Pépites médiatiques

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Les festivals Génération Court, Cinébanlieue et Les pépites du cinéma valorisent chaque automne de jeunes talents urbains. Vous ne les connaissez pas ? Normal ! Les médias traditionnels en parlent peu.

Ils sont nés après les émeutes de 2005 tel un détonateur culturel. Portés par des valeurs d’éducation populaire (Génération Court /Aubervilliers), de transversalité du cinéma (Cinébanlieue / Saint-Denis), de métissage et de mixité (Les Pépites du Cinéma / La Courneuve), ces festivals promeuvent des cinéastes méconnus. Et manquent de visibilité malgré le bouche-à-oreille qui mobilise le public : « C’est faire venir la presse qui pose problème », commente Camille Wintrebert de Génération Court. Génération Court, Cinébanlieue et Les pépites du cinéma ont lieu chaque année. Certes, ces trois-là se télescopent par manque de concertation mais tous ont un intérêt certain : proposer une alternative cinématographique. Leur travail de terrain défriche ce que les programmateurs évitent généralement. Sauf trois salles de banlieue qui les accueillent fidèlement : l’Étoile de La Courneuve, l’Écran de Saint- Denis et le Studio d’Aubervilliers. Problème : faute d’attaché de presse professionnel, la mobilisation médiatique est locale, rarement nationale. Même si Génération Court est parrainé par le réalisateur et producteur Luc Besson (qui vient d’ouvrir sa Cité du Cinéma) ; Cinébanlieue par des professionnels (de Bertrand Tavernier à Tony Gatlif) et Les Pépites par leurs réalisateurs, les grands médias se déplacent peu. Camille Wintrebert avance un « réseau » manquant, Aïcha Bélaïdi des Pépites du cinéma un « pas d’argent = pas de temps », tandis qu’Aurélie Cardin de Cinébanlieue déplore des « castes » fermées et « des régies publicitaires avec des caisses enregistreuses dans la tête ».
Manque de moyens ?
De ce fait, les médias (plutôt Actu et Société) se déplacent davantage pour « les célébrités » et « ce qui marche », que pour découvrir « le cinéma de demain ». Didier Péron, journaliste cinéma à Libération, se défend : « On fait comme si Libération était une puissance invitante qui daignerait de temps à autre regarder vers le bas, c’est faux ! Nous couvrons plus de sortie en salle car nous sommes peu nombreux : deux journalistes et un pigiste ». Témoignant que le plan social de 2005 lui a fait perdre « une dizaine de contributeurs Cinéma », Didier Péron reconnaît que Libé va « moins à la source » mais que cela demeure « un problème fondamental de moyens » : « Il faudrait des acteurs culturels aux ressources stabilisées pour ne plus être tributaires d’un papier dans Libé ».

Pourtant, quand des réalisateurs inconnus émergent au Festival de Cannes (comme Djinn Carrénard ou Rachid Djaïdani, découverts par Les Pépites), c’est toute la presse qui s’en empare. Culte du réalisateur plutôt que de ceux qui croient en lui avant l’heure ? Pour Aïcha Bélaïdi, « Il faut que ces films aillent dans les festivals où se déplacent les journalistes pour qu’on en parle ». Un constat auquel Aurélie Cardin ajoute en souriant : « ce sont eux qui sont perdants ».

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