L’accès à la citoyenneté italienne pour les enfants nés en Italie de parents immigrés est un casse-tête. L’association G2 Deuxième génération sensibilise le Parlement européen et la société italienne. Rencontre.
Activiste auprès de l’association G2 Deuxième génération, créée en 2005, l’écrivaine d’origine somalienne Igiaba Scego se bat en Italie pour la reconnaissance des droits civiques des jeunes issus de l’immigration. Selon la loi du 5 février 1992, la citoyenneté italienne est liée au principe du droit du sang. Pour acquérir la nationalité, l’enfant doit être né en Italie et l’un de ses parents aussi. Dès lors, les jeunes issus de l’immigration, à peine majeurs, doivent débourser 200 pour demander la nationalité. Et ce, dans un laps de temps d’un an. Après cela, ils sont considérés comme étrangers, avec risque d’expulsion du territoire. Au-delà de la lourdeur symbolique de cette condition, les jeunes en question ne peuvent pas participer à des concours publics, s’inscrire aux ordres professionnels ni voter en Italie. Une réalité qui place les enfants issus de l’immigration dans des problématiques identitaires complexes, comme le raconte Igiaba Scego dans son roman autobiographique Ma maison c’est où je suis (1). Elle y retrace l’histoire de sa famille, de Somalie à Rome, sa ville natale. Elle raconte alors ses premières années difficiles, dans l’indigence économique et le racisme.
Mémoire de l’immigration
L’association G2 interpelle régulièrement le Parlement européen face aux lois sur la citoyenneté qui excluent les enfants d’immigrés nés sur le sol italien. En collaboration avec l’association Anci et Save the children, elle a publié un manuel explicatif dédié aux jeunes issus de parents immigrés, 18 ans à la mairie. Toutefois, la préface du manuel, écrite par un politicien italien, pose question : « Notre espoir est que chaque enfant [
] puisse être fier aussi bien de son identité que de sa nouvelle Patrie ». Pourquoi « nouvelle » étant donné qu’il s’agit du seul pays où ces jeunes ont vécu ? Un abus de langage qui traduit des stéréotypes tenaces liés aussi à une histoire de l’immigration et du passé colonial italien méconnu. Comme Igiaba Scego le rappelle : « L’Italie avait oublié son passé colonial. Elle avait oublié d’avoir fait subir l’Enfer aux Somaliens, Érythréens, Libyens et Éthiopiens [
] Ils ont fait comme les Anglais, les Français, les Belges [
] Mais dans beaucoup de ces pays après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, il y a eu une discussion [
] ; on s’est interrogé sur l’impérialisme et ses crimes ; on a publié des études ; le débat a influencé la production littéraire, d’essais, de film, de musique. Par contre, en Italie a régné le silence, comme si rien ne se passait ». Rappeler le lien de l’Italie avec l’Afrique est un combat à mener: « J’aimerais qu’il y ait, un jour, un monument pour les victimes du colonialisme italien. Quelque chose qui rappelle que l’histoire de l’Afrique orientale et de l’Italie est liée ».
(1) La mia casa è dove sono, éd. Rizzoli, 2010Plus d’infos: www.secondegenerazioni.it
Droit du sol, droit du sang en Europe :
En France, un enfant né sur le sol français de parents étrangers devient automatiquement français à ses 18 ans, s’il a résidé au moins 5 ans sur le territoire depuisl’âge de 11 ans et qu’il y réside encore à ses 18 ans. En Allemagne, depuis 2000, tout enfant né dans ce pays d’un parent étranger y résidant légalement depuis au moins 8 ans peut acquérir la nationalité allemande. En Grande-Bretagne, historiquement attachée au
droit du sol, la législation s’est durcie depuis 1983 : pour devenir citoyen britannique, un des deux parents doit résider en permanence dans le pays.///Article N° : 12669