à propos de 13 décembre, ligne 9

Entretien de Sylvie Chalaye avec Mata Gabin

Avignon, juillet 2002
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Vous vivez en France, mais vous êtes, je crois, très attachée à l’Afrique.
J’ai vécu en Côte-d’Ivoire. Ma mère est libérienne et mon père martiniquais. Je suis né à la frontière de la Côte d’Ivoire et du Liberia et j’ai habité une grande partie de mon enfance, jusqu’à mon bac, à Abidjan.
Comment avez-vous décidé de devenir comédienne ?
Je regardais à la télévision un film avec Béatrice Dalle qui jouait un rôle de sorcière, j’ai d’ailleurs complètement oublié le film, mais ce qui m’avait impressionnée, c’est le pouvoir de transfiguration de la comédienne, les expressions de son visage. Cependant, pour mes parents, il me fallait d’abord passer le bac. Alors au Lycée Mermoz d’Abidjan, j’ai commencé à faire des petits ateliers de théâtre. Et c’est seulement après mon bac que je suis venue en France et que j’ai passé d’abord quatre ans dans un cours de comédie à Marseille. Puis je suis montée à Paris, comme on dit.
C’est la première fois que vous mettez en scène un spectacle et bien que vous soyez comédienne, vous avez choisi de ne pas jouer.
Je ne voulais pas jouer parce que l’histoire est réelle et que j’avais peur que l’émotion ne me rattrape trop. J’ai préféré écrire, mettre en forme et rester extérieur au plateau.
Cette pièce est aussi votre premier texte.
L’écriture, c’est en fait quelque chose que j’ai depuis longtemps en moi. Quand j’étais gamine, au moindre petit souci j’écrivais un poème. Dès que je faisais une belle rencontre j’écrivais. Quand cette histoire m’est arrivée, j’étais vraiment désemparée et mes amis m’ont dit : « Mais enfin, Mata, toi qui écris tout le temps, écris au moins cette histoire, cela te fera du bien ». Je l’ai fait. J’ai écrit en une nuit, d’une traite ce texte et la démarche m’a en effet beaucoup soulagée. Je l’ai ensuite fait lire à des amies comédiennes et le désir d’un spectacle est né.
Est-ce que le spectacle colle vraiment à la réalité de ce qui vous est arrivé ?
Oui. Je n’ai rien inventé. J’ai d’abord écrit un gros monologue. C’est ensuite que l’on a adapté dramaturgiquement le texte et que sont nées les trois femmes, les trois voix, les trois instances : la mère, la femme-femme un peu superficielle et la femme battante qui travaille.
Finalement cette expérience personnelle vous l’avez complètement transcendée en une histoire universelle qui concerne toute les femmes et peut interpeller la jeunesse.
La démarche a d’abord été très intime, thérapeutique même. Mais aujourd’hui j’aimerais que le spectacle puisse être vu par des adolescents et les fasse réfléchir. De plus, cette expérience d’écriture m’a donné confiance pour aller plus loin sur d’autres textes que j’avais déjà écrits et que j’ai aujourd’hui envie de reprendre avec la scène en tête. Je vais pouvoir aller jusqu’au bout d’autres projets. A présent la porte s’ouvre.

///Article N° : 2383

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