Ma révolution, de Ramzi Ben Sliman

Une identité en devenir

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En sortie le 3 août 2016 sur les écrans français, ce premier long métrage inégal mais attachant d’un réalisateur tunisien parisien est une belle tentative de parler de la mouvance de l’identité.

Pas bête, le jeune Marwann : ayant repéré que Sygrid, la jeune femme qu’il convoite, vibre avec les accents du monde, il se fait le chantre de la révolution tunisienne. Il faut dire que Libération l’a photographié alors qu’il s’était joint à une manif festive en plein Paris et l’a flanqué en couverture. Rien de plus séduisant pour Sygrid mais il faut tenir la durée. Le voilà à répéter ce qu’il entend des adultes et lire Le Monde Diplo pour tenir la route… De mère tunisienne, Marwann va sur ses 15 ans et Sygrid n’en a pas plus : comment des ados perçoivent les bruits du monde alors qu’ils ne réagissent qu’à la montée de leurs hormones ?
Fils d’immigrés tunisiens vivant en France, Ramzi Ben Sliman revient avec ce premier long métrage sur les contradictions et les failles de sa double appartenance : la révolution a fait renaître chez ces binationaux un sentiment complexe d’origine enfouie. Marwann ne parle pas l’arabe et tout ce que sait faire son grand-père Rida (Ahmed Benaïssa qui aurait mérité un rôle moins lourdingue) est de le brancher encore davantage sur les filles. Quand à ses parents (Lubna Azabal et Samir Guesmi), ils se prennent le chou sur la question d’aller sur place en Tunisie vivre ces moments historiques.
Aborder cette complexité à partir d’un personnage d’adolescent en plein devenir, qui découvre l’amour en même temps que ses origines et le mouvement du monde, c’est la bonne idée qui porte le film. Marwann (Samuel Vincent) est attachant dans ses élans et ses hésitations. Ma révolution réussit alors à marier humour et fragilité, tout en conservant une heureuse distance avec un discours politique qui aurait vite été trop prégnant. Il trouve ainsi une belle fraîcheur mais peine à l’habiter sur la durée, se fourvoyant dans des moments de vide, que ce soit dans les scènes d’idylle nocturne entre les deux ados dans les rues du 13ème arrondissement ou dans un voyage en Tunisie centré sur un oncle fabulateur et profiteur (Nassim Haddouche), le réalisateur laissant au rappeur Weld El 15 le soin de résumer l’état du pays. Tout cela est en phase avec l’imaginaire et la perception de Marwann mais les méandres du réel ont quand même du mal à y faire leur chemin.
Les changements de régime du film s’accommodent ainsi mal de celui qui s’orchestre en Tunisie. C’est dommage car l’enjeu était de faire coïncider la soif d’amour et de liberté de Marwann avec le moment de la révolution, que le père lui présente comme historique mais aussi romantique. L’intention en est si forte et les acteurs étant remarquables, on retiendra cependant ces moments de grâce où cette jonction s’opère et font de Ma révolution un film drôle et tendre qui brille par sa simplicité.

///Article N° : 13711

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© Jérôme Plon - Les Productions Balthazar
© Jérôme Plon - Les Productions Balthazar
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