[VIDEO] Ayobami Adébayo, une écrivaine à suivre

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Ayobami Adébayo est née à Lagos, cette jeune autrice est déjà comparée à Chimamanda Ngozi Adichie. Son premier roman, Reste avec moi, a été traduit de l’anglais en 18 langues et salué par de nombreux prix littéraires. Elle est incontestablement une écrivaine à suivre.

Reste avec moi est un roman sur le désir d’enfant. Son héroine, Yejide vit un mariage heureux et amoureux avec Akin, mais leur ciel s’assombrit alors qu’elle ne réussit pas à tomber enceinte. Le couple consulte plusieurs spécialistes, Yejide est accusée d’infertilité et leur monde s’effondre a mesure que la pression sociale et familiale augmente. Cette quête d’enfant, ce désir de « faire famille » avec l’homme qu’elle aime – et qui l’aime en retour – dessine en creux la pression sociale et familiale qui existe dans une société nigériane, où les attentes auprès des individus sont très fortes. Comment être une femme ? Un homme ? Qu’est ce qu’être parent ? Toutes ces questions sont posées par un récit puissant.

La relation à la famille mais aussi les épreuves de la vie forment le nœud du roman : comment ce dont on hérite nous façonne ?. Qu’est ce qui fait de nous la personne que nous sommes ? Comme lorsque la narratrice évoque ce souvenir d’enfance, elle qui a perdu sa mère à la naissance :

« Quand j’étais petite et qu’il était l’heure d’aller au lit, mes belles-mères racontaient des histoires à leurs enfants. Mais toujours derrière des portes fermées à double tour. Jamais je n’étais invitée à les écouter. Aussi, tous les soirs je rôdais dans le couloir, allant de porte en porte à la recherche de la voix la plus forte. Je me consolais en me disant que, puisque je n’avais pas de mère, je pouvais choisir l’histoire que je voulais, Si l’une d’elles me déplaisait, il me suffisait de passer à la porte suivante. Je n’étais pas prisonnière, contrairement à mes demis frères et sœurs. J’étais libre. »

Il est difficile d’évoquer l’intrigue de « Reste avec moi » sans révéler les nombreuses péripéties qui en font la saveur. Les personnages principaux et leur famille n’hésiteront pas à avoir recours à toutes sortes de procédés pour faire venir l’enfant qui ne vient pas. Et ce, même en mettant en péril l’amour d’Akin et Yejide, dont la douleur la rapproche parfois d’un état proche la folie. Dans l’un de ces moments l’héroine abandonne ses certitudes rationnelles pour aller voir un vieux sorcier d’ordinaire consulté par sa belle-mère. La sorcellerie est une question traitée avec finesse et qui est mêlée à un autre enjeu : le clivage entre les différentes générations. Le couple se rencontre à la fin des années 80. Ils s’opposent à la génération précédente sur des sujets comme le rapport à la tradition, les mœurs, notamment la polygamie. C’est ce qui fait que Reste avec moi est un grand roman : il entremêle la petite histoire et la grande histoire. Tandis que Yejide et Akin traversent leurs épreuves, le Nigéria change : les mœurs évoluent, les coups d’états se succèdent. La vie politique mouvementée du pays revient souvent dans les conversations des deux époux et est d’ailleurs commentée tout au long de l’intrigue.

Car ce roman à tiroir joue avec les codes narratifs. L’écrivaine maitrise parfaitement l’écriture, les jeux d’allers-retours entre les différents personnages, différentes temporalités, différents lieux et cela produit une excellente intrigue, qui prend le lecteur et donne envie de lire le roman d’un seul souffle, pour en connaître l’issue.

 

 


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