Fiche Film
Cinéma/TV
MOYEN Métrage | 2010
Jardin de pierres de Tibhirine (Le)
Titre original : Raison d’Etat : Le Jardin de pierres de Tibhirine
Pays concerné : Algérie
Durée : 52 minutes
Genre : politique
Type : documentaire

Français

Pourquoi les moines de Tibhirine ont-ils été enlevés et par qui ont-ils été assassinés ? Le film Le Jardin de pierres de Tibhirine tente d’apporter des réponses à une affaire où la raison d’Etat a sans doute primé sur la vie des moines.

Nouvel habillage pour la soirée Histoire de France 5, La Case du siècle, présentée par Fabrice d’Almeida et entièrement consacrée au XXe siècle. Après Oradour, les voix intérieures, le documentaire de cette semaine enquête sur l’assassinat des moines de Tibhirine, à l’occasion de la sortie du film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux, coproduit par France 3 Cinéma et dont France Télévisions est partenaire, qui a reçu le Grand Prix au Festival de Cannes 2010.

C’est un petit promontoire au bout d’une vallée encaissée à quelques kilomètres de Médéa, au sud d’Alger. C’est là que se trouve le hameau de Tibhirine et l’abbaye Notre Dame de l’Atlas, fondée en 1938 par la communauté trappiste. C’est ici que, dans la nuit du 26 mars 1996, sept des neuf moines du monastère de Tibhirine furent enlevés par un groupe se réclamant du Groupe islamiste armé (GIA). Il s’agissait de frère Bruno Lemarchand, venu de l’annexe de Fès, au Maroc, frère Michel Fleury, frère Célestin Ringeard, frère Christian de Chergé, frère Paul Favre-Miville, frère Christophe Lebreton et frère Luc Dochier. Deux mois plus tard, les têtes sans corps des sept otages étaient retrouvées près de Médéa par un agriculteur. Quatorze années après ce drame, ce documentaire tente de comprendre pourquoi, au nom d’une certaine raison d’Etat, ont été abandonnés à leur sort les sept moines dont les restes sont enterrés dans le jardin de pierres du monastère de Tibhirine.


Entretien avec Gilles Cayatte, réalisateur
Que racontez-vous dans Le Jardin de pierres de Tibhirine ?
G. C. :
On raconte toute l’histoire des moines, du début jusqu’à la fin. Car on ne peut comprendre leur mort si on ne comprend pas la raison pour laquelle ils sont restés en Algérie pendant la décennie sanglante des années 90. On évoque donc les circonstances de leur enlèvement, la réaction à leur mort… Pendant quelques années, l’histoire est restée en sommeil, jusqu’à la publication d’un article de presse où un ancien sous-officier de l’armée algérienne prétendait que cette dernière était complice des assassins des moines. La famille d’une des victimes et une personne impliquée ont donc porté plainte pour enlèvement et assassinat, et une enquête judiciaire a été ouverte en 2004. Ce qui n’avait pas été possible jusqu’alors. Comme l’instruction le fait, on revient en flash-back sur les circonstances réelles de la mort des moines : les tractations de l’Etat français entre ses différents agents et les kidnappeurs, la guerre des services, les relations difficiles avec les Algériens, le fiasco de la mort des moines et, surtout, les différentes théories que met en avant la partie civile pour expliquer leur disparition. La particularité de ce film, c’est qu’on essaie de ne pas prendre parti pour l’une ou l’autre de ces théories, qui s’entrechoquent d’ailleurs, pour expliquer d’une part l’enlèvement et d’autre part l’assassinat. C’est une histoire assez compliquée, qu’on a tenté de rendre le plus compréhensible possible, mais qui touche beaucoup, car les moines eux-mêmes avaient un dévouement, une foi en la paix et la réconciliation entre les cultures qui leur a survécu finalement.

Vous vous êtes appuyé notamment sur les documents déclassifiés. Quelles autres sources avez-vous utilisées ?
G. C. :
Outre les documents audiovisuels, beaucoup de choses ont été publiées, notamment le testament du frère Christian de Chergé, un texte extraordinaire qui nous a beaucoup inspiré pour raconter l’intégralité de l’histoire de ces moines : personnelle, mais aussi politique et policière. Il y a également le livre Passion pour l’Algérie, de l’historien américain John Kiser, qui raconte de manière formidable l’histoire des moines depuis l’installation du monastère de Tibhirine, dans les années 30.

Quels sont vos principaux interlocuteurs ?
G. C. :
Nos interlocuteurs connaissaient les moines ou ont eu affaire en direct avec le dossier judiciaire. Nous avons donc rencontré Armand Veilleux, le procureur de l’ordre des Cisterciens, le frère du moine Christian de Chergé, l’avocat de la partie civile, Patrick Baudouin, et des intervenants exceptionnels comme le juge Jean-Louis Bruguière, le premier qui a mené l’enquête, et le deuxième toujours en charge, Marc Trévidic. Nous avons interrogé également Charles Millon, ancien ministre de la Défense, et Yves Bonnet, ancien directeur de la DST. Jean-Charles Marchiani, pour sa part, a refusé de témoigner. Encore aujourd’hui, ce sujet reste très sensible…

Vous faites écho au film de Xavier Beauvois. Que souhaitez-vous transmettre à travers votre documentaire ?
G. C. :
Ces moines sont restés en Algérie au nom d’une idée très forte : le dialogue entre les cultures et la solidarité des peuples. Si message il doit y avoir, c’est qu’ils menaient le meilleur des combats.

Propos recueillis par Anne-Laure Fournier (France 5)

Collection documentaire
Durée 52′
Auteurs Gilles Cayatte et Jean Chichizola
Réalisation Gilles Cayatte
Production France Télévisions/Alegria Productions
Année 2010

France 5
Diffusion : Dimanche 12 septembre 2010 à 21.30 (inédit)
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