Murmures

Pas de visa pour les Haïtiens : des organisations haïtiennes et Françaises condamnent fermement cette situation
septembre 2010 | Faits de société | Interculturel/Migrations | Haïti

Français

L’administration française ignore l’état du pays et se moque de la souveraineté des autorités
De nombreuses associations * s’adressent aux autorités françaises et haïtiennes.

Une lettre co-signée par de nombreuses organisations françaises et haïtiennes de défense des droits humains, de défense des migrants et de développement vise à alerter les autorités des deux pays afin que le citoyen haïtien ne reste pas la double victime qu’il est : d’une administration publique haïtienne défaillante et d’une administration française zélée jusqu’à l’absurde.

Le tremblement de terre qu’a vécu Haïti le 12 janvier 2010 a été qualifié par le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), comme « la catastrophe la pire que les Nations-Unies aient dû vivre jusqu’ici« . Le bilan officiel fait état de 300 000 morts et autant de blessés. Près de 250 000 bâtiments ont été détruits ou endommagés dont le ministère de la justice et de la sécurité publique et quatre bureaux d’état civil ; de nombreuses personnes ont perdu leur documentation sous les décombres et n’ont aucun moyen d’établir le décès de leurs proches disparus lors du séisme.

Le séisme a entraîné une multiplication par cinq des demandes de visas pour la France, ce qui illustre clairement la nécessité vitale pour certains Haïtiens de trouver ailleurs des conditions de vie décentes.
Pourtant, obtenir un visa est kafkaïen et s’avère le plus souvent impossible. Entre les limites anciennes et aggravées par le séisme du système d’état civil haïtien et les suspicions exagérées de l’ambassade de France, c’est le citoyen haïtien fragilisé qui est rendu responsable d’une situation dont il est la première victime.
C’est pourquoi nous condamnons les exigences excessives de l’ambassade de France en Haïti en matière d’état civil, le faible cas qu’elle fait des institutions haïtiennes et les pratiques parfois discriminatoires, voire illégales, qu’elle met en œuvre, et notamment :

> l’exigence cumulée d’un acte de naissance établi dans les deux années suivant la naissance et d’un extrait d’archives établi après le 1er février 2008
> a non-reconnaissance de la valeur juridique des jugements supplétifs de déclaration tardive de naissance prononcés par le juge haïtien ;
> le soupçon de faux qui pèse sur tous les actes d’état civil, même ceux délivrés par les archives nationales d’Haïti et légalisés par les consulats d’Haïti en France ;
> l’exigence pour les demandes de visa de court séjour en faveur de mineurs d' »un certificat de baptême ou de présentation au temple », en plus de l’acte de naissance.

Nous condamnons également ces mêmes pratiques opposées par de nombreuses préfectures, notamment dans les départements d’Amérique, aux démarches administratives des exilés haïtiens.
Nos organisations exigent des autorités françaises une remise en forme des listes de documents d’état civil haïtiens requis pour qu’elles soient conformes à l’exigence d’égalité de traitement des personnes. Elles demandent que cessent les abus de pouvoir des services consulaires et préfectoraux qui s’exercent au mépris de la souveraineté des autorités haïtiennes (officiers d’état civil, magistrats, archives nationales et consulats d’Haïti en France) et sont notoirement disproportionnées au regard de la situation du pays.
Nos organisations s’adressent aux autorités haïtiennes pour qu’elles engagent une vraie réforme du système de l’état civil afin qu’il soit gratuit, accessible à tous et fiable, notamment en luttant contre les erreurs matérielles dans l’orthographe des noms et prénoms.
Sans cette double démarche, le citoyen haïtien restera la double victime d’une administration publique haïtienne défaillante et d’une administration française zélée jusqu’à l’absurde.


* Pour connaitre l’ensemble de ses associations écrire au Collectif Haïti de France
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