« Une photo est réelle mais elle n’est pas vraie ! »

Entretien de Marian Nur Goni avec Harandane Dicko, Paris, août 2008

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Photographe malien Harandane Dicko, a animé à Aubervilliers en août 2008 un atelier photographique pour les habitants de la ville, initié par Afriphoto et trois associations basées à Aubervilliers (1). Rencontre avec le photographe qui évoque son parcours et revient sur ce projet.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Qu’est-ce qui vous a amené à la photographie ?
J’ai un oncle qui est photographe et qui est propriétaire de plusieurs studios photo à Bamako. Ainsi depuis 1993 j’ai appris le métier auprès de lui, comme tant d’autres photographes maliens qui travaillent dans les studios. C’est comme ça que je suis venu à la photographie. Mais au départ, je n’étais pas du tout intéressé car je ne voyais pas ce qui pouvait m’intéresser là-dedans : je passais mes journées dans un studio et je faisais des portraits des gens chaque jeudi et dimanche, les mariages etc. Pour moi cela n’était pas suffisant… Ce n’est qu’en 1999-2000, après avoir suivi un stage avec des élèves suisses de l’École de Vevey (NdR : CEPV – Centre d’Enseignement Professionnel de Vevey), encadré par un célèbre photographe qui s’appelle Luc Chessex, que j’ai appris que la photo allait bien au-delà de tout ce que je savais jusque-là, que c’était un médium qui me permettrait de m’exprimer d’une façon personnelle. Je me suis dit alors : « Il y a quelque chose à prendre dans la photographie ! ». C’est seulement à partir de ce moment-là que j’ai pris réellement conscience de l’utilité de la photo et de tout ce que je pouvais faire avec. Après ce premier stage, j’ai pu en effectuer un autre dans un journal suisse basé à Winterthur, en Suisse allemande, par la suite je suis rentré au CFP de Bamako (NdR : Cadre de promotion pour la Formation en Photographie) où j’ai suivi deux années de formation tout en continuant à participer à des stages lorsque j’en avais la possibilité.
Vous évoquez vos années de formation au CFP où vous occupez aujourd’hui le poste d’assistant technique. Quel est votre rôle dans cette institution ?
Au CFP nous nous consacrions au départ à la photographie argentique en noir et blanc, mais depuis deux ans nous nous sommes lancés dans le numérique : on m’a alors envoyé à l’École de Vevey pour parfaire mes connaissances du processus numérique.
Ainsi, on a pu créer un petit département numérique où l’on peut traiter les images mais également les imprimer car on a acquis un traceur qui nous permet de faire de grands tirages. Entre autres, je m’occupe de former des jeunes à Photoshop.
Pouvez-vous nous parler du contexte bamakois dans lequel vous vivez et travaillez. Que se passe t-il, à Bamako, prétendue capitale africaine de la photographie, entre deux biennales ?
Pour moi qui suis photographe, Bamako… En vérité, je ne vois vraiment pas en quoi elle serait capitale de la photographie africaine, parce que même s’il est vrai qu’il y a des photographes, et même des photographes talentueux et reconnus (et sûrement d’autres inconnus que j’ignore), la photographie en tant que médium artistique n’est pas du tout connue : c’est dommage mais c’est comme ça !
On compte sur les doigts de la main les photographes qui utilisent la photographie comme moyen artistique pour s’exprimer. Les Rencontres s’organisent tous les deux ans à Bamako, tout le monde vient, on fait la fête de la photo mais… ça s’arrête là, et après, à la limite, on oublie ! Je me rappelle qu’en 2005, entre les deux Rencontres il y a eu un masterclass mais cette fois-ci il n’y a rien eu du tout ! (Je veux dire, au plan international, panafricain, comme rencontre de photographes de la sous-région). Certes, il y a quelques expositions par-ci par-là mais pour moi, ce n’est vraiment pas ce à quoi on s’attend lorsque l’on dit « Bamako, capitale de la photographie ». Nommer une ville capitale d’une discipline signifie qu’elle a un rôle vraiment important à jouer, que c’est un endroit dynamique, mais ce n’est pas le cas de Bamako, hélas !
Quelles en sont les causes à votre avis ?
J’imputerais cela au manque de prise de conscience au niveau politique parce que les politiciens ne font rien pour promouvoir, pas seulement la photographie, mais les arts d’une façon générale… D’abord, il n’y a aucune politique pour encourager les artistes, deuxièmement il y a un manque de formation, du coup les personnes ne sont pas à la hauteur et n’ont, par là, aucune conscience de ce gâchis. Tous ces éléments réunis font que ça ne va pas !
Si les politiciens prenaient conscience de ces choses, ils encourageraient la promotion de ces disciplines et soutiendraient les structures qui sont sur places et qui s’occupent de la formation, et cela changerait beaucoup les choses…
Avant de parler des travaux qui vous occupent actuellement, pouvons-nous nous arrêter un moment sur les séries achevées, notamment celles très réussie, sur les moustiquaires (2) et celles qui ont suivi après ? Comment vous est venue l’idée d’aller accrocher des moustiquaires dans des lieux insolites ?
C’est lors d’un stage d’une journée animé par le photographe suisse Jean Reveillard (qui est devenu un ami), que nous avons utilisé des objets du quotidien comme la moustiquaire. À partir de là, je me suis dit : l’idée de la moustiquaire est tellement intéressante dans un pays comme le Mali mais aussi comme médium pour montrer des choses différemment… J’ai eu alors envie de continuer à l’utiliser dans mes photographies. Pendant une année je l’ai emmenée en voyage avec moi à travers le Mali et même dans d’autres villes africaines comme Niamey, Ouagadougou : je l’installais au gré du vent et les gens venaient poser juste dessous… L’objet suscitait une grande curiosité, imagine !… Tu débarques au marché de Bamako ou dans un autre lieu populaire de la ville et tu attaches quelque part ta moustiquaire, tu as un appareil photo avec toi… De suite des personnes viennent te demander ce que tu fais, ce que tu veux faire ! C’est comme ça que j’ai pris les photos de cette série, certains prenaient ça comme un jeu pour s’amuser, pour blaguer comme on dit chez nous ! Par contre, pour la position, la pose, c’est moi qui orchestrais car je savais exactement ce que je voulais montrer !
Par la suite j’ai eu l’occasion d’effectuer une résidence à Berne où j’ai travaillé pendant un mois et demi sur les gares suisses, un travail inachevé à ce jour, et que j’aurais envie de continuer en Afrique, notamment sur le train qui relie Bamako à Dakar, un projet ambitieux que je n’ai pas encore eu le temps de réaliser… Avec mon emploi du temps chargé au CFP, je ne peux travailler mes projets personnels que le dimanche et du coup, pas mal de ceux-ci restent en suspens.
Ensuite, j’ai commencé la série sur les lieux désaffectés à Bamako, « Désaffections urbaines ». J’ai travaillé au Lido (une ancienne usine de fabrication d’eau minérale rachetée par un Libanais, aujourd’hui à l’abandon, un endroit très beau), dans les dépôts, la briqueterie. Cette idée de photographier ces lieux abandonnés m’est venue à Genève justement, lorsque j’ai visité des friches réinvesties par des artistes. J’ai eu envie de photographier des voitures, des graffitis qui étaient là : du point de vue graphique, c’était beau ! Voilà comment j’ai commencé à photographier à Bamako ces lieux qui n’intéressent personne et où l’on trouve des espaces remarquables. Par la suite, il y a eu l’édition 2007 des Rencontres dont le thème de l’expo internationale portait sur la ville et au-delà. Je me suis dit alors que c’était un sujet que je pouvais approfondir… Ça fait plus d’un an que j’ai commencé ce travail mais, à vrai dire, je n’en ai jamais été vraiment satisfait, il m’a toujours semblé qu’il manquait quelque chose et que ce que je montrais n’était pas exactement ce que je voulais exprimer. C’est seulement pendant cette résidence à Paris que j’ai eu enfin le déclic…
Justement, parlons-en de cette résidence parisienne !
C’est une résidence que j’ai obtenue grâce à CulturesFrance, et notamment via le programme « Visas pour la création ». Ainsi, je suis pour trois mois à la Cité des Arts, à Paris, pour continuer d’explorer cette série sur les lieux à l’abandon de la capitale et sa banlieue.
Vous avez parlé de déclic lors de votre résidence parisienne. En quoi pensez-vous avoir trouvé les clefs pour débloquer votre insatisfaction vis-à-vis du travail entamé ?
Je suis un photographe qui aime photographier tout ce qui est beau, mais surtout tout ce qui représente quelque chose pour moi. Le sujet sur lequel je travaille a été abordé par des milliers de photographes, je me devais de trouver la voie pour me démarquer car je ne veux pas me limiter à photographier quelque chose qui est beau, faire des belles photos etc. La beauté formelle des choses, c’est une coquille vide, ça manque de sens pour moi. Du coup, je réfléchissais sur ce quelque chose qui manquait et qui m’échappait… J’ai trouvé à Pantin une ancienne usine de quatre ou cinq étages complètement à l’abandon, j’étais seul… Cela m’a amené à m’interroger sur ma propre personne : qui suis-je, qu’est-ce que je cherche là, quel est mon rapport avec ces lieux ? Je suis là car je viens faire des photos, certes, mais quel lien j’entretiens véritablement avec ces lieux ? Il n’y a personne, je peux faire tout ce que je veux… Est-ce que ce n’est pas là, pour moi, le moment de me montrer comme je me souhaite (car les photos que j’ai de moi ont toujours été prises par d’autres personnes) dans des postures qui me sont inhabituelles ? J’ai alors compris que ces lieux n’étaient pour moi que des décors et j’ai commencé à penser à des autoportraits, d’abord des nus. Mais une photographie d’une personne représente pour moi également un environnement, une éducation, une culture et pour ma part, j’ai bénéficié d’une éducation qui ne me permet aucunement d’être vu nu… Je me suis alors posé plein de questions ! Je me suis dit : si j’ai envie de me voir nu, je m’en fous du regard des autres ! Justement, c’est marrant car je reviens d’Arles où j’ai vu plein de photographies de modèles nus… mais ce n’est pas comme ça finalement que je veux me montrer, même si, à travers ce travail, je redécouvre, d’une certaine façon, mon corps.
Pourquoi choisir de se photographier dans des postures inhabituelles ? C’est une sorte de libération, un moment de liberté le temps d’une pose ?
C’est une façon de me découvrir moi-même, comme si je me regardais dans un miroir…
Une façon de vous donner l’opportunité de vivre autre chose ?
Oui, d’être Autre, dans un autre monde pendant un moment… Je me photographie dans mon intimité, dans ma chambre où je ne suis ni pressé ni stressé par le fait d’être surpris par un inconnu, j’utilise des fonds neutres… En effet, j’ai essayé de me photographier directement sur les lieux en question mais avec la crainte permanente de voir quelqu’un « débouler », je ne me sentais pas vraiment à l’aise !
Dans les lieux abandonnés, je ne bouge rien et je prends la lumière telle qu’elle est, ces lieux sont comme des studios, des décors. Comme je travaille en numérique, je fusionne ensuite ces photographies avec les autoportraits, j’utilise la couleur de ces lieux et celle de ma peau pour qu’il y ait une sorte d’harmonie.
En quelque sorte, je reviens à l’école malienne du portrait…
Quelle importance revêt la technique, la question du matériel photographique dans votre travail ?
Je ne me vante pas mais j’ai le minimum qu’il faut à un photographe pour travailler. Cela dit, tu as beau avoir le meilleur matériel, si tu n’as pas les bonnes idées, le bon regard, tu ne feras jamais un travail intéressant. Pour moi, ce qui est important dans une photo, ce n’est pas le processus qui a amené l’auteur de « a » à « z » pour la réaliser, mais ce qu’il a voulu nous montrer, et ce qui m’intéresse c’est le résultat et non pas le procédé. C’est pour cela que je ne m’aventure pas sur les discours sur l’argentique, le numérique, non ! C’est la vision du photographe qui m’intéresse.
Vous avez réalisé le travail sur les moustiquaires en noir et blanc, celui sur les lieux désaffectés est en couleur. Quels choix esthétiques président à cela ?
Il y a des choix esthétiques qui amènent le photographe à choisir le noir et blanc ou la couleur selon le sujet. Pour les moustiquaires, j’en ai utilisé des blanches, tandis que les gens que je photographie sont noirs, j’ai trouvé que la moustiquaire blanche, avec la peau noire donnait une texture intéressante en noir et blanc. Pour les lieux désaffectés, j’ai choisi la couleur parce qu’il n’y a pas beaucoup de lumière, les couleurs défraîchies qu’on y trouve sont belles, il y a plein de détails que tu peux montrer par la couleur et qui seraient moins intéressants en noir et blanc.
Au-delà de ces questions formelles, il faut considérer aussi l’aspect pratique : pour un photographe qui vit en Afrique, faire de la photo argentique et couleur c’est quasiment impossible. À Bamako, il n’y a pas un seul laboratoire qui fait un bon développement couleur, nous sommes alors obligés d’envoyer nos négatifs en Europe ! Aussi, sur le marché malien, on ne trouve pas de films professionnels couleur, du coup il y a des contraintes pratiques qui me poussent à travailler majoritairement en noir et blanc. De plus, comme je travaille au CFP, je peux développer moi-même mes films, faire des planches contacts, des tirages de lectures, des scans… Ces éléments sont alors déterminants pour mes choix !
Revenons à votre séjour en France : nous vivons dans une société qui, malgré son côté multiculturel et cosmopolite, demeure encore assez cloisonnée. L’enjeu de l’atelier que vous avez récemment animé à Aubervilliers était d’essayer de montrer autre chose de ces territoires périphériques, créer des ponts pour que les barrières mentales que nous érigions, immergés comme nous sommes dans des flux d’images parfois réductrices, puissent tomber, et qu’enfin des rencontres soient possibles entre des personnes d’horizons différents… Nous avons travaillé en banlieue parisienne mais l’image du continent africain souffre également de représentations négatives liées à son histoire passée et présente. Vous êtes photographe, né au Mali : est-ce que ces questions des représentations vous travaillent lorsque vous photographiez en Afrique ?
Oui, cette question des représentations entre tout le temps en compte. Par exemple, lorsque je suis en Afrique, je sais qu’il y a des choses que l’on ne photographie pas, parce qu’il y a telle ou telle mentalité par rapport à telle chose… Alors que quelqu’un qui vient d’ailleurs, et qui ne connaît pas ces interdits, va peut-être les photographier. Ces représentations culturelles agissent alors dans l’acte de photographier (ou pas). Au sujet de ces clichés que les occidentaux peuvent avoir de notre continent, ils ne m’appartiennent pas ! Je vis en Afrique et je sais qu’il n’y a pas que la misère et la pauvreté chez nous. À mon avis, cette question se pose plus lorsque l’on intègre un milieu qui nous est étranger, c’est à ce moment-là que des représentations données peuvent jouer un rôle.
Au-delà de toutes ces questions, j’ai une logique très précise dans la tête : pour moi une photographie n’est jamais vraie. Elle représente en permanence la façon dont le photographe veut montrer les choses, du coup, je ne crois jamais à une photographie ! Je regarde une photo et, derrière, c’est le photographe que je vois de suite. Ainsi, quand quelqu’un me dit : « cette photo a été truquée », pour moi cela ne veut rien dire. Par exemple, si je décide de vous prendre en photo, ce portrait ne sera jamais vraiment vous, ce sera l’une parmi les mille façons de vous représenter.
Une photo est réelle mais elle n’est pas vraie !
Dans le photojournalisme aussi, il y a ce même problème, le photographe cadre à sa manière et ensuite il y a une demande ou un choix final de la rédaction pour montrer la chose.
Il y a une photo d’Avedon que j’aime beaucoup où l’on voit un homme recouvert de milliers d’abeilles. J’ai regardé un film sur ce photographe où il explique comment il a réalisé cette photo : pour trouver la personne qui accepte de se faire photographier ainsi, il passe une annonce dans un journal, finalement il trouve la personne mais… celle-ci a une peur bleue des abeilles ! Avedon lui explique comment la photo sera prise (il sera recouvert d’une colle spéciale) mais le modèle a tellement peur de cette myriade d’abeilles sur son corps, que ses jambes se mettent à trembler ! Lorsque l’on regarde la photo en question, on voit un homme très naturel, et tu te dis « ce monsieur est trop fort, comment fait-il avec toutes ces abeilles sur lui ? ! ». Cela pour dire que si on ne fait pas attention, on fait un raccourci immédiat entre le réel et la représentation de la chose donnée sur la photographie, alors qu’une photographie, c’est une mise en scène, et là il y a l’art du photographe.
Comment avez-vous vécu l’aventure de l’atelier d’Aubervilliers ?
C’est d’abord une expérience nouvelle pour moi, ça change complètement mes habitudes, parce que lorsque j’anime des ateliers au Mali, j’ai affaire à des personnes qui n’ont jamais fait de la photographie, je leur apprends alors le b.a.ba de cet art. Par contre, dans cet atelier j’ai eu l’énorme plaisir de rencontrer des personnes qui enseignent les arts plastiques, qui ont fait les Beaux-Arts ou des études assez poussées et aussi des photographes qui ont eu envie de découvrir comment je travaille et partager mon expérience, construire une démarche pour aboutir à quelque chose ensemble. Je trouve cela formidable ! C’est une expérience assez exceptionnelle pour moi !
Nous ne sommes qu’à la moitié de l’aventure. Je pense que nous allons aboutir à quelque chose. J’ai vraiment confiance.
C’est votre premier séjour à Paris, vous commencez à découvrir également Aubervilliers, et quelques autres villes de banlieue pour votre projet de résidence… Comment ressentez-vous les choses lorsque vous vous baladez dans ces territoires ?
Il y a tellement de clichés sur ces villes ! Je me rappelle que pendant les émeutes de 2005, j’étais à Genève, je regardais la télé, on y voyait les véhicules brûlés, les violences… Mais au-delà de ça, même à Bamako, on apprend ces stéréotypes : la banlieue, c’est dangereux, ce sont des lieux à craindre où l’on peut se faire agresser… Et même depuis que je suis là, il y a eu des gens qui m’ont dit : ne va pas là-bas avec ton matériel, tu risques d’avoir des ennuis… Comme je travaille sur les lieux désaffectés, je me balade souvent dans ces villes, et je peux vous garantir que je n’ai pas ressenti à un seul moment ces impressions que l’on m’a laissé entendre ! À ma grande surprise, j’ai rencontré des gens très sympas et jusque-là, je n’ai pas eu de problèmes ! Est-ce parce que je suis noir ? ! En effet, je me suis rendu compte que ces villes sont majoritairement habitées par des minorités telles que les Maghrébins, les Africains, les Asiatiques. Au Fort d’Aubervilliers par exemple, je me suis cru un instant dans une ville du Maghreb !
À vous entendre, tout semble très bien se passer, tant mieux ! Avez-vous rencontré des difficultés dans la mise en place de votre travail ici ?
Oui, j’ai débarqué avec mon équipement argentique, un boîtier Hasselblad 6×6 et un autre moyen format 6×9 – j’avais vraiment envie de travailler en argentique pendant ma résidence. Cependant, j’ai fait rapidement un petit calcul par rapport au nombre de films à utiliser pour mon projet : à peu près une centaine car, dans une bobine 6×9, il n’y a que huit vues, donc cent bobines, pour trois mois, c’est vraiment le minimum ! L’achat de chaque bobine revient à 7,5 euros environ, je dois aussi les développer et faire des planches-contact et scans, cela revient à environ 16 euros en moyenne, chaque film me coûtera au final 23 euros, alors que j’ai un budget en tout et pour tout de 5000 ! Une fois retirés les frais de voyage, je ne suis arrivé à Paris qu’avec 3000 euros à peu près… Et sur ce budget, je dois vivre pendant trois mois ! Ainsi, du point de vue pratique, je suis dans l’impossibilité de travailler en argentique… Heureusement pour moi, j’avais amené à tout hasard un boîtier numérique. Du coup, malgré mes souhaits de départ, je peux travailler tout de même… On me disait souvent que l’argentique était cher, mais je n’avais pas encore mesuré cela de visu ! Et je suis sûr qu’il y a des gens en Afrique qui ne sont pas encore au courant ! À Bamako, je fais moi-même les développements et les tirages et lorsque je suis venu en résidence, on m’a tout le temps donné des films. J’ai tout de même un bon appareil, un Canon EOS professionnel, et pour l’instant je suis satisfait du résultat !

1. Cette série est publiée dans les Carnets de la création, aux Éditions de l’œil.
2. « Aubervilliers, portraits sensibles », un projet porté par Africultures / Afriphoto, en partenariat avec Ethnoart, Achromatik et la Villa Mais d’Ici. L’atelier photographique à destination des habitants de la ville d’Aubervilliers s’est déroulé du 11 au 28 août 2008.
Une restitution publique de l’atelier avec la projection des photographies de Hamed Askari, Catherine Gil Alcala, Faouzia Louchard, Said Nemsi, Michel Pichon, Diana Ramin,
Vincent Rioux, Rémi Romeder et Eriola Yanhoui aura lieu à Aubervilliers le 6 septembre 2008 à la Villa Médicis, 77 rue des Cités. Cf. la page d’accueil du site d’Africultures pour en savoir plus///Article N° : 8060

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Série "La moustiquaire de Bamako"
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Série "Désaffections urbaines"
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