PUCK, revue de réflexion, de confluence et de confrontation de la marionnette et des autres arts, éditée par l’Institut International de la Marionnette (IIM), consacre son dernier numéro (18) aux Marionnettes en Afrique. C’est à l’occasion du 30e anniversaire de l’IIM et du 50e anniversaire du Festival mondial des théâtres de la marionnette (Charleville-Mézières, du 16 au 25 septembre 2011) que Lucile Bodson, directrice de l’IIM et Brunella Eruli, rédactrice en chef, ont présenté cette intéressante publication à la presse et au grand public.
27 auteurs ont contribué à ce numéro, pour rappeler les multiples significations et fonctions rituelles, religieuses, sociales et esthétiques de la marionnette « traditionnelle » et les « messages » éducatifs, sanitaires et politiques qu’elle peut véhiculer. Mais la revue s’ouvre aussi aux formes contemporaines de la marionnette, en prenant en considération les résistances, adaptations et transformations des pays africains dans les dernières décennies ainsi que les interrogations que se posent les acteurs marionnettistes d’aujourd’hui et les défis auxquels ils doivent faire face.
Comme le rappelle Martin Van der Belen, dans son article « Marionnettes en Afrique. Des origines aux défis d’aujourd’hui », l’univers de la marionnette en Afrique est extrêmement riche et complexe et connaît une longue histoire que certains font remonter jusqu’à l’époque pharaonique. Mais la modernité menace cet art qui peine souvent aujourd’hui à affirmer sa place à côté du théâtre, de la télévision, de l’internet et à trouver un espace d’expression où la marionnette, tout comme le masque, conserverait toute sa complexité et sa richesse. N’oublions pas, cependant, que cette déstructuration de la société africaine et les migrations, internes et externes, proposent aussi de nouveaux ressorts aux intrigues, génèrent des vocations inattendues et poussent les artistes vers de nouvelles expérimentations. Comme le souligne Massimo Schuster, le passage d’une marionnette traditionnelle, rituelle et intégrée au tissu social, notamment rural, à une marionnette « professionnelle », impliquant des échanges économiques, des tournées dans différents pays et une mutation radicale du rapport entre l’interprète et son public, peut générer de nouvelles potentialités, mais aussi engendrer une perte des connaissances, des significations profondes et des savoirs qui rendent vivant ce langage de la marionnette.
Pour Kossi Efoui, le mot marionnette renvoie au mot manipulation et de mise en scène. Et ces deux mots sont pour lui à la source de l’éruption du poème et du « geste d’écriture ». Cette « manipulation » du côté de la création poétique évoque l’acte de déboucher les horizons des mots, la démultiplication du sens et « la pose d’un point d’interrogation là où il y avait un sens unique ponctué par un point d’exclamation ». La création poétique, comme la marionnette, ouvre des espaces où on peut laisser voir et laisser entendre, des espaces qui constituent aussi des passerelles vers l’indicible.
La revue ne parle pas seulement de cette « reconstruction » de la marionnette en Afrique, à partir des traditions revisitées, de l’imagination, de l’interdisciplinarité, notamment avec le théâtre, la danse et les arts plastiques, mais aussi de la force de la marionnette comme outil pédagogique, de cohésion identitaire et de transformation sociale.
Signalons, enfin, que ce numéro de PUCK consacré aux marionnettes en Afrique, magnifiquement illustré, mêle constamment considérations historiques et culturelles plus théoriques avec des expériences concrètes et des démarches/trajectoires personnelles.
Site de l’Institut international de la marionnette [ici]
Site de l’Entretemps éditions [ici]///Article N° : 10416






