Fiche Livre
Littérature / édition
| Octobre 2005
Heure hybride (L’)
Kettly Mars
Edition : Vents d’ailleurs
Pays d’édition : France
ISBN : 2-911412-36-2
Pages: 160
Prix : 16.00
Parution : 24 Octobre 2005

Français

« Jean-François Éric L’Hermitte, profession gigolo.
Mes amis et mes maîtresses m’appellent Rico. »

La nuit, entre les fêtes de Patrice et les incursions dans les quartiers
chics où il gagne sa vie en donnant du plaisir, Rico fait commerce de
ses attraits à corps perdu, s’inventant mille vies plus flamboyantes
les unes que les autres.

Le jour, allongé sur son lit, il -observe le temps qui coule au rythme
des -gouttes de sa sueur et des modulations de la radio distillant les informations
quotidiennes de la société haïtienne. Face à lui-même,
il laisse venir en son âme le fantôme d’Irène, la mère
partie trop tôt, seule femme aimée et idéalisée jusqu’à
l’obsession.

Dans un pays où tout est pardonnable sauf la pauvreté, Rico, ni
blanc ni complètement noir, enfant bâtard d’une famille aisée
qui ne lui a légué que son nom en héritage, navigue entre
deux eaux, mettant à profit les ambiguïtés de ses origines
pour subsister. Une rencontre troublante fera voler toutes ses certitudes en
éclats, celles de l’homme, celles de l’enfant.



À travers le regard de Rico, beau gosse fauché et mystificateur
de talent, le roman de Kettly Mars nous embarque dans un Port-au-Prince interlope,
peuplé d’êtres égarés dans les brumes de l’alcool
et de la solitude, brossant avec force tous les paradoxes de Haïti vécu
au quotidien.

Son écriture incisive, directe, percute nos esprits et trouble nos sens
dans un tempo syncopé où se mêlent sexualité ambiguë
et monde de l’enfance, mensonge et pureté.

Format : 14,9 X 23 cm

Broché, couverture quadrichromie avec rabats, pelliculage mat, vernis brillant.

Résumé : PRIX SENGHOR DE LA CRÉATION LITTÉRAIRE 2006

Rico, gigolo de profession, beau gosse fauché et mystificateur de talent, nous entraîne dans les paradoxes d’Haïti vécu au quotidien.

Extrait : La nature m’a fait don d’une belle gueule. Ni blanc
ni tout à fait noir, ni gras ni trop maigre, plutôt grand avec
des muscles saillants et nerveux. On me décrit comme un mulâtre
brun, un griffe ou un grimaud amélioré. S’ils ne sont pas
droits, mes cheveux aux boucles cannelle ne possèdent pas non plus la
texture rêche des nègres purs. Pas un fil blanc ne jette encore
le désarroi dans ma chevelure drue et à mon âge je peux
dire sans me tromper qu’aucune calvitie ne viendra altérer désagréablement
ma physionomie. Mon nez est une combinaison de truffe caucasienne agrémentée
de frémissantes narines négroïdes. Mes lèvres charnues
et bien ourlées recèlent des promesses de jouissance, elles sont
surmontées d’un duvet châtain qui confère un air d’adolescent
rebelle à mon visage toujours rasé de près. Je connais
le pouvoir de mes yeux couleur de miel. Je vis dans un monde où les valeurs
humaines s’évaluent aux teintes épidermiques et à
la frisure des cheveux. Toute nuance de peau tendant vers le clair garantit
une certaine estime et un a priori de bonne extraction. Je n’ai pas choisi
ma couleur ni la souplesse de ma chevelure mais je serais bête de ne pas
prendre avantage de ces précieux atouts pour boire, manger et satisfaire
mes autres appétits. Si toute une classe d’hommes et de femmes
peut être obnubilée par le traumatisme colonial au point d’opposer
des histoires de couleur de peau aux problèmes profonds qui minent le
pays aujourd’hui, qu’à cela ne tienne. Moi, je profite de
la bêtise collective. Parce que, en dehors de mes attributs physiques
providentiels je ne possède rien, mais rien du tout. Je suis un homme
ambigu, à cheval entre deux mentalités, entre deux types physiques,
entre deux classes sociales, entre deux sexualités. J’intrigue
et attire mâles et femelles par mon allure de beau ténébreux
et mon cynisme. Ma vie durant j’ai cultivé l’ambiguïté,
jusqu’à en faire un métier, un art, une passion garantissant
ma survie dans cette société qui pardonne tout à un homme,
ses convictions politiques, ses lâchetés, ses magouilles, ses vices,
tout, sauf sa pauvreté.

Citation presse :
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