Entre construction et destruction les corps nous tracent, dans Larmes Hadid du chorégraphe Walid Aouni, le chemin d’un urbanisme sans limite célébrant le génie du trait de Zaha Hadid, disparue en 2016. Présenté à l’Opéra du Caire les 6 et 7 mars derniers, Larmes Hadid voyage et s’installe au Pavillon Noir d’Aix en Provence les 28 et 29 mars.
Rendre hommage à une femme et à son travail architectural par la danse ? C’est le pari que s’est lancé le chorégraphe libanais Walid Aouni, figure majeure de la danse contemporaine au Moyen Orient.
Inspiré dans ses créations à la fois par l’artiste libanais protéiforme Khalil Gibran et le chorégraphe français Maurice Béjart avec lequel il a travaillé pendant 9 ans, Walid Aouni revient à l’Opéra du Caire après 7 ans d’absence, pour une coopération franco-égyptienne qui aborde les créations et les concepts de celle qu’on appela La Reine de la Courbe.
“Il n’y a pas de définitions a Zaha Hadid, pas de début pas de fin”
“Il n’y a pas de définitions à Zaha Hadid, pas de début pas de fin” nous révèle le chorégraphe Walid Aouni, et il ajoute “elle te donne la liberté totale comme la liberté qu’elle s’est donnée”.
Les constructions de Zaha Hadid révèlent une géométrie où les lignes sont énergiques et furieuses et les courbes expressives et brutales. Les danseurs témoignent de cette énergie frénétique et deviennent des matériaux coulant dans le béton révélant le bouillonnement de la construction. Les mouvements géométriques des danseurs bâtissent des édifices oniriques et épurés à la manière du coup de crayon de la Reine de la Courbe.
En filigrane, de discrètes touches orientales teintent la danse et lui donnent une dimension tout à fait unique. Un derviche tourneur aux mille reflets nous entraîne dans un autre univers et suit la diagonale des constructions hadidiennes.
Une marche funéraire aux allures de Rave
Le spectateur est plongé dans une rave gothique où le céleste se mêle au mortifère et où ses artisans sont laissés en liberté. La musique électronique appuie le mouvement linéaire et abrupt des danseurs, ouvriers mystiques d’une performance funeste. Dans Larmes Hadid, la danse devient un cri en même temps que la porte d’entrée à la force vitale. On est embarqué dans une procession angoissante qui nous emmène aux tréfonds de la folie créatrice.
La voix de Zaha Hadid nous berce tout au long de cette performance multi sensorielle et renforce la présence de l’architecte, comme si, de loin, elle observait cette ode.
La mort se mêle au béton. Les courbes du corps nous invitent à repenser la construction urbaine et réussit l’exploit de rendre hommage aux œuvres de l’architecte irakienne, Zaha Hadid, tout en témoignant de leurs éternités.