Ida Abreu

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Dés l’âge de douze ans, Idá Abreu, artiste en herbe, troque ses jeux d’enfant contre la sculpture et le dessin, qu’il pratique, sans école et sans maître, muni de quelques outils de fortune. Il grandit à Achada Santo António, un quartier populaire de Praia, capitale du Cap-Vert, où il observe la rudesse de la vie, la richesse et la beauté des gens humbles. Cet univers insulaire et pittoresque nourrit son imaginaire et lui donne le goût des expressions et teintes multiples, et surtout le sens du détail.
Autodidacte ingénieux, ce sculpteur, hors mode, ne verse ni dans l’exotisme racoleur, ni dans l’académisme complaisant. Ses créations, aussi envoûtantes que déroutantes, expriment l’originalité d’une plastique créole et un style, tout à la fois, universel et insolite. L’amour des siens et son enracinement viscéral à une terre ingrate conte avant tout sa quête d’une esthétique rigoureuse et singulière qui fuit la contemporanéité phagocytaire et lascive, mais honore placidement l’Ancien.
Quel que soit le matériau utilisé (marbre, bois, ivoire végétal, os, corail entre autres), le créateur s’approprie le langage de la matière, en épouse les imperfections, matérialise l’indicible et taille le visible au bon vouloir d’une troublante, belle et familière anormalité. Ses oeuvres déclinent au féminin lignes et courbes, ombres et lumières, vide et plein. Et à l’apparente bestialité des portraits, ce plasticien intemporel oppose des formes fluides et généreuses, élégantes et naturelles qui rassurent l’esprit, exalte les sens et révèlent assurément l’émotion.