Entre 1980 et 1985, René Vautier enregistre les témoignages de personnes ayant vécu, observé ou analysé le conflit algérien : Mohamed Moulay, Ali Rouchaï, Mohamed Loulli, Germaine Tillion, Paul Teitgen, Pierre-Vidal Naquet, le colonel Antoine Argoud, les généraux Jacques Pâris de la Bollardière et Jacques Massu, mais aussi des anonymes et des victimes de la guerre d’indépendance algérienne. Il envisage de réaliser en images, une autre histoire de la guerre, telle qu’elle n’a jamais été montrée, « une histoire audiovisuelle de la guerre d’Algérie, racontée par ceux qui, Français ou Algériens, l’ont vécue dans leur chair ».



Ce projet intitulé Des images pour écrire l’Histoire ensemble ne verra pas le jour en tant que tel. Mais, à la demande des journalistes du Canard Enchaîné accusés par Jean-Marie Le Pen pour un article dénonçant le passé de tortionnaire du député européen, le cinéaste met à la disposition de la justice, une partie de ces rushes comme pièces à conviction devant la 17e chambre correctionnelle en 1984. Il réalise alors A propos de l’autre détail, un film d’histoire et d’actualité à partir des témoignages de victimes algériennes torturées pendant la guerre. À mesure que ces témoins disparaissent, leurs récits deviennent des archives précieuses pour écrire une histoire commune franco-algérienne.A propos de… l’autre détail éclaire le parcours militant de René Vautier dans ses démêlés avec la justice française. Le 22 juin 1988, le cinéaste est jugé pour avoir dit que Jean-Marie Le Pen était « un présidentiable aux mains sanglantes ». Il demande à ce que cet homme politique, alors député européen, soit traduit devant un tribunal à l’instar de Kurt Waldheim en Autriche.



Ce documentaire, à la fois d’histoire et d’actualité, convoque Pierre Vidal-Naquet, Germaine Tillion, le colonel Antoine Argoud, Rouchtaï Cherki Ali. C’est l’occasion pour le cinéaste d’évoquer des sujets sensibles : conflit algérien, torture, relations de la France à son passé troublé et la liberté d’expression. Mais ce film fait l’objet d’un montage, une sorte de synthèse car plusieurs kilomètres de pellicules ont été saccagés en 1984. Or, René Vautier avait filmé entre 1980 et 1985 plusieurs heures pour un projet qui devait s’intituler Des images pour écrire l’histoire. Pour lui, L’ardeur mise à détruire ces témoignages conforte l’idée qu’il est nécessaire de les diffuser. On assiste là à une réflexion sur les conséquences des lois d’amnistie sur l’écriture de l’Histoire, initiée très tôt par Henri Alleg et Pierre Vidal-Naquet. On sait aujourd’hui que la reconnaissance par l’Assemblée nationale française de l’existence d’une « guerre » en Algérie date de 1999, soit 37 ans après la fin de la guerre ! Il est aussi pertinent d’inscrire le film A propos de l’autre détail dans l’histoire de l’élaboration de lois d’amnistie commencée dès les accords d’Evian et concrétisée par deux décrets signés le 22 mars 1962 et cinq ordonnances publiées au mois d’avril.



Dans cette même perspective, l’amnistie pénale des militants de l’Algérie française et de l’Organisation de l'armée secrète (AOS) est réalisée par trois lois promulguées le 23 décembre 1964, le 17 juin 1966 et le 31 juillet 1968. Cette histoire montre, en effet, que tout débat sur le conflit (auquel participe ici René Vautier) est muselé par des sanctions pénales.





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https://www.imdb.com/title/tt11343678

Between 1980 and 1985, René Vautier recorded the testimonies of people who had experienced, observed or analyzed the Algerian conflict: Mohamed Moulay, Ali Rouchaï, Mohamed Loulli, Germaine Tillion, Paul Teitgen, Pierre-Vidal Naquet, Colonel Antoine Argoud, Generals Jacques Pâris de la Bollardière and Jacques Massu, but also anonymous people and victims of the Algerian War of Independence. He planned to create in images, another history of the war, such as it had never been shown, "an audiovisual history of the Algerian War, told by those who, French or Algerian, experienced it in their flesh".



This project entitled Images to write History together will not see the light of day as such. But, at the request of the journalists from Canard Enchaîné accused by Jean-Marie Le Pen for an article denouncing the past torturer of the European deputy, the filmmaker made available to the justice system, part of these rushes as evidence before the 17th correctional chamber in 1984. He then made A propos de l’autre détail, a historical and current affairs film based on the testimonies of Algerian victims tortured during the war. As these witnesses disappear, their stories become valuable archives for writing a common Franco-Algerian history. A propos de… l’autre détail sheds light on the activist career of René Vautier in his troubles with the French justice system. On June 22, 1988, the filmmaker was tried for having said that Jean-Marie Le Pen was “a presidential candidate with bloody hands”. He asked that this politician, then a European deputy, be brought before a court like Kurt Waldheim in Austria. This documentary, both historical and current, calls upon Pierre Vidal-Naquet, Germaine Tillion, Colonel Antoine Argoud, Rouchtaï Cherki Ali. It is an opportunity for the filmmaker to discuss sensitive subjects: the Algerian conflict, torture, France's relationship with its troubled past and freedom of expression. But this film is the subject of an edit, a sort of synthesis because several kilometers of film were ransacked in 1984. However, René Vautier had filmed several hours between 1980 and 1985 for a project that was to be called Images to Write History. For him, the ardor put into destroying these testimonies reinforces the idea that it is necessary to disseminate them. We are witnessing here a reflection on the consequences of amnesty laws on the writing of History, initiated very early by Henri Alleg and Pierre Vidal-Naquet. We now know that the French National Assembly recognized the existence of a "war" in Algeria in 1999, 37 years after the end of the war! It is also relevant to place the film About the Other Detail in the history of the development of amnesty laws that began with the Evian Accords and was implemented by two decrees signed on March 22, 1962 and five ordinances published in April.



In this same perspective, the criminal amnesty of the activists of French Algeria and the Organization of the Secret Army (AOS) was implemented by three laws promulgated on December 23, 1964, June 17, 1966, and July 31, 1968. This history shows, in fact, that any debate on the conflict (in which René Vautier participates here) is muzzled by criminal sanctions.





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