La Haine Tue

Avis aux femmes et aux hommes de raison...

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Certains des mots que je lis, depuis quelques jours, me heurtent, me blessent, et j’ai l’intime sentiment qu’ils heurtent et blessent insidieusement l’ensemble des habitants de ce pays.
Pour le coup, le chaos ambiant ne fait pas dans la discrimination, toutes les couches sont atteintes et les dégâts sont et seront conséquents.
Les mots abattent des murs et élèvent les consciences, ce n’est plus à mettre en débat.
Ce qui n’est plus à mettre en débat non plus, c’est que les mots peuvent tout aussi bien nuire et détruire.
Abîmer et soumettre.

Il souffle ici même un vent de Chaos sémantique :
« Indignation sélective »
« Amalgame »
« Not in my name »
« Je suis Charlie »
« Intégrisme »
« Attentat »
« Liberté d’expression »
« Je ne suis pas Charlie »
« Terrorisme »
« Condamnation unanime »
« Musulmans de France »
« Unité nationale »
« Rassemblement républicain »

Il y a aussi une guerre des mots que nous ne devons pas perdre.
Nous devons commander aux mots, ce ne sont pas les mots qui nous commandent.
Ces mots-là sont jetés en pâture aux tout-venants sur nos réseaux sociaux et ailleurs.
Ailleurs, on peut les mettre en débat.
Sur les réseaux sociaux on serait tenu d’y adhérer ou de passer son chemin ?
Où est donc passée la formidable aptitude de certains à complexifier le débat ?
Où sont passées notre vivacité d’esprit, nos facultés d’analyse ?
Sommes-nous condamnés à vociférer notre bile et nos glaires en mettant encore et encore L’Autre en accusation ?
Ah L’Autre ! Cet étrange et obscur personnage que nous ne connaissons pas, et qui malgré tout est automatiquement le récipiendaire de nos peurs les plus atroces.
Seulement voilà, que tu le veuilles ou non, L’Autre c’est aussi toi, parce qu’on est toujours L’Autre de quelqu’un, toujours.

En attaquant Charlie Hebdo, ils l’ont rendu plus populaire, les abonnements ont déjà connu une hausse sans précédent, ce canard ne s’éteindra jamais.
Je suis sensible à la façon dont ceux qui s’indignent ont choisi de résister, on ne tue pas des gens parce qu’ils ne pensent pas comme vous, on ne peut pas tuer des journalistes sans que le peuple réagisse, vous ne pourrez pas tuer cette voix, il sera encore plus lu.
Être en accord ou non avec son contenu, pour moi n’est pas la question, des personnes ont été exécutées, justement à cause de son contenu, et c’est totalement inacceptable.
Inacceptable.
Totalement.
Reste à trouver comment résister pour les autres, ceux qui ne s’abonneront ni ne liront Charlie Hebdo, ceux qui se rendront à la manif, ceux qui n’iront pas.
Car voilà ce dont il s’agit :
résister à la terreur.
Là encore, une bataille de postures, je vous en prie, cessez d’avoir raison et de savoir comment s’assoir au-devant de la tempête. Donnons à chacun et tous le droit de s’indigner et de choisir le manteau qui habillera cette indignation.
L’humilité face à la condescendance, nous en avons besoin, plus que jamais.
Quand le chaos fait que la terre tremble, on ne donne pas de leçon, on écoute, et on prend la mesure de la détresse des siens.
Chacun doit pouvoir entendre que les armes de résistance sont multiples.
Moi, j’ai choisi de tenir ma ligne.
Je ne céderai pas à la peur. Je n’ai pas peur.
Je n’ai pas peur parce que je sais que la violence ne surgit pas comme ça de nulle part. Je sais que les conflits armés sont les enfants malades d’adultes avides de pouvoirs et experts en confusionnisme.
Je sais que quand on finance des guérillas sur différents points du globe, quand on arme des guerres, quand on fait du business de la mort un business fructueux, à un moment ou à un autre la Violence, elle vient frapper à notre porte. Je n’ai pas peur parce que c’est une erreur de croire que les violences médiatiques, verbales, sociales, économiques, militaires, politiques, policières, ne font pas de petits.
C’est une erreur de croire que les Violences sont stériles.
Elles ne le sont pas, elles enfantent.
Elles enfantent la mort.
Ceux qui, au sein de leur foyer, tiennent le discours selon lequel en manquant de respect à tel ou tel culte, quelque part, on mérite la mort, ceux-là sont le placenta dans lequel est déjà en train de grandir un fœtus de haine, et nos réseaux sociaux sont le liquide amniotique dans lequel baigne ce fœtus.
Et leurs enfants meurent déjà.
Ceux qui, au sein de leur foyer, tiennent le discours selon lequel un bon musulman est un musulman mort, ceux-là sont le placenta dans lequel est déjà en train de grandir un fœtus de haine, et nos réseaux sociaux sont le liquide amniotique dans lequel baigne ce fœtus.
Et leurs enfants meurent déjà aussi.
Parce que la Haine tue.
La Haine tue.
Toi qui insultes et commets des actes répréhensibles aux abords des lieux de culte Musulmans, ou toi qui te frottes les mains parce que les caricaturistes »l’avaient bien cherché », ne vous faites pas la guerre, non, vous êtes ensemble, vous vous retrouverez les uns et les autres, côte à côte, à la prochaine « manif pour tous. »
Chers frères et chères sœurs de lutte, il va falloir être fort, très fort…
Et surtout digne.
Très digne.
Quant aux autres, vous êtes à l’image que je me fais, quotidiennement, de vous : lâches, inconséquents, racistes, islamophobes, antisémites, condescendants et perdus. (Entre autres)

Ils se sont attaqués à un certain journalisme, ils voulaient, en tuant de sang-froid, faire disparaître un certain nombre de dessins et caricatures ? Vraiment ?
Ces dessins n’ont jamais autant circulé, les réseaux de partage des idées, des œuvres, ont énormément évolué, pour le meilleur et pour le pire d’ailleurs, mais c’est un fait.
Un carnage est organisé au siège d’un journal, mais le journal ne meurt pas, il est lu comme jamais.

On ne peut tuer ni un journal ni un poème, ni une chanson, ni un dessin.
La terreur, celle qui tue des hommes et des femmes pour faire entendre des soi-disant « causes », pour que se taisent des œuvres, cette terreur-là est un échec.
Dans vos gueules…

Paix
Amour
Lutte
Dignité
Tenue de route.

D’de Kabal 11/01/15///Article N° : 12695

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© Alex Lebon





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