaient d’étonner les festivaliers ? Il se trouvaient pourtant des membres du jury touchés par cette histoire d’une mère à qui l’on vole son enfant et ce jury s’est finalement accordé pour lui attribuer le prix de la meilleure musique, effectivement très belle, de Sékouba Bambino.
En cette édition consacrée à la professionnalisation, on rencontrait nombre de réalisateurs furieux des erreurs de projectionnistes qui ne savent pas reconnaître le format d’un film, à commencer par l’étalon d’or lui-même (cf. notre entretien), ou bien revenaient frustrés de projections annulées sans prévenir (stade du 4 août). Mais dans l’ensemble, il faut saluer les horaires relativement suivis, un programme prêt dès l’arrivée à l’aéroport et l’ensemble de la programmation tenue, même si certains films pâtissaient du fait de n’être projetés qu’une fois. Les films de la dynamique initiative africaine-américaine PRAI du prix Paul Robeson (attribué à Beah : A black woman speaks de Lisa Gay Hamilton, USA) qui a énormément travaillé à la présence des films de la diaspora et à rendre vie à ce prix ne bénéficiaient par exemple que d’une faible exposition.
Certes, la dégradation voire la fermeture progressive des salles qui frappe Ouaga comme toutes les grandes villes africaines ne facilite pas le travail d’un festival qui ne peut être sur tous les fronts : en quelques années, le nombre de lieux de projection a drastiquement diminué, si bien que le festival a fait appel cette année au Cinéma numérique ambulant pour les compléter dans les quartiers périphériques.
Sans compter que le Fespaco tente de décentrer le festival vers la cinémathèque africaine au détriment de l’hôtel Indépendance et du bâtiment actuel du secrétariat général proche du rond-point des Nations-Unies qui devra être rendu au Conseil économique et social, lequel veut, depuis qu’il a ressuscité, récupérer son siège. Des travaux importants sont en cours pour aménager le nouveau siège, qui représentent des choix budgétaires importants qu’il est dommage de ne pouvoir attribuer à l’amélioration des projections.
Parmi les quatre films burkinabés en compétition, Tasuma, le feu de Daniel Sanou Kollo a reçu un étalon de bronze mérité mais aussi le prix du public. Bizarre initiative que ce prix parrainé par RFI, le prix du public tombant systématiquement sur un film burkinabè ou au moins de la sphère culturelle mandingue (Moi et mon Blanc, Burkina, en 2003, Battu, Mali, en 2001) : c’était prévisible, l’intérêt du public local se portant naturellement sur les films de sa propre culture, comme partout ailleurs. Au moins le jury et le public auront-ils opéré le même choix dans la sélection burkinabée.
Etonnant écho de cette omniprésence burkinabée, le jury courts métrages a attribué son poulain d’or à L’Autre mal de Tahirou Tasséré Ouedraogo, un film certes d’une belle facture mais d’un classicisme esthétique et thématique à couper au couteau. Le poulain de bronze à Safi la petite mère de Rasmane Ganemtoré va dans le même sens et seul l’excellent Be Kunko du Guinéen Cheick Fantamady Camara venait sauver le palmarès d’une sélection courts métrages pourtant riche et variée. Des mentions spéciales de rattrapage (« pour ne pas faire de jaloux » pour reprendre l’expression du président du jury Sanvi Panou lors de la cérémonie de clôture) ont été attribuées à l’Algérien Karim Bensalah (Le Secret de Fatima), au Congolais (RDC) Kibushi Ndjate Wooto (Prince Loseno, animation) et au Sénégalais As Thiam (Le Sifflet).
L’effort marocain reconnu
En dehors de l’Afrique du Sud qui émerge avec les contradictions énoncées et du Burkina qui continue de produire avec une belle vigueur un cinéma partagé entre l’ancien et le nouveau, l’étalon d’argent attribué à La Chambre noire du Marocain Hassan Benjelloun signale la vitalité du Maroc qui en soutenant efficacement la production produit de dix à douze longs métrages par an. Mais il n’est pas neutre non plus de voir un jury présidé par un proche de l’ancien roi primer un film qui revient avec courage sur les tristement célèbres années de plomb à travers la répression qu’ont subi les militants des partis politiques interdits.
De la même façon que Jawhara (fille de prison) de Saad Chraibi, La Chambre noire a les défauts d’une reconstitution historique linéaire se voulant réaliste et dénonciatrice mais a le mérite de poser à une société qui se penche sur son passé la question de sa mémoire. De plus, il est sympathique de voir Hassan Benjelloun recevoir enfin une récompense pour son cinéma engagé (Les Amis d’hier, Jugement d’une femme).
Il ne s’est pas dégagé de majorité au jury pour lui préférer Le Grand voyage d’Ismaël Ferroukhi, autre film marocain de la compétition revenu bredouille alors que beaucoup le voyaient figurer parmi les trois étalons. Le film est servi par la qualité de son interprétation, de son scénario et de sa mise en scène pour traiter du rapport au religieux dans une famille musulmane. Tandis que le monde entier est choqué par les actes d’une minorité utilisant la religion à des fins politiques et perpétrant des attentats innommables, l’assimilation est souvent trop rapide avec une communauté musulmane dont la tolérance est le maître-mot et qui se trouve confrontée aux caricatures qui la déshumanise. A cet égard, même s’il est peu linéaire et prévisible et s’il manque de ces failles qui font par exemple la qualité de Tenja (présenté au panorama), Le Grand voyage restaure avec finesse les termes d’un débat qui traverse les familles musulmanes, notamment de l’immigration, et contribue à leur meilleure compréhension.
Le Maghreb était présent dans la compétition avec un bel équilibre, deux films par pays, sur lesquels nous avons déjà écrit, et ont picoré quelques récompenses dans le palmarès, sachant que le prix du montage a été attribué par le jury à Andrée Davanture pour Le Prince, en hommage au rôle immense qu’elle a joué dans cette cinématographie, et qu’elle continue de jouer puisque trois films de la compétition ont été montés par elle (La Nuit de la vérité, Tasuma et Le Prince).
Un défi à relever
Un palmarès n’est jamais que le résultat d’un jury forcément disparate et le fruit d’un compromis. Danny Glover ayant dû quitter le festival au bout de quatre jours, le jury n’était plus que 6 au lieu de 7. A force de négociations (le président a annoncé 14 heures et 12 minutes de délibérations), il est arrivé à un choix finalement assez équilibré tournant autour d’un cinéma davantage engagé par ses sujets que par ses choix esthétiques.
La cuvée 2005 était riche mais aucun film exceptionnel ne se dégageait, si ce n’est Zulu love letter qui avait la faveur de la plupart des cinéphiles et critiques, justement par sa recherche d’une esthétique à la mesure de ses interrogations sociales.
Par contre, les tendances énoncées laissent augurer des enjeux des cinématographies africaines pour l’avenir. Entre une Afrique du Sud techniquement et même financièrement sous influence américaine par les nombreux tournages qui s’y déroulent et un Maghreb qui continue de produire des films inégaux mais en prise avec leurs réalités sociales et historiques, le Burkina apparaît comme une oasis de cinéma au milieu d’une immensité noire d’où ne sortent que quelques productions isolées.
Par contre, la bonne tenue des courts métrages, la richesse de la sélection TV-vidéo et surtout l’importance et l’attrait de la sélection « Côté Doc » montrent qu’une Afrique se prend en main pour réaliser ses propres images dans de nouvelles conditions de production, moins contraignantes et moins soumises à influences. Surtout, le documentaire s’affirme comme une voie royale pour témoigner et interroger. Reste à trouver la diffusion de ces images que les télévisions sont encore bien frileuses à reprendre et surtout à financer.
A cet égard, le seul documentaire en compétition, Le Malentendu colonial de Jean-Marie Teno, était une bonne illustration de l’importance du genre : la connexion qu’il opère entre le fait missionnaire et la colonisation, entre évangélisation et colonialisme est extrêmement porteuse de sens pour le temps présent, d’où son titre. Il est seulement dommage que Teno n’ait pas apporté davantage de rigueur et instillé davantage de cinéma à son enquête : son film se serait imposé alors que les nombreux interviews en ont éloigné beaucoup, à commencer par des membres du jury. Mais reste une belle démonstration de la pertinence et de la nécessité de l’approche.
Même dans ce dernier cas, c’est bien la question esthétique qui pose le plus problème. Les cinématographies africaines n’ont jamais développé une écriture originale, comme l’avait par exemple fait le cinéma novo ou le fait aujourd’hui le nouveau cinéma argentin. En dehors d’ovnies comme ceux du regretté Djibril Diop Mambety, les films sont en général de facture assez classique, accordant souvent moins d’importance à l’image qu’au texte, si bien que ce qui aurait pu apparaître comme des choix esthétiques sont souvent interprétés comme des défauts techniques liés à des manques budgétaires ou de professionnalisation. Un complexe du retard, ou carrément du sous-développé, gangrène la pensée du cinéma et conduit à considérer qu’un film aussi formaté que Drum est un aboutissement, voire un modèle.
C’est sans doute par ceux qui n’ont pas eu la voix jusqu’à présent, et notamment les jeunes qui se saisissent des nouvelles technologies pour produire des images dans un grand esprit d’autonomie, que se profileront les voies nouvelles. Elles ne le seront que s’ils pensent leurs images, non comme une pâle imitation des images dominantes par complexe de faire aussi bien mais comme une véritable appropriation. C’est là qu’un accompagnement critique est essentiel, qui contribue à déceler le sens des images, à mettre en valeur celles qui mobilisent l’autonomie de réflexion du spectateur et à aiguiser la vigilance envers celles qui l’immobilisent dans la stérile consommation voyeuriste ou sentimentaliste de ses propres pulsions.
Une critique africaine ?
La question posée par le panel sur la critique organisé à l’occasion des 50 ans des cinémas d’Afrique en hommage à Paulin Soumanou Vieyra était à cet égard un véritable piège : « peut-on définir une critique cinématographique africaine » ?
Un piège parce que l’application de l’adjectif « africain » porte en lui toute une gangue de prétendue authenticité, identité, objectivité. Et pourtant, n’y a-t-il pas un apport spécifique de ceux qui partagent la culture des films ?
Baba Hama, secrétaire général du Fespaco, a d’abord appelé de ses vœux une inscription de la critique africaine dans la Fipresci, la critique internationale. Mohammed Bakrim, critique à Libération (Maroc) et vice-président de la Fédération africaine de la critique cinématographique (www.africine.org), a modéré le débat, faisant le lien avec les questions de formation évoquées par ce Fespaco.
Clément Tapsoba, président de la même fédération et critique burkinabé, a insisté, alors que tout ce qui s’écrivait sur le cinéma africain l’était par des chercheurs européens, sur l’apport de Vieyra, qu’il convient de resituer dans son époque où était posée la question du rôle du cinéma pour la libération des peuples. C’est par son rôle dans le développement du continent que Vieyra définissait la finalité de ce cinéma engagé.
Pour le chercheur burkinabè Justin Ouoro, l’objectif d’une critique africaine peut être de relever les malentendus développés par une lecture occidentale des films africains : un cinéma souvent vu comme inférieur (naïf), des films classés selon des catégories stéréotypées, l’application au cinéma de l’imagerie occidentale sur l’Afrique.
Pour lui, les films africains sont caractérisés par l’hybridité, une double identité esthétique. Approche que Tahar Chikaoui, critique tunisien, viendra relativiser tant elle oppose deux identités qui seraient identifiables. Il s’élève contre le diktat de l’adjectif « africain » et appelle à rester concret tout en revendiquant la subjectivité de la critique, insistant sur son rôle d’accompagnement d’une cinématographie économiquement fragile mais aussi sur son inscription dans la critique mondiale, tant au niveau des thèmes abordés que du niveau culturel à atteindre.
Les critiques de la toute jeune Fédération africaine ont animé à Ouaga un atelier destiné aux jeunes journalistes burkinabés, qui ont produit, très motivés, un bulletin quotidien « Africiné » de bon niveau dont les contenus seront à lire sur www.africine.org
Lors du bilan en fin d’atelier, ils insistaient sur la nécessité d’un travail théorique pour argumenter et d’une continuité dans la formation. Le travail dorénavant opéré par la Fédération (thème de travail trimestriel et publication des articles et critiques sur le site Africiné) va dans le sens d’une synergie interafricaine d’où pourront émerger des éclaircissements sur les questions posées. Elles concernent, on l’a compris, non seulement le travail critique mais la connaissance et la reconnaissance de ces cinématographies dans leur ensemble.
Plus que jamais, un accompagnement médiatique et critique est nécessaire pour permettre aux images d’Afrique de s’imposer comme une représentation originale de sa place dans le monde, car c’est bien ce pari que posait ce Fespaco si riche en films et en démarches.

Les critiques des films cités et les entretiens réalisés seront publiés dans les prochains jours.

Fespaco 2005 : les palmarès
PALMARES LONGS METRAGES
Le jury a mis quatorze heures et douze minutes à délibérer, ce qui témoigne de la qualité des films sélectionnés. En effet, sur les vingt films en sélection, le jury est impressionné par la réelle diversité et le grand intérêt des œuvres présentées.
Prix du meilleur montage
Le jury tient à rendre un vibrant hommage à une grande dame du cinéma africain, Andrée Davanture, à travers le montage du film de Mohamed Zran, Tunisie : Le Prince.
Prix du meilleur décor
Le jury a trouvé remarquable le travail réalisé pour rendre l’ambiance du Sophiatown des années 50 et attribue à Eddie Kettilson le prix du meilleur décor pour Drum de Zola Maseko, Afrique du Sud.
Prix de la meilleure musique
La beauté de la musique de Sékouba Bambino ne pouvait laisser le jury indifférent qui lui attribue le prix de la meilleure musique dans Sous la clarté de la lune d’Apolline Traoré, Burkina Faso.
Prix du meilleur son
Le jury a tenu à marquer à quel point le son sert l’importance du travail de mémoire et d’analyse de El Manara de Belkacem Hadjadj, Algérie.
Prix de la meilleure image
Parce qu’il témoigne avec une image sans pathos des séquelles de la guerre et des enjeux humains de la période actuelle, et qu’il nous rend très présent un pays marqué par la tragédie, le jury tient à attribuer le prix de la meilleure image à Un héros de Zézé Gamboa, Angola.
Prix du meilleur scénario
Le jury trouve remarquable l’approfondissement d’une thématique difficile, celle de la violence à l’œuvre dans le monde, et attribue donc le prix du meilleur scénario à La Nuit de la vérité de Régina Fanta Nacro, Burkina Faso.
Prix de la meilleure interprétation masculine
Pour sa force d’expression tranquille et d’intériorité, le jury attribue le prix de la meilleure interprétation masculine à Sid Ali Kouiret dans Les Suspects de Kamal Dehane, Algérie.
Prix de la meilleure interprétation féminine
Pour l’intensité et la richesse de son interprétation, le jury attribue le prix de la meilleure interprétation féminine à Pamela Momwete Marimbe dans Zulu love letter de Ramadan Suleman, Afrique du Sud.
Prix Union européenne
Le monde entier est impressionné par la maturité du peuple sud-africain dans sa recherche de liberté, de démocratie et de paix après les épreuves terribles qu’il a connu dans les longues années d’apartheid. Un film nous semble contribuer de magnifique façon à la réflexion de tous sur la façon dont un peuple peut faire le lien entre la réconciliation proposée par les hommes politiques et celle à laquelle il doit œuvrer dans sa vie de tous les jours. Servi par son interprétation et par d’indéniables qualités de mise en scène, Lettre d’amour zoulou de Ramadan Suleman, Afrique du Sud, nous semble le mieux correspondre dans cette sélection aux critères du prix Union européenne qui prône à la fois la qualité artistique de l’œuvre et les valeurs de l’Union européenne.
Prix Oumarou Ganda
Le prix Oumarou Ganda récompense une première œuvre de long métrage d’un réalisateur dont les efforts de création sont particulièrement remarquables et dignes d’être encouragés. Dans la sélection, un film s’impose par son originalité, son humour et sa liberté de ton dans sa manière de dépeindre de façon décalée sa société. Le jury attribue donc le prix Oumarou Ganda à Max et Mona de Teddy Mattera, Afrique du Sud.
Etalon de bronze de Yennenga
Un film ne remplit-il pas son rôle quand il associe le plaisir du divertissement à la force morale de son message ? Associant humour et humanité mais aussi convoquant la douloureuse mémoire d’une génération forcée de combattre aux guerres occidentales sans en être correctement remerciée ni honorée, Tasuma, le feu de Daniel Sanou Kollo, Burkina Faso, porte véritablement une positivité et une dignité. Le jury lui attribue l’Etalon de bronze de Yennenga.
Etalon d’argent de Yennenga
Comment revenir sur le passé pour affronter l’avenir ? En plus de soutenir efficacement sa production cinématographique, le Maroc s’attèle à cette tâche difficile aujourd’hui avec des films courageux. Le jury a tenu à le saluer en attribuant l’Etalon d’argent de Yennenga à La Chambre noire de Hassan Benjelloun, Maroc.
Etalon d’or de Yennenga
Ce qui s’est passé en Afrique du Sud à Sophiatown dans les années 50 reste un modèle pour tous : malgré la dureté de la pression de l’apartheid, des hommes et des femmes, Noirs et Blancs, ont créé ensemble les conditions d’une intense effervescence artistique. Cela ne pouvait aller sans une lutte contre l’exploitation et les inégalités, au risque de leur vie. C’est ce que nous fait remarquablement partager un film à qui le jury, impressionné par ses qualités techniques et de scénario mais aussi par l’ensemble de son interprétation, attribue l’Etalon d’or de Yennenga à Drum de Zola Maseko, Afrique du Sud.
Le jury longs métrages
Souheil Ben Barka, président, cinéaste, Maroc
Calixthe Beyala, écrivain, Cameroun
France Zobda, actrice, Martinique
Paul Zoumbara, responsable au ministère de la Culture, Burkina Faso
Mansour Sora Wade, cinéaste, Sénégal
Olivier Barlet, critique de cinéma, France
(Dany Glover, acteur, USA, a dû quitter Ouagadougou le mardi soir)

PALMARES COURTS METRAGES
Poulain de bronze de Yennenga : Safi la petite mère, de Rasmane Ganemtoré, Burkina Faso
Poulain d’Argent de Yennenga : Be Kunko de Cheick Fantamady Camara, Guinée
Poulain d’Or de Yennenga : L’Autre mal de Tahirou Tasséré Ouedraogo, Burkina Faso
Mentions spéciales :
l’Algérien Karim Bensalah (Le Secret de Fatima), le Congolais (République Démocratique du Congo) Kibushi Ndjate Wooto (Prince Loseno) et le Sénégalais As Thiam (Le sifflet)
Le jury courts métrages,
Sanvi Panou, président, distributeur et cinéaste, Togo
Aï Keïta, actrice, Burkina Faso,
David-Pierre Fila, cinéaste, Congo
Isaac Mabhikwa, cinéaste, Zimbabwe
Mostéfa Djadjam, cinéaste, Algérie

PRIX PAUL ROBESON
Le jury courts métrages avait également pour charge de décerner le Prix Paul Robeson qui récompense les films de la diaspora africaine. Il est allé à Beah : A black woman speaks de Lisa Gay Hamilton, USA

PALMARES TV-VIDEO
Prix de la meilleure oeuvre de fiction : Trois hommes, un village d’Idrissa Ouedraogo et Issa Ibrahima de Traoré, Burkina Faso
Prix du meilleur sitcom : Sidagamie de Maurice Kaboré, Burkina Faso
Prix spécial du Jury : Aliénations de Malek Bensmail, Algérie
Grand prix : Conakry Kas de Manthia Diawara, Mali
Le jury TV-Vidéo
Chantal Bagilishya, présidente, CFI, Rwanda
Hichem Ben Ammar, cinéaste, Tunisie
John Akomfrah, cinéaste, Ghana
Ignace Yechenou, cinéaste, Bénin
Yacouba Traoré, journaliste, Burkina Faso

PRIX DU PUBLIC
Le Prix RFI du public est allé au film Tasuma, le feu de Daniel Kollo Sanou, Burkina Faso

PRIX SPECIAUX
– Ministère de la Santé du Burkina Faso en partenariat avec l´OMS, Prix spécial Santé : Moolaade de Sembène Ousmane (Sénégal)
– Ministère de la Promotion des Droits Humains du Bukina, Prix spécial Droits humains : Une seconde vie de Adjara Lompo (Burkina Faso)
– UEMOA :
Prix spécial UEMOA long métrage : La Nuit de la vérité, de Régina Fanta Nacro, Burkina Faso
Prix spécial UEMOA court métrage : Safi la petite mère, de Rasmane Ganemtoré, Burkina Faso
Prix spécial UEMOA TV / Vidéo professionnelle : Identité pour l’Afrique, de Dani Kouyaté, Burkina Faso
– Système des Nations Unies au Burkina Faso : Prix des Nations Unies pour la Lutte contre la Pauvreté : Tasuma, le feu de Daniel Sanou Kollo, Burkina Faso
– UNICEF : Prix UNICEF pour la promotion des Droits de l´enfant : Un amour d’enfant de Ben Diogaye Beye, Sénégal
Mention spéciale  : Safi la petite mère de Rasmane Ganemtoré, Burkina Faso
Prix UNICEF pour la promotion des Droits de la femme : Zulu love letter de Ramadan Suleman (Afrique du Sud)
Mentions spéciales  : Les suspects de Kamal Dehane (Algérie) et Safi la petite mère de Rasmane Ganemtoré (Burkina Faso)
– Organisme de Sécurité Sociale des pays francophones d’Afrique membres de l’Interafricaine de la prévention des risques professionnels, Prix Santé et Sécurité au Travail : Beat the drum de David Hickson (Afrique du Sud)
– CEDEAO : Prix de l’Intégration Africaine : Tasuma de Sanou Kollo (Burkina Faso)
– Plan Burkina Faso : Prix Droits de l’Enfant : La caméra de bois de Ntshavheni Wa Luruli (Afrique du Sud)
– SIGNIS (Association Catholique Mondiale pour la Communication) : Prix SIGNIS : Beat the drum de David Hickson (Afrique du Sud)
Mention spéciale  : Un amour d’enfant de Ben Diogaye Beye (Sénégal)
– Loterie Nationale Burkinabé (LONAB) : Prix de l’Espoir : Rencontre en ligne de Adama Rouamba (Burkina Faso)
– Prix RFO- AITV/ CFI :
1er prix  : Documentaire Irago de la télévision de la Centrafricaine
2ème prix  : documentaire sur les difficultés de conservation des manuscrits de Tombouctou de la télévision nationale du Mali
3ème prix  : documentaire sur l’importance de l’igname dans la société béninoise de l’Office de Radio télévision du Bénin
– Comité National de Lutte contre le SIDA : Prix CNLS-IST : Sidagamie de Maurice Kaboré (Burkina Faso)
– Commune de Ouagadougou : Prix de la Ville de Ouagadougou : Beat the drum de David Hickson (Afrique du Sud)
– Commune di Piossasco Ville de Turin : Prix de la ville de Turin : Safi la petite mère, de Rasmane Ganemtoré (Burkina Faso)
– Centre d’éducation artistique et technique Ecole du Wandé, Prix  » Graine de baobab – Wandé  » : Ouaga Saga de Dany Kouyaté (Burkina Faso), Meilleur acteur jeune  : Boureima dans Ouaga Saga de Dany Kouyaté
– Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO) : 9e Prix de l´INALCO : Zulu love letter de Ramadan Suleman (Afrique du Sud)
– Rur´Art :
Prix POITOU-CHARENTES long métrage : El Manara de Bel Kacem Hadjadj (Algerie)
Prix POITOU-CHARENTES court métrage : Rencontre en ligne de Adama Rouamba (Burkina Faso)
– COE : Prix COE : Prince loseno de Kibushi Ndjate Wooto (RDC)
– Ciné Bocage :
Prix d´interprétation masculine dans un second rôle tenu dans un long métrage : Ouedraogo Rasmané pour le rôle de Tomoto dans le film La Nuit de la vérité de Fanta Regina Nacro (Burkina Faso)
Prix d´interprétation féminine dans un second rôle tenu dans un long métrage : Sonia Nouacer pour le rôle de Bouchraa dans El manara de Benkacem Hadjadj (Algérie)
– Association Ecran : Prix côté Doc de la meilleure œuvre documentaire : Pourquoi de Sokhna Amar (Sénégal)
Mentions spéciales  : Ask me I am positive de Toboho Edkins (Afrique du Sud), La volonté de Rollande Ouedraogo (Burkina Faso), Oberlin Inanda de Chérif Kéïta (Mali) ///Article N° : 3766

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Les images de l'article
Drum, de Zola Maseko
Le jury longs métrages : de gauche à droite en bas l'actrice France Zobda (Martinique), le président Souheil Ben Barka (Maroc), l'écrivaine Calixthe Beyala (Cameroun), et en haut notre collaborateur Olivier Barlet, les cinéastes Paul Zoumbara (Burkina Faso) et Mansour Sora Wade (Sénégal © O.B.
L'atelier critique en plein repas © O.B.
Cheick Fantamady Camara reçoit le poulain d'argent des mains de Richard Bohringer, président d'honneur du festival © O.B.
Danny Glover regarde le Stade du 4 août à l'inauguration © O.B.
Le Stade du 4 août à l'inauguration : une bousculade a provoqué la mort de deux adolescentes et 10 blessés © O.B.
De gauche à droite : Souheil Ben Barka, président du jury longs métrages, Baba Hama, secrétaire général du Fespaco, et les deux vice-présidents de la Fédération africaine de la critique cinématographique, Jean-Marie Mollo Olinga (Cameroun) et Mohammed Bakrim (Maroc) © O.B.
Les deux présidents de jury : Souheil Ben Barka et Sanvi Panou © O.B.
Zola Maseko et son étalon d'or © O.B.





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