Fiche Livre
Histoire/société
RéCIT, TéMOIGNAGE | Novembre 2005
Ta mémoire, petit monde
Alain Foix
Collection : Haute enfance
Edition : Gallimard
Pays d’édition : France
Parution : 21 Novembre 2005

Français

« Le petit monde », ti moun en créole, autrement dit l’enfant…
« Prenons un petit monde au hasard dans la rue. Il sort tout juste de l’école et fixe le caniveau. Dans le ruisseau son bateau de papier. Au bout de la rue, un géant blanc posé sur l’eau. Le Colombie, comme c’est écrit dessus… C’est la terre qu’on déchire… »
Lino, le petit monde noir avec ses beaux cheveux d’indien, a huit ans quand il quitte son île avec Lucia sa mère pour la métropole. Dix jours de traversée qui vont tout bouleverser, et marquer douloureusement la déchirure avec Aurèle, l’ouvrier de la mer qu’il aime comme un père, les melons de maman Telle, les accents du pays et les averses qui réveillent les parfums de la terre.
Tôt levée, tard rentrée de l’hôpital où elle fait des ménages, Lucia, mère courage à laquelle Lino apprendra l’orthographe et la grammaire, parvient à recréer un écosystème créole au rez-de-chaussée du dernier immeuble de Bondy Nord. Quelques arbres ici et là, perdus dans une forêt de béton et deux terrains vagues où les enfants du bac à sable
– renommé chacun Alger, Bastia, Oran, Madagascar et… Guadeloupe – s’inventent les contours d’une France rêvée.
L’hôpital de Berck-plage où Lino est envoyé plusieurs mois sera une autre déchirure, mais il en reviendra avec un nouveau rapport au monde. Avec le temps qui passe, il y a d’absolues nouveautés : les filles, et aussi les vélos, et parfois les motos. Les motos prenaient les filles et les vélos, le bec dans l’eau. Alors, nous rêvions des motos. C’est sur un écran de télévision que Lino découvre la psychanalyse : une grande surface bleue agitée d’électrons, reflétant mon visage et derrière ce visage, le visage de l’humain : Je voulais savoir l’homme. Avant la lecture de Tristes Tropiques de Lévi-Strauss, dernière émancipation, et la mort d’Aurèle comme la fin de l’enfance.
Ces fragments comme des vagues, des marées d’écriture convoquent l’enfant, ce petit monde dans le monde, ce bateau de Thésée sans cesse réparé de pièces rapportées. Une poétique de la banlieue, en même temps qu’un regard sur l’enfant-mémoire, moteur du présent.
Partager :