Fiche Personne
Musique

Jorge Humberto

Chanteur/euse
Cap-Vert

Français

le poète de Mindelo
Si la morna est avant tout poésie, Jorge Humberto lui rend le lyrisme épuré des origines, un chant inspiré et des textes imagés puisant dans le quotidien insulaire. Magicien des mots, à la fois instinctif et profond, l’enfant de Mindelo est le créateur d’un styledans lequel la veine poético-musicale s’enrichit de la réflexion philosophique. « Hymne d’amour, d’illusion et de mélancolie » selon l’expression du poète Fausto Duarte, la morna est la forme musicale de prédilection, mais pas la seule, dans le répertoire de cet artiste qui aime aussi composer des coladeiras aux airs plus rapides et aux contenus ouverts à la vision ~*. Chanteur doué d’une voix chaude et convaincante, Jorge Humberto est né un 26 décembre 1959 à Sào Vicente, dans la ville portuaire de Mindelo, centre cosmopolite et capitale culturelle de l’archipel depuis le siècle dernier. Les débuts de son travail de compositeur datent de 1975, l’année de l’Indépendance. La fin de la colonisation libère les esprits qui se mobilisent dans tous les domaines de l’art. Cette effervescence créative se manifeste aussi avec une floraison de groupes qui donnent un nouvel élan à la musique traditionnelle (mornas et coladeiras) ou à la mise en valeur de ses sources africaines (batuque, tabanka…) ou européennes (mazurka, contredanse…). Jorge Humberto suit le mouvement et, en 1982, commence à jouer à la guitare les mornas et coladeiras classiques, avec une prédilection particulière pour l’héritage des anciens poètescomme Eugénio Tavares et B. Leza, assez proches de sa sensibilité de chroniqueur social. Après avoir subi un accident de travail qui lui fragilise les doigts en lui imposant une manière particulière de jouer la guitare, Jorge Humberto s’installe au Portugal. Ici, il réalise les trois albums (« Guentà » en 1992, « Moiabo um Consolà » en 1995 et « Portexperimental » en 1998) qui vont lui donner une grande notoriété autant au pays qu’auprès des communautés de la diaspora en Europe et aux Etats-Unis. Très considérées par les artistes capverdiens, sescompositions sont reprises par des chanteuses de renommée comme Fantcha ou Maria Alice, dont les albums sont distribués en France.
Le troubadour de Mindelo est un cas à part dans le paysage musical du Cap Vert. Si la mélancolie lancinante de ses premières compositions s’est quelque peu nuancée (« Maintenant, j’ai changé au niveau des paroles et de la musique », dit-il aujourd’hui), la richesse et l’originalité de ses textes avec la profondeur et la spontanéité de son approche à la réalité, en font l’héritier de ces chantres éclairés de la capverdianité, des écrivains et poètescomme Baltasar Lopes ou Jorge Barbosa, qui furent parmi les protagonistes du mouvementlittéraire de la « Claridade » pendant les années 30 à Mindelo. Avec ses observations psychologiques, ses refléxions existentielles et ses métaphores, l’écriturede Jorge Humberto s’apparente davantage à la philosophie qu’à la critique sociale. La langue créole qu’il manie et qu’il aime « comme la nourriture que je mange », un créole originaire et profondement enraciné dans l’histoire de son pays, lui permet une exactitude majeure dans l’expression et une plus forte adhérence sonore des paroles à la musique. Contacté par Morabeza Records, la maison discographique fondée en 1965 à Rotterdam parDjunga d’Biluca et qui joua un rôle essentiel dans la diffusion des ouvrages des artistesinsulaires, le poète de Mindelo va enfin saisir l’occasion de s’imposer dans le milieu difficile du showbiz. Celui qui se veut « Capverdien dans l’Universel » ne manquera pas d’apporter à son public et au public européen, qui découvre il y a une quinzaine d’années la musique du Cap Vert, suite aux premières tournées de Cesaria, une touche d’authenticité pour mieux apprécier les mélodies déchirantes du blues venant de l’Atlantique.
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