« Tassu Cafe », extrait du nouvel album de Sahad Sarr

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Sorti le 4 février au Sénégal et en Afrique sur les plateformes digitales, l’album Luuma de Sahad Sarr sera présenté, sur scène, à Dakar, le 12 février prochain. Après Jiw en 2017 avec les musiciens de The Nataal Patchwork, et le titre Bitakola sorti en janvier 2020,  Sahad Sarr, chanteur et guitariste, nous entraîne dans les dédales du marché ambulant pour parler des enjeux sociaux et politiques contemporains. 

Que signifie “Tassu café” ? 

Le morceau “Tassu café” s’inclut dans l’album Luuma, qui veut dire “marché itinérant”. Dans tous les marchés itinérants, il y a des ventes de café. “Tassu café”, “une tasse de café” parle du café touba. Un café particulier, symbolique qui vient de l’histoire du Cheikh Ahmadou Bamba qui a été exilé au Gabon au 19e siècle. Ce morceau plonge dans l’imaginaire du café touba aujourd’hui, un café arabica que les Sénégalais se sont réappropriés. Dans ce morceau, je dis “éveille ta voix, la voix qui éveille”. Et j’interpelle la population sur la place de ce café, de ce marché local dans le monde. Au Sénégal, aujourd’hui, beaucoup de jeunes qui n’ont pas de travail s’investissent dans la vente de ce café touba et ça marche. C’est un morceau qui, quelque part, raconte l’identité sénégalaise, au passé et au présent, à travers le café touba. C’est un café qui rassemble toute la population, que tu sois musulman, chrétien ou autres. C’est d’abord un produit local du Sénégal. 

Le clip de “Tassu café” mêle illustration et balade dans un marché ambulant…

A l’intérieur de la vidéo, nous avons essayé de mettre en place les imaginaires sénégalais. Au début, nous avons recréé un espace où tout le monde se retrouve autour du café, comme c’est le cas vers 17h au pays. Vieillards, enfants, jeunes, après le boulot, chacun vient prendre sa tasse de café… C’est l’occasion de partager les dernières nouvelles,  un moment de communion. Le café joue alors un rôle de régulateur de la société. La vidéo reproduit un imaginaire de marché itinérant, ce marché organisé où tout le monde se rassemble malgré ses différences et où chacun joue un rôle singulier et important. C’est ce Sénégal de l’intérieur que je voulais reproduire et non pas un Sénégal de surface. Nous avons aussi convoqué un imaginaire des années 1960’s, 1970’s avec des arrangements inspirés des orchestres de l’époque comme Super Etoile (Youssou Ndour) et de Super Diamono (Omar Pene) pour faire un mix de folk-acoustique- mbalax.

Comment avez-vous créé ce morceau ? 

C’était en 2019, à Bordeaux. En fin de journée, il faisait un peu froid, une amie m’a apporté un café touba qui venait du Sénégal. Le fait de sentir l’odeur de ce café m’a ramené directement chez moi, dans mon univers, au Sénégal. On tournait, à l’époque, en Europe, depuis plusieurs mois avec The Nataal Patchwork. D’un coup ce café m’a fait voyager. J’ai pris la guitare et j’ai commencé à chanter “Tassu café, ken duko cafe, touba texe”, en faisant appel à la voix, à la spiritualité mouride, et à tous les imaginaires du Sénégal. Une fois au studio j’ai invité des musiciens du Super Étoile, comme Ablaye Lô et Oumar Sô qui jouaient pour Omar Pene (Super Diamono). Côté musiciens de The Nataal Patchwork, nous avons Christian Obam à la basse, Ablaye lo à la batterie, Joonhoo au piano, Xadim Mbaye pour les percussions, Omar sow à la guitare solo, Stachys Nzonlani au trombone et Milda à la trompette.

“Tassu café” est extrait de l’album Luuma sorti le 4 février. Que signifie Luuma ? 

Luuma signifie “le marché itinérant”, ce marché hebdomadaire que l’on retrouve partout au Sénégal. Un marché informel qui propose une anarchie organisée où le tout forme une unité. C’est un récit entre le monde urbain et le monde rural, c’est une manière de voir autrement la mondialisation. Dans cet album, j’affirme notre place en tant qu’Africain pour regarder autrement la mondialisation. En général quand les gens viennent au Sénégal ils parlent d’”anarchie” et d’”informel” sans voir toute la structure sociale mise en place par les Africains qui s’identifient à cela. Avec la colonisation et la post colonisation, certains imaginaires ont été absorbés ici aussi pour qu’on regarde la mondialisation d’une seule manière qui n’est pas la nôtre. A travers “Luuma” je me questionne sur tout ça.

Pouvez-vous nous parler du label panafricain que vous avez lancé il y a quelques mois ? 

Le label 432 existe avec un studio accolé qui se trouve à Ouakam. On a commencé à enregistrer des albums avec des artistes comme Cheikh Lo, Wally Seck… Sous ce label nous organisons des shows, des concerts, des “432 live sessions” qui  nous permettent de montrer plusieurs facettes de la musique aujourd’hui au Sénégal. On prépare actuellement plusieurs EP, albums,  ici au studio, avec plusieurs artistes de cette scène du pays.

 

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