Fiche Film
Cinéma/TV
MOYEN Métrage | 2011
Une histoire de l’Outre-mer
Pays concerné : France
Durée : 52 minutes
Genre : politique
Type : série documentaire
Français
Durée : 3 x 52 min.
Raconter en images l’histoire de l’Outre-mer, c’est entreprendre la traversée d’une constellation d’univers singuliers situés aux confins de la France hexagonale mais pourtant intimement liés à elle depuis l’époque des conquêtes coloniales : quatorze territoires dispersés sur quatre océans, présentant une multitude de caractères culturels, géographiques et statutaires profondément distincts. Un bout du monde éclaté, intégré et rattaché à la France contre toute logique géographique, avec pour seul lien de continuité l’immensité des espaces maritimes…
Ce double paradoxe, la pluralité de différences et l’attachement à la France dans l’éloignement, a produit une histoire atypique dont le déroulement s’apparente à un feuilleton inachevé, nourri de rebondissements, de tensions et d’explosions cycliques.
Une histoire aussi ancienne que méconnue, brouillée par les clichés (l’exotisme des tropiques a la dent dure), enracinée dans la période sombre de la colonisation et de la traite négrière, pétrie de mémoire douloureuse et d’autant d’espérance, de domination et d’émancipation, d’orgueil et de vanité, mais aussi de rires et de plaisirs.
Une histoire relatée en trois films.
Une histoire enfin considérée dans son ensemble…
Auteure-réalisatrice : Christiane Succab-Goldman
Production : FTV pôle France 5/Jem Productions
1/3 : L’héritage colonial
La France d’Outre-mer naît au premier âge des conquêtes coloniales. Dès le XVIIe siècle, les convoitises soulevées par la découverte récente du Nouveau Monde et le formidable développement de la marine marquent l’ambition de la France de s’étendre au-delà des mers.
Elle y trouve le sucre, le café, les épices, le bois précieux et organise une traite négrière pour les exploiter.
La Révolution de 1789 bouleverse le cours de l’histoire coloniale française. L’esclavage est aboli pendant dix ans, mais en 1802, Bonaparte met fin à cet acquis en le rétablissant. Il faut attendre 1848, pour voir supprimer définitivement le système esclavagiste dans les colonies.
Cet événement majeur crée dans « les îles à sucre » des catégories sociales nouvelles, celles des petits paysans et des ouvriers, qui se forment en même temps qu’en Europe et s’organisent en syndicats. Pour se maintenir, l’industrie sucrière crée une nouvelle main-d’œuvre avec des « engagés » puisés dans les comptoirs français d’Inde.
Dès la fin du XVIIIè siècle, l’industrialisation en Europe pousse les grands états à la recherche de matières premières, de débouchés et de marchés. Alors s’amorce une deuxième phase de colonisation. La France suit la route des épices dans l’océan indien. Depuis l’archipel des Comores au large de Madagascar, elle fait route vers le Pacifique et prend possession de Wallis et Futuna, de l’Archipel polynésien où vivent des sociétés séculaires épargnées par le processus esclavagiste des XVIe et XVIIe siècles. Ces îles possèdent leurs langues, leurs systèmes religieux, leurs clans et leurs royaumes. Mais le christianisme s’impose dans cette zone. Plus tard, en Nouvelle-Calédonie, la conquête sera d’une extrême violence.
Lorsque la guerre de 1914-1918 éclate, l’Outre-mer constitue pour la France un formidable réservoir d’hommes à enrôler. C’est cette première guerre qui donnera aux colonisés une conscience internationaliste. Dans les années 30, une génération de jeunes colonisés vient poursuivre des études à Paris et découvre d’autres peuples dominés dans une Europe où montent le nazisme et le fascisme. C’est dans ce contexte que naît le mouvement de la « Négritude » porté par Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor Léon-Gontran Damas.
Quand en 1931 s’ouvre à Paris l’Exposition internationale au Bois de Vincennes, les parisiens découvrent alors que l’Histoire n’est pas seulement occidentale.
2/3 : Les turbulences de la décolonisation
Lorsqu’éclate la Seconde Guerre Mondiale, l’empire colonial français est à son apogée. À la Libération, la mobilisation anticoloniale déferle sur tous les continents. Le souffle de l’émancipation ébranle les vieilles certitudes. Les peuples d’outre-mer aspirent à l’égalité et à l’indépendance.
Dans les « vieilles colonies », en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, c’est l’exigence d’égalité qui domine au travers de la revendication d’assimilation pleine et entière à la métropole. En 1946, elles deviennent Départements d’Outre-mer. Mais très vite, la déception l’emporte car les lois de la République tardent à être appliquées.
Dans les îles du Pacifique au contraire, ce n’est pas l’intégration à la société française qui est revendiquée, mais la préservation des cultures autochtones. L’archipel de Wallis et Futuna fait exception à cette logique en devenant territoire d’outre-mer à la demande de son roi.
Le retour du Général de Gaulle au pouvoir en 1958 dans le contexte de la guerre d’Algérie, change la donne : la République devient plus que jamais « une et indivisible ». On assiste alors à une reprise en main de l’Outre-mer qui mêle développement économique et répression de toute revendication séparatiste.
En Polynésie, Pouvanaa’a Opaa qui prône l’indépendance de son pays, est annihilé politiquement et exilé en France. En Nouvelle-Calédonie où l’Assemblée territoriale est dominée par un parti autonomiste, le pouvoir de l’Etat est renforcé, l’exploitation du nickel accaparée. Aux Antilles, les mouvements indépendantistes et identitaires sont réprimés dans le sang. La Réunion, où le parti communiste est très puissant, n’échappe pas non plus à la répression gaullienne.
Dans le contexte de la guerre froide, de grands projets doivent attester l’indépendance de la France : un Centre d’Expérimentation nucléaire est implanté en Polynésie, puis un Centre d’Expérimentation Spatiale en Guyane. On y dépêche la Légion Etrangère pour assurer l’ordre. Afin de calmer l’effervescence indépendantiste, le pouvoir transforme les « vieilles colonies » en immenses chantiers de constructions. Elles deviennent les vitrines de la France. Simultanément, le fort besoin de paix sociale en outre-mer et de main-d’œuvre en métropole, déclenche l’organisation méthodique des flux migratoires de populations. Le gouvernement crée pour la circonstance une structure spéciale : le BUMIDOM, le bureau de migrations des populations d’outre-mer.
Dans les années 80 les mouvements de revendications se radicalisent en Nouvelle-Calédonie. Pendant la campagne électorale opposant François Mitterrand à Jacques Chirac, les conflits s’exacerbent entre Kanaks et Caldoches dans une violence qui frôle la guerre civile. L’intervention militaire de la France aboutit à la dramatique tuerie de la grotte de Watetö dans l’île d’Ouvéa.
Mais le dialogue se renoue grâce aux accords de Matignon-Oudinot pour ouvrir une ère nouvelle de concertations entre Kanaks, Caldoches et représentants de l’Etat.
3/3 : L’ère de la mondialisation
En Outre-mer, l’entrée dans la modernité ébranle les modèles économiques traditionnels. Les crises sociales provoquées par l’effondrement de l’économie sucrière et l’explosion démographique sont partiellement surmontées par la migration vers la métropole.
Mais peu à peu, l’exil sans retour, la découverte d’une forme ténue de racisme dans l’hexagone à l’encontre des populations d’outre-mer malgré l’égalité de droits, exacerbe leur mal être identitaire. La mémoire de l’esclavage, toujours présente, fonde de nouvelles revendications. En 1999, une loi rédigée par Christiane Taubira, députée de la Guyane, consacre la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité.
Les années 80 voient poindre des changements politiques majeurs.
En Guadeloupe et en Martinique, elles s’ouvrent sur une vague de violence conduite par des groupes indépendantistes. Toutefois, la politique de décentralisation porte ses fruits en outre-mer : on y conçoit et adapte des statuts politiques taillés sur mesure. La diversité institutionnelle devient la règle.
Soudain, en Nouvelle-Calédonie, le 4 mai 1989, en pleine cérémonie de la levée du deuil des 19 tués dans la grotte d’Ouvéa, le leader Jean-Marie Tjibaou et son lieutenant Yeiwéné Yeiwéné sont assassinés par un militant opposé aux accords de Matignon. Le mouvement Kanak est décapité. Mais en Europe, la chute du Mur de Berlin ouvre un nouveau cycle de l’histoire. Dix ans plus tard, la signature des accords de Nouméa formalisera un statut particulier pour la Nouvelle-Calédonie.
La mondialisation des échanges s’installe au cœur du débat politique, social et culturel. Dans ce bouleversement global, les sociétés insulaires exposent à la fois leur fragilité et leurs atouts.
En Polynésie la politique autoritaire autrefois conduite par Gaston Flosse et la manne financière qui accompagne la création du Centre d’essais nucléaires en activité jusqu’en 1996, continuent d’alimenter les inégalités sociales et les polémiques autour des conséquences médicales de la radioactivité sur les populations affectées.
En Atlantique, à Saint-Pierre et Miquelon, les conflits irrésolus avec le Canada pour un partage équitable des eaux territoriales conduit à un effondrement économique dont l’archipel se relève mal.
La question toujours renouvelée du statut politique de l’Outre-mer revient sur le tapis. En 1999, les Présidents de Région de Guadeloupe, Martinique, Guyane coordonnent leur action en vue d’accroître « la voie de la responsabilité qu’il nous appartient aujourd’hui d’emprunter dans un cadre plus respectueux de notre identité ». Pourtant, malgré un point de vue concordant entre l’Etat et les exécutifs régionaux, les populations rejetteront par référendum en 2003 les dispositions d’un nouveau statut prévoyant d’accorder plus d’autonomie aux régions d’Outre-mer.
En 2008, l’effondrement des marchés financiers mondiaux provoque l’envol du coût des matières premières. En Guyane, puis en Guadeloupe, l’augmentation du prix de l’essence dépasse toutes les prévisions : une grève paralyse la Guadeloupe et se propage au point de devenir le plus grand mouvement social connu dans l’outre-mer français. Afin de dénouer la crise, le Président Sarkozy remet en chantier la question de l’avenir statutaire des départements et leur évolution future vers plus d’autonomie. Mais en janvier 2010 une majorité des suffrages répond « non » au changement de statut, tandis que Mayotte, la seule île des Comores restée française, accède définitivement au statut de département en mars 2011, devenant ainsi le 101ème de la République française.
En quelques années, la lame de fond de la mondialisation a finalement renforcé les liens avec la France mais en leur donnant un sens différent. L’outre-mer ne veut plus être le sujet mais l’acteur d’une histoire commune. En filigrane, c’est aussi une autre vision de soi qui se profile : être enfin pleinement du monde et non plus du bout du monde.
Intervenants
– Jean Crusol, spécialiste des économies insulaires, Martinique
– Jean-Pierre Sainton, historien, Guadeloupe
– Daniel Maximin, écrivain, Guadeloupe
– Jean-Marc Regnault, historien, Polynésie française (Tahiti)
– Myriam Alamkan, historienne maritime, Guadeloupe
– Chantal Spitz, Polynésie française, Tahiti
– Karine Claireaux, maire de Saint-Pierre, Saint-Pierre et Miquelon
– Lydie Ho-Fong-Choy Choucoutou, historienne, Guyane
– Jean Moomou, historien, Guyane
– Louis Théodore, membre fondateur du GONG, Guadeloupe
– Elie Domota, syndicaliste, porte parole du LPK, Guadeloupe
– Jean Chomereau-Lamotte, journaliste, Guadeloupe (décédé)
– Ary Encelade, PDG du Groupe Encelade, Guadeloupe
– Maryse Condé, écrivain, Guadeloupe
– Claude Valentin-Marie, sociologue, conseiller pour l’outre-mer à l’INED, Martinique
– Paul Vergès, ancien président de la Région La Réunion
– Carpanin Marimoutou, Université de La Réunion
– Françoise Vergès, politologue, La Réunion
– René Achéen, historien, Martinique
– Youssouf Moussa, professeur de Mathématiques, Mayotte
– Louis-José Barbançon, historien, Nouvelle-Calédonie
– Philippe Gomes, président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie
– Jacques Lafleur, fondateur du RPCR, signataire des accords de Matignon, Nouvelle-Calédonie (décédé)
– Richard Tuheiava, sénateur de Polynésie
– Daniel Frimigacci, archéologue, Wallis
L’Outre-mer aujourd’hui
L’Outre-mer, plus communément appelé « Dom-Tom » (Départements et Territoires d’outre-mer), désigne généralement l’ensemble des terres sous souveraineté française, géographiquement distantes de la métropole et situées « au-delà des mers ».
Ces terres sont principalement constituées de cinq Départements (Dom) qui disposent également du statut de Région d’outre-mer (Rom) : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion et Mayotte. Ils regroupent 2 040 287 habitants sur une surface de 92 221 km2 (soit plus d’un sixième du territoire métropolitain).
Ces Dom-Rom font partie de l’Union européenne et sont également désignés dans ce cadre par le terme de « Régions ultrapériphériques ».
Par ailleurs, il existe également des Collectivités d’outre-mer (Com) régies par des statuts particuliers.
Ces Com sont au nombre de cinq : la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Leur population totale est de 297 382 habitants pour une superficie d’ensemble de 4 683 km2 (soit moins d’un centième de la surface de l’Hexagone).
La Nouvelle-Calédonie est un territoire qui bénéficie d’un statut spécifique. Cette collectivité, sans qualification particulière, est dite « sui generis ». Tous les textes gouvernementaux la désignent maintenant sous le seul terme de Nouvelle-Calédonie. Sa population est de 232 000 habitants et sa superficie de 19 058 km2 (environ 1/30 de la superficie de l’Hexagone).
En dernier lieu, il faut noter six territoires dits « inhabités », les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), qui sont :
– dans le Pacifique Nord : Clipperton, à l’ouest du Mexique. Cet atoll est placé sous la juridiction du haut-commissaire de la République en Polynésie française ;
– dans l’océan Indien : les îles Crozet, les îles Eparses, les îles Kerguelen, les îles Saint-Paul et l’île Amsterdam ;
– sur le continent Antarctique : la terre Adélie.
Production : JEM Productions,
En coproduction avec Euromédia France, Canal + Overseas Productions,
En association avec France Télévisions
Avec la participation du Centre national de la cinématographie et de l’image animée, du Ministère chargé de l’Outre-mer, de l’Acsé (Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances), du Fonds Images de la Diversité, des Régions Île-de-France, Martinique et La Réunion, de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, du Département Guyane, du Territoire de Saint-Pierre et Miquelon.
une série documentaire 3×52 minutes
réalisée par
Christiane Succab-Goldman
produite par
Jacques Kirsner et Anne-Marie Marsaguet (Jem Productions, Paris)
,
avec le soutien notamment de France télévisions et du ministère chargé de l’Outre-mer.
TV
France 5 (France)
Diffusion : les 8, 15 et 22 mai 2011 à 20h30.
Une projection est organisée à France Télévisions
le mercredi 4 mai 2010 à 20h30.
Raconter en images l’histoire de l’Outre-mer, c’est entreprendre la traversée d’une constellation d’univers singuliers situés aux confins de la France hexagonale mais pourtant intimement liés à elle depuis l’époque des conquêtes coloniales : quatorze territoires dispersés sur quatre océans, présentant une multitude de caractères culturels, géographiques et statutaires profondément distincts. Un bout du monde éclaté, intégré et rattaché à la France contre toute logique géographique, avec pour seul lien de continuité l’immensité des espaces maritimes…
Ce double paradoxe, la pluralité de différences et l’attachement à la France dans l’éloignement, a produit une histoire atypique dont le déroulement s’apparente à un feuilleton inachevé, nourri de rebondissements, de tensions et d’explosions cycliques.
Une histoire aussi ancienne que méconnue, brouillée par les clichés (l’exotisme des tropiques a la dent dure), enracinée dans la période sombre de la colonisation et de la traite négrière, pétrie de mémoire douloureuse et d’autant d’espérance, de domination et d’émancipation, d’orgueil et de vanité, mais aussi de rires et de plaisirs.
Une histoire relatée en trois films.
Une histoire enfin considérée dans son ensemble…
Auteure-réalisatrice : Christiane Succab-Goldman
Production : FTV pôle France 5/Jem Productions
1/3 : L’héritage colonial
La France d’Outre-mer naît au premier âge des conquêtes coloniales. Dès le XVIIe siècle, les convoitises soulevées par la découverte récente du Nouveau Monde et le formidable développement de la marine marquent l’ambition de la France de s’étendre au-delà des mers.
Elle y trouve le sucre, le café, les épices, le bois précieux et organise une traite négrière pour les exploiter.
La Révolution de 1789 bouleverse le cours de l’histoire coloniale française. L’esclavage est aboli pendant dix ans, mais en 1802, Bonaparte met fin à cet acquis en le rétablissant. Il faut attendre 1848, pour voir supprimer définitivement le système esclavagiste dans les colonies.
Cet événement majeur crée dans « les îles à sucre » des catégories sociales nouvelles, celles des petits paysans et des ouvriers, qui se forment en même temps qu’en Europe et s’organisent en syndicats. Pour se maintenir, l’industrie sucrière crée une nouvelle main-d’œuvre avec des « engagés » puisés dans les comptoirs français d’Inde.
Dès la fin du XVIIIè siècle, l’industrialisation en Europe pousse les grands états à la recherche de matières premières, de débouchés et de marchés. Alors s’amorce une deuxième phase de colonisation. La France suit la route des épices dans l’océan indien. Depuis l’archipel des Comores au large de Madagascar, elle fait route vers le Pacifique et prend possession de Wallis et Futuna, de l’Archipel polynésien où vivent des sociétés séculaires épargnées par le processus esclavagiste des XVIe et XVIIe siècles. Ces îles possèdent leurs langues, leurs systèmes religieux, leurs clans et leurs royaumes. Mais le christianisme s’impose dans cette zone. Plus tard, en Nouvelle-Calédonie, la conquête sera d’une extrême violence.
Lorsque la guerre de 1914-1918 éclate, l’Outre-mer constitue pour la France un formidable réservoir d’hommes à enrôler. C’est cette première guerre qui donnera aux colonisés une conscience internationaliste. Dans les années 30, une génération de jeunes colonisés vient poursuivre des études à Paris et découvre d’autres peuples dominés dans une Europe où montent le nazisme et le fascisme. C’est dans ce contexte que naît le mouvement de la « Négritude » porté par Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor Léon-Gontran Damas.
Quand en 1931 s’ouvre à Paris l’Exposition internationale au Bois de Vincennes, les parisiens découvrent alors que l’Histoire n’est pas seulement occidentale.
2/3 : Les turbulences de la décolonisation
Lorsqu’éclate la Seconde Guerre Mondiale, l’empire colonial français est à son apogée. À la Libération, la mobilisation anticoloniale déferle sur tous les continents. Le souffle de l’émancipation ébranle les vieilles certitudes. Les peuples d’outre-mer aspirent à l’égalité et à l’indépendance.
Dans les « vieilles colonies », en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, c’est l’exigence d’égalité qui domine au travers de la revendication d’assimilation pleine et entière à la métropole. En 1946, elles deviennent Départements d’Outre-mer. Mais très vite, la déception l’emporte car les lois de la République tardent à être appliquées.
Dans les îles du Pacifique au contraire, ce n’est pas l’intégration à la société française qui est revendiquée, mais la préservation des cultures autochtones. L’archipel de Wallis et Futuna fait exception à cette logique en devenant territoire d’outre-mer à la demande de son roi.
Le retour du Général de Gaulle au pouvoir en 1958 dans le contexte de la guerre d’Algérie, change la donne : la République devient plus que jamais « une et indivisible ». On assiste alors à une reprise en main de l’Outre-mer qui mêle développement économique et répression de toute revendication séparatiste.
En Polynésie, Pouvanaa’a Opaa qui prône l’indépendance de son pays, est annihilé politiquement et exilé en France. En Nouvelle-Calédonie où l’Assemblée territoriale est dominée par un parti autonomiste, le pouvoir de l’Etat est renforcé, l’exploitation du nickel accaparée. Aux Antilles, les mouvements indépendantistes et identitaires sont réprimés dans le sang. La Réunion, où le parti communiste est très puissant, n’échappe pas non plus à la répression gaullienne.
Dans le contexte de la guerre froide, de grands projets doivent attester l’indépendance de la France : un Centre d’Expérimentation nucléaire est implanté en Polynésie, puis un Centre d’Expérimentation Spatiale en Guyane. On y dépêche la Légion Etrangère pour assurer l’ordre. Afin de calmer l’effervescence indépendantiste, le pouvoir transforme les « vieilles colonies » en immenses chantiers de constructions. Elles deviennent les vitrines de la France. Simultanément, le fort besoin de paix sociale en outre-mer et de main-d’œuvre en métropole, déclenche l’organisation méthodique des flux migratoires de populations. Le gouvernement crée pour la circonstance une structure spéciale : le BUMIDOM, le bureau de migrations des populations d’outre-mer.
Dans les années 80 les mouvements de revendications se radicalisent en Nouvelle-Calédonie. Pendant la campagne électorale opposant François Mitterrand à Jacques Chirac, les conflits s’exacerbent entre Kanaks et Caldoches dans une violence qui frôle la guerre civile. L’intervention militaire de la France aboutit à la dramatique tuerie de la grotte de Watetö dans l’île d’Ouvéa.
Mais le dialogue se renoue grâce aux accords de Matignon-Oudinot pour ouvrir une ère nouvelle de concertations entre Kanaks, Caldoches et représentants de l’Etat.
3/3 : L’ère de la mondialisation
En Outre-mer, l’entrée dans la modernité ébranle les modèles économiques traditionnels. Les crises sociales provoquées par l’effondrement de l’économie sucrière et l’explosion démographique sont partiellement surmontées par la migration vers la métropole.
Mais peu à peu, l’exil sans retour, la découverte d’une forme ténue de racisme dans l’hexagone à l’encontre des populations d’outre-mer malgré l’égalité de droits, exacerbe leur mal être identitaire. La mémoire de l’esclavage, toujours présente, fonde de nouvelles revendications. En 1999, une loi rédigée par Christiane Taubira, députée de la Guyane, consacre la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité.
Les années 80 voient poindre des changements politiques majeurs.
En Guadeloupe et en Martinique, elles s’ouvrent sur une vague de violence conduite par des groupes indépendantistes. Toutefois, la politique de décentralisation porte ses fruits en outre-mer : on y conçoit et adapte des statuts politiques taillés sur mesure. La diversité institutionnelle devient la règle.
Soudain, en Nouvelle-Calédonie, le 4 mai 1989, en pleine cérémonie de la levée du deuil des 19 tués dans la grotte d’Ouvéa, le leader Jean-Marie Tjibaou et son lieutenant Yeiwéné Yeiwéné sont assassinés par un militant opposé aux accords de Matignon. Le mouvement Kanak est décapité. Mais en Europe, la chute du Mur de Berlin ouvre un nouveau cycle de l’histoire. Dix ans plus tard, la signature des accords de Nouméa formalisera un statut particulier pour la Nouvelle-Calédonie.
La mondialisation des échanges s’installe au cœur du débat politique, social et culturel. Dans ce bouleversement global, les sociétés insulaires exposent à la fois leur fragilité et leurs atouts.
En Polynésie la politique autoritaire autrefois conduite par Gaston Flosse et la manne financière qui accompagne la création du Centre d’essais nucléaires en activité jusqu’en 1996, continuent d’alimenter les inégalités sociales et les polémiques autour des conséquences médicales de la radioactivité sur les populations affectées.
En Atlantique, à Saint-Pierre et Miquelon, les conflits irrésolus avec le Canada pour un partage équitable des eaux territoriales conduit à un effondrement économique dont l’archipel se relève mal.
La question toujours renouvelée du statut politique de l’Outre-mer revient sur le tapis. En 1999, les Présidents de Région de Guadeloupe, Martinique, Guyane coordonnent leur action en vue d’accroître « la voie de la responsabilité qu’il nous appartient aujourd’hui d’emprunter dans un cadre plus respectueux de notre identité ». Pourtant, malgré un point de vue concordant entre l’Etat et les exécutifs régionaux, les populations rejetteront par référendum en 2003 les dispositions d’un nouveau statut prévoyant d’accorder plus d’autonomie aux régions d’Outre-mer.
En 2008, l’effondrement des marchés financiers mondiaux provoque l’envol du coût des matières premières. En Guyane, puis en Guadeloupe, l’augmentation du prix de l’essence dépasse toutes les prévisions : une grève paralyse la Guadeloupe et se propage au point de devenir le plus grand mouvement social connu dans l’outre-mer français. Afin de dénouer la crise, le Président Sarkozy remet en chantier la question de l’avenir statutaire des départements et leur évolution future vers plus d’autonomie. Mais en janvier 2010 une majorité des suffrages répond « non » au changement de statut, tandis que Mayotte, la seule île des Comores restée française, accède définitivement au statut de département en mars 2011, devenant ainsi le 101ème de la République française.
En quelques années, la lame de fond de la mondialisation a finalement renforcé les liens avec la France mais en leur donnant un sens différent. L’outre-mer ne veut plus être le sujet mais l’acteur d’une histoire commune. En filigrane, c’est aussi une autre vision de soi qui se profile : être enfin pleinement du monde et non plus du bout du monde.
Intervenants
– Jean Crusol, spécialiste des économies insulaires, Martinique
– Jean-Pierre Sainton, historien, Guadeloupe
– Daniel Maximin, écrivain, Guadeloupe
– Jean-Marc Regnault, historien, Polynésie française (Tahiti)
– Myriam Alamkan, historienne maritime, Guadeloupe
– Chantal Spitz, Polynésie française, Tahiti
– Karine Claireaux, maire de Saint-Pierre, Saint-Pierre et Miquelon
– Lydie Ho-Fong-Choy Choucoutou, historienne, Guyane
– Jean Moomou, historien, Guyane
– Louis Théodore, membre fondateur du GONG, Guadeloupe
– Elie Domota, syndicaliste, porte parole du LPK, Guadeloupe
– Jean Chomereau-Lamotte, journaliste, Guadeloupe (décédé)
– Ary Encelade, PDG du Groupe Encelade, Guadeloupe
– Maryse Condé, écrivain, Guadeloupe
– Claude Valentin-Marie, sociologue, conseiller pour l’outre-mer à l’INED, Martinique
– Paul Vergès, ancien président de la Région La Réunion
– Carpanin Marimoutou, Université de La Réunion
– Françoise Vergès, politologue, La Réunion
– René Achéen, historien, Martinique
– Youssouf Moussa, professeur de Mathématiques, Mayotte
– Louis-José Barbançon, historien, Nouvelle-Calédonie
– Philippe Gomes, président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie
– Jacques Lafleur, fondateur du RPCR, signataire des accords de Matignon, Nouvelle-Calédonie (décédé)
– Richard Tuheiava, sénateur de Polynésie
– Daniel Frimigacci, archéologue, Wallis
L’Outre-mer aujourd’hui
L’Outre-mer, plus communément appelé « Dom-Tom » (Départements et Territoires d’outre-mer), désigne généralement l’ensemble des terres sous souveraineté française, géographiquement distantes de la métropole et situées « au-delà des mers ».
Ces terres sont principalement constituées de cinq Départements (Dom) qui disposent également du statut de Région d’outre-mer (Rom) : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion et Mayotte. Ils regroupent 2 040 287 habitants sur une surface de 92 221 km2 (soit plus d’un sixième du territoire métropolitain).
Ces Dom-Rom font partie de l’Union européenne et sont également désignés dans ce cadre par le terme de « Régions ultrapériphériques ».
Par ailleurs, il existe également des Collectivités d’outre-mer (Com) régies par des statuts particuliers.
Ces Com sont au nombre de cinq : la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Leur population totale est de 297 382 habitants pour une superficie d’ensemble de 4 683 km2 (soit moins d’un centième de la surface de l’Hexagone).
La Nouvelle-Calédonie est un territoire qui bénéficie d’un statut spécifique. Cette collectivité, sans qualification particulière, est dite « sui generis ». Tous les textes gouvernementaux la désignent maintenant sous le seul terme de Nouvelle-Calédonie. Sa population est de 232 000 habitants et sa superficie de 19 058 km2 (environ 1/30 de la superficie de l’Hexagone).
En dernier lieu, il faut noter six territoires dits « inhabités », les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), qui sont :
– dans le Pacifique Nord : Clipperton, à l’ouest du Mexique. Cet atoll est placé sous la juridiction du haut-commissaire de la République en Polynésie française ;
– dans l’océan Indien : les îles Crozet, les îles Eparses, les îles Kerguelen, les îles Saint-Paul et l’île Amsterdam ;
– sur le continent Antarctique : la terre Adélie.
Production : JEM Productions,
En coproduction avec Euromédia France, Canal + Overseas Productions,
En association avec France Télévisions
Avec la participation du Centre national de la cinématographie et de l’image animée, du Ministère chargé de l’Outre-mer, de l’Acsé (Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances), du Fonds Images de la Diversité, des Régions Île-de-France, Martinique et La Réunion, de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, du Département Guyane, du Territoire de Saint-Pierre et Miquelon.
une série documentaire 3×52 minutes
réalisée par
Christiane Succab-Goldman
produite par
Jacques Kirsner et Anne-Marie Marsaguet (Jem Productions, Paris)
,
avec le soutien notamment de France télévisions et du ministère chargé de l’Outre-mer.
TV
France 5 (France)
Diffusion : les 8, 15 et 22 mai 2011 à 20h30.
Une projection est organisée à France Télévisions
le mercredi 4 mai 2010 à 20h30.
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