L’Afrique, je ne connais pas… Ce n’est pour moi qu’un vaste chantier aux mains des médias dominants, un vaste chantier de fantasmes et de cauchemars que sèment ceux qui en tirent bons profits à répandre l’ignorance et la peur. L’Afrique que je ne connais pas, est minable au regard de l’occident, de ses 30 281 812 km2 de superficie elle ne pèse pas plus qu’un tas d’images de désinformation et de propagande, qu’un fumier d’images insultantes et moribondes… elle ne pèse rien, rien qu’un tombeau sourd de culpabilités englouties, détournées, violées, rien que le noir sarcasme des croque-morts en victimes vêtus… L’Afrique dont on entend parler, sonne le glas des immigrés qui fuient et chavirent sur les berges lointaines des passifs bourreaux, ou sombrent dans la violence des cités-prisons… Elle sonne le glas de toutes celles et ceux qui s’avancent, comme une foule de mouches asséchées devant le pot de miel inespéré, et s’empressent au pas des frontières verrouillées, murées, gardées par des armées de tape1tes sanguinaires, préservant leur merde immaculée… Mais les autres qui passent sentiront le souffle fétide des chiens de garde citoyens et le mépris qui cliquette entre leurs dents souillées de haines et de craintes inavouées. L’Afrique que je ne connais pas, ne pèse rien. Rien, si mes souvenirs sont bons, qu’un gramme de famine, quelques grains de riz, un kilo de charité, envoyés pour sauver les petits somaliens rachitiques, au ventre bombé de malnutrition. Qu’un soupir de haines tribales et sauvages, incompréhensibles, qui décime et nous susurre des noms étranges comme Tutsi et Bantou… Qu’une plainte du VIH purulent et diabolique qui foudroie par poignées la population noire pullulante… Qu’un écho de tam-tam qui rompt les rugissements sourds de la brousse et rythme des corps presque nus en effervescence autour du feu cérémoniel d’un village de paille et de terre battue. Qu’une poussière de sable du désert au détour d’un fameux parcours exotique pour loisir des riches nordistes motorisés, le Paris – Dakar. Qu’une résonance de désorganisation sociale, de corruption, de violence, de peuples barbares. Qu’une formule de sorcier pour prier le monde invisible, un petit grigri en guise d’amulette pour soulager les superstitions. Qu’un sentiment maladif d’un quotidien baigné de crasse, de précarité, de manque d’hygiène, de misère, de maladies fourmillantes, de mort
Qu’une page d’histoire dans les cahiers d’écoliers, sur l’Afrique colonisée et l’esclavage
l’Afrique sans histoire
L’Afrique dont nous entendons parler, n’entre pas dans les discussions de salon de thé
on chuchote son nom comme s’il fut prohibé, censuré par la conscience tourmentée des silencieux oppresseurs mondains
On préfère sans nuls doutes sacrifier quelques finances à la douce berceuse du projet « humanitaire » pour se racheter sans trop de remords, sans trop se causer de tort, une âme qui tienne un peu la route, au cas où arriverait un jour le soi-disant verdict final
L’Afrique dont on entend parler, n’a toujours pas de visage, elle est encore ce fantôme des ombres projetées par l’inconscient capitaliste et colonialiste qui exploite la vie et la mort, et se joue des phobies et des faiblesses, écrit et saigne son histoire assassine
L’Afrique que je ne connais pas, non elle ne pèse rien, rien qu’un tas d’ignominies, d’informations manipulées, mensongères, pour asseoir la main basse du pouvoir dominant et noyer dans l’ignorance la conscience politique des gens.
Je ne connais pas l’Afrique pour n’avoir jamais foulé son continent, mais il existe dans le cur de chacun quelque chose qui nous ressemble, quelque chose qui nous rassemble
et J’imagine, qu’une nuit, ici comme ailleurs, le soleil se lèvera pour incendier les prisons, les états, et les opprimés, les aliénés, se soulèveront pour conquérir leur Liberté et leur Autonomie
Ici comme ailleurs
puisque le même système nous avilit, celui de l’argent, du travail, du pouvoir
le capitalisme ne regarde l’humanité qu’avec le prisme meurtrier et dichotomique de l’exploitant exploité sans autres issues possibles que l’inégalité et la guerre des ressources et des hommes, sans limites
Mais ce jour viendra, où nous vaincrons avec la poésie que nous avons su respirer, puis cultiver ; celle des sourires et des mains tendues, celle des corps et des rythmes, des mots, celle qui nous a fait ouvrir les yeux sur le beau, sur les mers et les falaises, les fleuves et les plaines, les rivières et les vallées, les ruisseaux et les montagnes, les sources et les cimes
cheminant pas à pas vers la naissance d’une autre humanité
Ce jour viendra où la poésie de la Justice et de la Vérité ne sera plus un leurre, un refrain insensé, perdu, fourbe
Et du haut de ses 30 281 812 km2 de superficie, l’Afrique courbée pourra alors se redresser, lever les yeux et contempler l’horizon flamboyant des mille espoirs espérés.
///Article N° : 4000