Sentiment parfois de l’étrange.
De naître, au réveil, à la vie.
De découvrir l’être et le monde pour la première fois. Comme un enfant
qui émerge de l’entredire de la nuit pour renouveler le pacte des
splendeurs et des épouvantes de l’inconnu.
Sentiment parfois de l’étrange.
Ainsi être dans l’observance de sa chair, sa peau, ses mains, ses
ligaments, ce lieu, de nuances et d’excès, qui scelle les aléas de la
conscience.
Sentiment parfois de l’étrange.
Procéder à l’énigme de l’autre.
D’où vient donc le désir, entre révulsion et fascination, quels sont
donc ces liens, puisés dans la demeure de l’invisible, qui nous
unissent et nous désavouent ?
Pourquoi est-ce que l’autre nous est nécessaire et nous renvoie,
presque toujours, aux enfers ?
Sentiment parfois de l’étrange.
D’être d’un autre temps, d’un autre langage, d’un autre savoir.
Paradoxe du réel, son intensité absolue, – la densité de la matière,
le canevas des couleurs, l’irraisonné de la souffrance -, et son
caractère irrémédiablement illusoire.
Rien n’est vrai mais tout existe, tout doit exister.
Sentiment parfois de l’étrange.
Entrer en musique, entrer en lecture, entrer en désir, boire à grandes
goulées les velléités de l’euphorie, instruire la contemplation, corps
à la dérive des infinis et savoir pourtant que la trace extrême sera
celle du tombeau.
Quel est donc cet arbitraire qui orchestre la jouissance et nous
sentence aux geôles de l’ossuaire ?
Sentiment de l’étrange. Parfois.
Et sans doute le poème est
pour désemparer ta folie et assermenter ses vux.
[email protected]///Article N° : 8389