Murmures
De quoi la musique gwoka a-t-elle besoin aujourd’hui…
septembre 2011 | Faits de société | Musique | France
Source : KOLEKTIF POU GWOKA
© ML Dahomay
Français
Il est question de mettre le gwoka sur la liste des patrimoines de l’humanité. Un groupe de musiciens s’élève contre une telle initiative qui risque d’institutionaliser cette musique et de la figer, alors qu’elle est en plein essor!
KOLEKTIF POU GWOKA
Ka gwoka bizwen jòdi jou…
Le KOLEKTIF POU GWOKA, constitué d’acteurs reconnus du gwoka, travaille depuis un mois sur le thème « Ka gwoka bizwen jodijou ». Il fait état d’une évolution incontestable de cette musique depuis les années 60 à nos jours :
De mizik a vyé-nèg, elle s’étend aujourd’hui à tout le peuple guadeloupéen, quelque soit le rang social, la commune, et les circonstances. Les reproductions multiples de la forme du tanbouka sur des t-shirts ou autres vêtement, des tatouages, en architecture, en menuiserie, ou en bijou, témoigne d’une profonde appropriation de cet instrument devenu symbole identitaire au-delà de sa simple fonction musicale. Symbole marquant à la fois un territoire, et la culture guadeloupéenne, il définit aussi une manière de s’habiller, de vivre et de penser.
La musique gwoka atteint en ce 21ème siècle, un degré de créativité jamais égalé, traduisant une vitalité évidente. Dans chaque commune, sa transmission formelle ou non se fait dans de nombreuses structures d’enseignement. Des méthodes et techniques sont éditées ainsi que des partitions. La musique et la danse ne cessent d’évoluer, créant des formes nouvelles, et la souche traditionnelle sans cesse renouvelée, demeure intarissable. Les femmes s’approprient cette musique. Les artistes du gwoka, de plus en plus nombreux, composent leurs œuvres, créent des chorégraphies, sortent des CD, produisent des spectacles, des clips, chaque année. Les léwòz se multiplient et leur taux de fréquentation ne cesse d’augmenter.
D’autre part, le gwoka tend vers l’universel… La Guadeloupe génère des artistes internationaux qui se revendiquent de la musique gwoka et portent la connaissance de cette musique à l’extérieur: Sony Troupe, Christian Laviso, Klod Kiavué, Jacques Schwarz-Barth, Léna Blou, Kan’nida, Guy Konket, Olivier Juste, Makaya… Inversement, des artistes étrangers manifestent leur intérêt pour le gwoka et se produisent avec des artistes locaux : Sosa Omar ?, Archie Sheep, Chris Joris, David Murray, Lise Mac Comb (?)… Des chercheurs et étudiants viennent du monde entier étudier le gwoka et rédigent des mémoires, des thèses sur le sujet. Des écrivains et chercheurs-musiciens guadeloupéens continuent d’écrire sur leur musique selon diverses thématiques.
D’autres genres musicaux s’associent au gwoka : la musique classique, le jazz et surtout les musiques actuelles et urbaines, hip hop, dancehall, slam, raga, zouk…. Les structures religieuses s’ouvrent elles aussi aux tambours et chants du gwoka. Il existe des festivals : celui de la Guadeloupe, qui vient de fêter ses 21 ans, celui de Paris et bientôt en Angleterre.
Le KOLEKTIF POU GWOKA fait ainsi le constat de la bonne vitalité de la musique gwoka. Il affirme qu’aucun danger de disparition ne la menace, contrairement au quadrille, au mayolè ou au léwòz o komannman et que l’urgence aujourd’hui, consiste à trouver des solutions à ses besoins véritables, liés le plus souvent aux conditions mêmes des artistes sur le territoire :
– Une plus grande présence dans les médias locaux pour la promotion des œuvres le plus souvent auto produites.
– Des circuits et des lieux pour la diffusion de concerts et de spectacles, en dehors des soirées léwòz.
– La création d’espaces adaptés pour des manifestations de gwoka.
– Des agents et des boîtes de production ou de gestion d’artistes notamment pour des festivals étrangers.
– Plus de rencontres, de débats sous forme d’échanges d’expériences
– Encourager la production des différentes méthodes d’enseignement et tout autre support
– Faire émerger les droits sociaux des artistes traditionnels.
La France peut-elle porter une réponse aux besoins du gwoka en Guadeloupe, département français?
La France, qui a signé la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel de l’humanité de l’UNESCO en 2006, est sensée sauvegarder le patrimoine de ses territoires. Qu’a-t-elle mis en place pour le gwoka depuis 5 ans ? Rien ! Le centre Rèpriz, une ONG accréditée par l’UNESCO pour la mise en place de cette Convention en Guadeloupe, œuvre aujourd’hui, pour que la France dépose une demande d’inscription du gwoka au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Or, le gwoka ne correspond pas à la notion de « patrimoine » en péril et ne nécessite d’aucun besoin de sauvegarde ! Qui donc en Guadeloupe, croit à ce point à la disparition imminente du gwoka ? Qui donc en Guadeloupe croit en une soudaine reconnaissance de l’oppresseur-colonisateur pour un bien musical acquis au fils de nombreux combats des ancêtres contre ce même oppresseur ? Gwoka de résistance, construit au bout de trois siècles d’esclavage au fil de diverses transmissions musicales des ancêtres ! Gwoka qui se maintient aussi vivace, après toutes les tentatives du gouvernement français lui-même et de certains élus et personnalités locaux pour le faire disparaître ! De plus, le gwoka sous-tend spirituellement toutes les manifestations revendicatives du peuple guadeloupéen, et souvenons-nous en, particulièrement durant les évènements du LKP ! Qu’a-t-il à faire d’un titre de prestige qui veillerait à sa « viabilité », alors que sa transmission est assurée depuis longtemps et qu’il tend déjà vers l’universalité ?
D’autre part, soyons conscients que la France « s’efforcera » de mettre en place cette sauvegarde, que selon sa bonne volonté, son bon vouloir et ses orientations politiques, parce que la Convention « n’exigera » d’elle que l’inventaire et l’identification du gwoka, avec la participation de la communauté et de Rèpriz. Pour assurer à l’UNESCO et au gouvernement français l’adhésion de la communauté, Répriz fait circuler une pétition et recueille des signatures. Mais de quelle communauté s’agit-il ? Du peuple guadeloupéen, du monde du gwoka ? D’étrangers en vacances ?… la plus part des signataires ne connaissent pas véritablement la teneur de cette inscription au patrimoine de l’humanité.
Le KOLEKTIF POU GWOKA déclare que toute mesure de sauvegarde aujourd’hui est inopportune. Il émet une grande réserve quant à l’inscription du gwoka sur la liste du patrimoine culturel de l’humanité, cette démarche ne correspondant ni aux besoins actuels du gwoka, ni à ses attentes!
Sé pousa KOLEKTIF POU GWOKA ka mandé mizisyen, tanbouyé, chantè, dansè, tout pèp gwadloup, mèt yo ansanm ansanm pou gadé, ki jan nou ka pòté répons é solisyon asi sa gwoka bizwen jòdila. Annou mèt nou ansanm pou gwoka fè timoun an-nou viv kon’y dwètèt ! Annou gadé kijan nou pé ay pi fon adan pwòp tèknik é konésans an-nou, pou ba-yo on fòwmasyon wo-nivo ! Annou sanblé pou tout moun si latè rèkonnèt yo pou fòs a-yo, talan a-yo, « vélo-sité » a-yo, kréyasyon a-yo ! Sé an sans lasà pou nou travay jodijou pou gwoka vin inivèwsèl… Sé grenn diri ka fè sak diri é ansanm nou ké pi fò !
Ka gwoka bizwen jòdi jou…
Le KOLEKTIF POU GWOKA, constitué d’acteurs reconnus du gwoka, travaille depuis un mois sur le thème « Ka gwoka bizwen jodijou ». Il fait état d’une évolution incontestable de cette musique depuis les années 60 à nos jours :
De mizik a vyé-nèg, elle s’étend aujourd’hui à tout le peuple guadeloupéen, quelque soit le rang social, la commune, et les circonstances. Les reproductions multiples de la forme du tanbouka sur des t-shirts ou autres vêtement, des tatouages, en architecture, en menuiserie, ou en bijou, témoigne d’une profonde appropriation de cet instrument devenu symbole identitaire au-delà de sa simple fonction musicale. Symbole marquant à la fois un territoire, et la culture guadeloupéenne, il définit aussi une manière de s’habiller, de vivre et de penser.
La musique gwoka atteint en ce 21ème siècle, un degré de créativité jamais égalé, traduisant une vitalité évidente. Dans chaque commune, sa transmission formelle ou non se fait dans de nombreuses structures d’enseignement. Des méthodes et techniques sont éditées ainsi que des partitions. La musique et la danse ne cessent d’évoluer, créant des formes nouvelles, et la souche traditionnelle sans cesse renouvelée, demeure intarissable. Les femmes s’approprient cette musique. Les artistes du gwoka, de plus en plus nombreux, composent leurs œuvres, créent des chorégraphies, sortent des CD, produisent des spectacles, des clips, chaque année. Les léwòz se multiplient et leur taux de fréquentation ne cesse d’augmenter.
D’autre part, le gwoka tend vers l’universel… La Guadeloupe génère des artistes internationaux qui se revendiquent de la musique gwoka et portent la connaissance de cette musique à l’extérieur: Sony Troupe, Christian Laviso, Klod Kiavué, Jacques Schwarz-Barth, Léna Blou, Kan’nida, Guy Konket, Olivier Juste, Makaya… Inversement, des artistes étrangers manifestent leur intérêt pour le gwoka et se produisent avec des artistes locaux : Sosa Omar ?, Archie Sheep, Chris Joris, David Murray, Lise Mac Comb (?)… Des chercheurs et étudiants viennent du monde entier étudier le gwoka et rédigent des mémoires, des thèses sur le sujet. Des écrivains et chercheurs-musiciens guadeloupéens continuent d’écrire sur leur musique selon diverses thématiques.
D’autres genres musicaux s’associent au gwoka : la musique classique, le jazz et surtout les musiques actuelles et urbaines, hip hop, dancehall, slam, raga, zouk…. Les structures religieuses s’ouvrent elles aussi aux tambours et chants du gwoka. Il existe des festivals : celui de la Guadeloupe, qui vient de fêter ses 21 ans, celui de Paris et bientôt en Angleterre.
Le KOLEKTIF POU GWOKA fait ainsi le constat de la bonne vitalité de la musique gwoka. Il affirme qu’aucun danger de disparition ne la menace, contrairement au quadrille, au mayolè ou au léwòz o komannman et que l’urgence aujourd’hui, consiste à trouver des solutions à ses besoins véritables, liés le plus souvent aux conditions mêmes des artistes sur le territoire :
– Une plus grande présence dans les médias locaux pour la promotion des œuvres le plus souvent auto produites.
– Des circuits et des lieux pour la diffusion de concerts et de spectacles, en dehors des soirées léwòz.
– La création d’espaces adaptés pour des manifestations de gwoka.
– Des agents et des boîtes de production ou de gestion d’artistes notamment pour des festivals étrangers.
– Plus de rencontres, de débats sous forme d’échanges d’expériences
– Encourager la production des différentes méthodes d’enseignement et tout autre support
– Faire émerger les droits sociaux des artistes traditionnels.
La France peut-elle porter une réponse aux besoins du gwoka en Guadeloupe, département français?
La France, qui a signé la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel de l’humanité de l’UNESCO en 2006, est sensée sauvegarder le patrimoine de ses territoires. Qu’a-t-elle mis en place pour le gwoka depuis 5 ans ? Rien ! Le centre Rèpriz, une ONG accréditée par l’UNESCO pour la mise en place de cette Convention en Guadeloupe, œuvre aujourd’hui, pour que la France dépose une demande d’inscription du gwoka au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Or, le gwoka ne correspond pas à la notion de « patrimoine » en péril et ne nécessite d’aucun besoin de sauvegarde ! Qui donc en Guadeloupe, croit à ce point à la disparition imminente du gwoka ? Qui donc en Guadeloupe croit en une soudaine reconnaissance de l’oppresseur-colonisateur pour un bien musical acquis au fils de nombreux combats des ancêtres contre ce même oppresseur ? Gwoka de résistance, construit au bout de trois siècles d’esclavage au fil de diverses transmissions musicales des ancêtres ! Gwoka qui se maintient aussi vivace, après toutes les tentatives du gouvernement français lui-même et de certains élus et personnalités locaux pour le faire disparaître ! De plus, le gwoka sous-tend spirituellement toutes les manifestations revendicatives du peuple guadeloupéen, et souvenons-nous en, particulièrement durant les évènements du LKP ! Qu’a-t-il à faire d’un titre de prestige qui veillerait à sa « viabilité », alors que sa transmission est assurée depuis longtemps et qu’il tend déjà vers l’universalité ?
D’autre part, soyons conscients que la France « s’efforcera » de mettre en place cette sauvegarde, que selon sa bonne volonté, son bon vouloir et ses orientations politiques, parce que la Convention « n’exigera » d’elle que l’inventaire et l’identification du gwoka, avec la participation de la communauté et de Rèpriz. Pour assurer à l’UNESCO et au gouvernement français l’adhésion de la communauté, Répriz fait circuler une pétition et recueille des signatures. Mais de quelle communauté s’agit-il ? Du peuple guadeloupéen, du monde du gwoka ? D’étrangers en vacances ?… la plus part des signataires ne connaissent pas véritablement la teneur de cette inscription au patrimoine de l’humanité.
Le KOLEKTIF POU GWOKA déclare que toute mesure de sauvegarde aujourd’hui est inopportune. Il émet une grande réserve quant à l’inscription du gwoka sur la liste du patrimoine culturel de l’humanité, cette démarche ne correspondant ni aux besoins actuels du gwoka, ni à ses attentes!
Sé pousa KOLEKTIF POU GWOKA ka mandé mizisyen, tanbouyé, chantè, dansè, tout pèp gwadloup, mèt yo ansanm ansanm pou gadé, ki jan nou ka pòté répons é solisyon asi sa gwoka bizwen jòdila. Annou mèt nou ansanm pou gwoka fè timoun an-nou viv kon’y dwètèt ! Annou gadé kijan nou pé ay pi fon adan pwòp tèknik é konésans an-nou, pou ba-yo on fòwmasyon wo-nivo ! Annou sanblé pou tout moun si latè rèkonnèt yo pou fòs a-yo, talan a-yo, « vélo-sité » a-yo, kréyasyon a-yo ! Sé an sans lasà pou nou travay jodijou pou gwoka vin inivèwsèl… Sé grenn diri ka fè sak diri é ansanm nou ké pi fò !
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