#5 Les fêtes des Reinados – Les rites de l’Afrique au Brésil contemporain

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Fenêtre n° 5 - Relations Afrique/Brésil, volet 1 : "traces noires" au Brésil
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Les liens entre le Brésil et l’Afrique ont été très étroits pendant des
siècles, tant que le Brésil était sous colonisation Portugaise : à titre
l’exemple, 100 % des exportations angolaises (hommes et biens) partaient vers le Brésil. À partir de 1822, suite à son indépendance, le Brésil se rêve comme une nation blanche et met complètement de côté ses racines africaines. En 1996 est instaurée la loi 10639, qui rend obligatoire l’enseignement de l’histoire et de la culture afro-brésilienne dans les écoles du pays. Le Brésil est-il enfin réconcilié avec sa partie « noire » aujourd’hui ?
Nos « fenêtres lusophones » des mois de mai et juin explorent les relations passées et présentes du Brésil et de l’Afrique, à travers une première sur les traces noires au Brésil, et une seconde sur les relations actuelles du « géant brésilien » avec le continent africain.

La première commémoration de l’abolition de l’esclavage s’est déroulée le 13 mai 1988 au Brésil. Aujourd’hui, cette date est toujours célébrée par les communautés afro-descendantes, dont les dévots à Notre Dame du Rosaire font partie. Appelés congadeiros, ou  » fils du Rosaire « , les dévots, danseurs et musiciens, organisent une fête pour remémorer l’époque de l’esclavage et en même temps rendre hommage aux ancêtres, autour d’une célébration qui reflète les enjeux socioculturels des Noirs dans le Brésil contemporain.

En ce concerne la nomenclature, on a désigné comme Congado ou Congada l’ensemble des manifestations d’adoration à Notre-Dame du Rosaire, quels que soient le style musical, les vêtements et les instruments. Congado peut désigner un groupe ayant des rituels spécifiques et en même temps, le terme peut englober divers autres groupes qui font partie des Reinados, qui sont des Royaumes, ou Fraternités de Notre Dame du Rosaire. À l’intérieur d’un Reinado, existent diverses formes d’expression, appelées par Saul Martins (1988)  » famille de sept frères  » : Mozambique, Congado (ou Congo), Catupé, Marujo, Caboclinho, Vilão et Cavaleiro de São Jorge. Bien qu’elles se ressemblent et se mêlent dans une ambiance festive, chaque  » ligne  » possède des instruments, des vêtements et principalement un rituel qui lui est propre – car chaque groupe a une fonction dans le cycle de la fête, qui va au-delà de l’aspect visuel et commémoratif. L’ensemble des  » sept frères  » constituent un Reinado.
Les congadeiros se réunissent dans les Reinados, qui sont à l’image des Royaumes africains. Chaque Reinado possède son propre calendrier festif. Dans le Reinado Treze de Maio, localisé à Belo Horizonte, Minas Gerais, la fête se déroule du premier au 13 mai de chaque année, période au cours de laquelle le groupe réalise un ensemble de rituels ancestraux, invitant la communauté locale à rentrer dans une ambiance onirique de couleurs, chants, bruits, chorégraphies, prières et gaieté, qui évoque des traditions si distantes, venues de l’Afrique, et aussi si récentes, recréées au Brésil, dans le contexte de valorisation des identités migratoires.
Dans ce premier article on va analyser les racines de cette célébration ancestrale, qui, dans la période de l’esclavage, s’est propagé dans tout le pays, spécialement au Minas Gerais, région où se concentrent aujourd’hui beaucoup de Reinados. Nous montrerons aussi les différentes formes de cette manifestation qui fait vivre ces traditions afro-descendants au Brésil.

L’influence du catholicisme en Afrique
Avant la découverte du Brésil en 1500, les Portugais avaient déjà effectué le trafic d’environ 150.000 esclaves noirs de la côte occidentale africaine, qui allait du fleuve Sénégal au fleuve Zaïre au Congo, et des archipels du Cap-Vert et de São Tomé-et-Principe (Tinhorão, 2008, p.15). Entre 1500 et 1870, ce sont près de 10 millions d’Africains qui ont été transportés comme esclaves vers les Amériques. (Souza, 2006, p.116). D’un point de vue historique quelles étaient les  » nations  » africaines lors de l’arrivée des premiers colons portugais ? Prenons l’exemple du Congo :

 » Quand Diogo Cão est parvenu à l’embouchure du fleuve Zaïre en 1483 et est entré en contact pour la première fois avec le mani Soyo, chef de la localité où il avait débarqué, parmi les plus puissants et faisant partie de la plus solide et respectée lignée de chefs, le Congo était un royaume relativement fort et structuré. Formé de groupes bantous, il s’étendait sur une grande part de l’Afrique centre-ouest et se composait de diverses provinces. Quelques unes de celles-ci, comme celles de Soyo, Mbata, Wandu et Nkusu, étaient administrées par des membres de lignées implantées dans la région qui détenaient les charges de chef depuis plusieurs générations. D’autres provinces étaient administrées par des chefs choisis par le roi et par la noblesse qui l’entourait dans la capitale (1) « . (Ibid., p.46).

Le commerce de biens et produits s’est développé avec l’arrivée des Portugais, qui étaient intéressés tant par les marchandises que par les esclaves, ainsi que par le contrôle des mines.
En 1487, deux ans après le premier voyage de Diogo Cão, envoyé de D. João II, en Afrique, le roi du Portugal a demandé que soient amenés en Europe deux prisonniers congolais qui ont alors appris la langue portugaise, les coutumes et la religion du vieux continent. (Ibid. p.52). De retour dans leur pays d’origine, ces Congolais ont gagné en prestige et ont influencé les dirigeants de leur peuple, qui se sont montrés intéressés à recevoir les mêmes privilèges.
Les Portugais leur ont apporté des bibelots comme cadeau et sont venus accompagnés de religieux chargés de la catéchisation, et de travailleurs spécialisés dans la recherche de pierres précieuses. La rencontre entre les Congolais et les Portugais a donné lieu à une fête. Lors de cette fête, les Africains célébraient les entités religieuses de leurs univers, comme Nzambi Mpungu, le dieu qui représente tout, les eaux, le ciel, la terre, les vivants et les morts – une figure religieuse glorifiée aujourd’hui par les groupes d’origine africaine. Mais, pendant et après les festivités, les Portugais brûlaient les images qui faisaient référence au culte africain, détruisaient les temples  » païens « , et prononçaient des sermons contre l’idolâtrie et la superstition des Congolais. Ce fait nous montre que, depuis les premiers contacts avec les Africains, les Portugais ont essayé de supprimer les divinités africaines du rituel festif, tel qu’il était traditionnellement.
L’influence de la religion européenne s’est frayée un chemin dans la mesure où la conversion était associée au pouvoir. Celui qui se faisait baptiser accédait à des prestiges offerts par la couronne portugaise, de même qu’à un affermissement spirituel. Les objets et rites catholiques ont été interprétés et incorporés à ceux existants, jouant le rôle d’une protection et d’un pouvoir mystique supplémentaires.
Mais l’incorporation du catholicisme était étroitement liée aux avantages donnés par l’acquisition de connaissances et l’utilisation de mécanismes techniques. Elle était un instrument qui, soit servait l’esprit, soit servait le pouvoir. Quant aux visiteurs portugais, ils méconnaissaient la cosmogonie des Africains, et ne s’intéressaient pas à elle. Mais, même ainsi, leurs missions de conversion ont été couronnées de succès en Afrique, et particulièrement au Congo.
Grâce à la propagation du catholicisme en Afrique, diverses églises de Notre Dame du Rosaire ont été construites, principalement au Cap-Vert, au Congo, en Angola, en Guinée et plus tard au Mozambique. La première Fraternité des hommes noirs en Afrique date de 1526 : « À la demande des hommes noirs libres, le roi du Portugal a autorisé la fondation de la Confrérie dans l’île de São Tomé » (Poel, 2013, p.528). Il est possible que les confréries de Notre Dame du Rosaire des Hommes Noirs telles qu’elles ont été développées au Brésil, soient venues d’Afrique, et elles sont à l’origine de la Fête du Rosaire qu’on voit aujourd’hui.
Origine des fêtes de Notre-Dame du Rosaire et leurs différentes formes d’expression

De la brève présentation de ce qu’a été la relation entre les Portugais et les Congolais, nous voulons souligner que l’existence de rois africains est antérieure aux célébrations de couronnement de noirs, que l’on appelle au Brésil les Fêtes du Reinado, ou Congado. Ces fêtes incluent des rituels venus d’Afrique, ayant des significations spécifiques et complexes, qui ont été d’une certaine façon reconstituées et copiées dans un contexte festif. Tout en considérant que ces rituels avaient été, avant même d’exister au Brésil, influencés par le catholicisme européen.
La découverte du Brésil par les Européens coïncide avec le moment où l’Église catholique est confrontée à la Réforme. Pour réagir à l’avancée du protestantisme, le pape Paul III a convoqué en 1545 le concile de Trente, qui a lancé les bases d’un mouvement réformiste. Parmi les changements prévus par l’Église, figurait l’interdiction de toute forme d’incitation au profane dans les arts, dans la littérature et dans la vie sociale, et, au contraire, l’incitation à la profusion des catéchèses et à la création des ordres religieux.
Sur le plan artistique, naît le baroque, particulièrement développé dans le Minas Gerais, au Brésil. Le baroque recrée la musique sacrée, en lui apportant de nouveaux instruments. Dans ce contexte de foisonnement des arts et de contrôle religieux, les Fraternités noires s’installent dans le Minas Gerais,  » apportant de l’Afrique la « catéchèse syncrétique des Dominicains », rythmant de leurs tambours sacrés la lamentation d’un peuple qui a fait du pleur l’occasion d’un nouveau cantique, car il est de la sagesse des peuples africains (…) » (2) « , (Barbosa, 2008).
Les premières mentions des Fêtes de Notre Dame du Rosaire à Minas datent de 1711, quand les esclaves noirs ont élu leurs rois, reines et juges, lors d’une célébration en hommage à Notre Dame du Rosaire, qui a eu lieu au sein d’une fraternité religieuse.
Les fraternités faisaient, donc, le lien entre les groupes et les capitaineries, par le biais de la religion. Les esclaves évangélisés par les Dominicains pouvaient faire partie de ces groupes auxquels était permis le culte de Notre Dame du Rosaire, et où ils pratiquaient aussi des rituels africains (comme celui du couronnement des rois et des reines). Avec les tensions et l’insécurité qui régnaient lors de la création de la société brésilienne, les Nations se sont organisées autour des Fraternités, qui étaient contrôlées par les maîtres au service de l’évangélisation et du maintien de l’ordre.
Si d’un côté, les Fraternités étaient un système de contrôle des capitaineries, d’un autre côté, elles étaient le moyen pour les Noirs d’incarner des aspects de leur propre culture, assimilant des valeurs étrangères à leur réalité, réinterprétant ainsi le catholicisme, à travers leur propre vision du monde. Au-delà de célébrer la dévotion à Notre Dame du Rosaire, les membres des fraternités justifiaient leurs rencontres dans les rues et pouvaient faire usage de leurs instruments de percussion, danser et chanter sous le prétexte des fêtes religieuses.
 » La voix des tambours, interdite à l’intérieur des églises, retentissait dans les rues, exprimant à leur façon les invocations aux saints de l’hagiographie catholique prenant d’autres significations, portant en elles la conception mythique qui renvoyait au murmure intime des ancêtres (3)  » (Gomes, Pereira, 1998, p.92).

La thématique des fêtes est essentiellement la dévotion aux saints (principalement Notre Dame du Rosaire, Saint Benoît et Sainte Iphigénie (4)), mais il y a aussi des chants et des danses qui renvoient aux guerres ethniques, suggérant d’ailleurs d’autres origines possibles de cette fête. Selon le folkloriste Alceu Maynard Araújo (1959, p.12),  » les études des événements du passé, des chansons de geste, montrent que la Congada n’est pas d’origine africaine, mais qu’elle serait une réminiscence de la Chanson de Roland (5) ».
Bien que l’origine de cette histoire admette des hypothèses différentes, celle qui est la mieux acceptée par les chercheurs et les propres groupes est liée à la construction des nations africaines au Brésil et à leur relation avec les fraternités religieuses. Le folkloriste Mário de Andrade, dans  » Les Danses dramatiques du Brésil  » (1982), a donné le nom de  » Congo  » aux danses dramatiques d’origine africaine, lesquelles perpétuent les coutumes et les actes de la vie tribale. Il les décrit comme accompagnant un roi noir, avec un défilé de danses et de chants, qui faisaient allusion aux pratiques religieuses, aux travaux, aux guerres et aux fêtes de la collectivité. En outre, il a identifié deux lieux de rencontre des Congos : au centre du Brésil et dans le Nord-Est (où les Maracatus représentent les Congos primitifs).
Luis da Câmara Cascudo (1988), dans son Dictionnaire du folklore brésilien, a donné à l’entrée  » congadas  » la définition suivante :  » Actes populaires brésiliens, d’inspiration africaine, représentés au nord, au centre et au sud du pays « . L’auteur date la première célébration du couronnement d’un roi du congo (qui, selon lui, compose un des éléments de la formation des congadas) en 1674, dans l’église de Notre Dame du Rosaire, à Recife. La présence de Notre Dame du Rosaire, de Sainte Iphigénie, de Saint Benoît et de Saint Antoine, comme saints des Noirs, est signalée dans cette entrée du dictionnaire du folkloriste.
Les fêtes religieuses dont font partie les Congos et Congadas peuvent avoir aussi pris des dénominations de divertissements (fête du bœuf, pastorale, quadrille, fête du couronnement des rois, danse des tapuias et maculelê), mais dans ce cas les folkloristes les distinguent des saynètes quant à leur existence, leur préservation et leur socialisation :

 » La saynète est du théâtre populaire, y compris des représentations religieuses ; le divertissement est un mélange de danse et de représentation théâtrale. […] Vicente Salles explique :  » Par rapport aux divertissements traditionnels, on met en évidence ce qu’on appelle les groupes populaires, responsables de leur préservation et de leur protection. On sait que les divertissements ne réussissent à survivre que s’ils sont préservés par ces groupes solidaires, socialement et culturellement. Bien que toute la société puisse se servir de telle ou telle forme de divertissement traditionnel, et que la théorie du folklore certifie que les événements folkloriques sont communs à toute société, seules les couches populaires, toutefois, sont capables d’intégrer les divertissements à leur vie quotidienne (6)  » (Poel, 2013, p.436).

Dans le  Dictionnaire de la religiosité populaire (2013), le frère Francisco Van der Poel donne les conceptions les plus modernes de la définition du Congado :  » Nom générique pour les groupes qui célèbrent Notre Dame du Rosaire des hommes noirs et/ou Saint Benoît  » (Ibid, p. 242). Le Congado fait partie d’une  » Fraternité de Notre Dame du Rosaire des hommes noirs « , qui réunit des frères et des dévots, qui organisent des fêtes et louent le rosaire de Marie.
Quant à l’origine des fêtes du Congado, nous voyons qu’elles sont clairement associées à l’idée de nations, créée par les Européens. Le nom  » Congado  » est une allusion au groupe ethnique du Congo, qui s’est réuni au Brésil. Bien que l’on ne puisse pas affirmer que les groupes du Congado aient été formés par des Congolais, on a accepté l’idée que les congadeiros sont les descendants des tribus bantous, en Afrique. Il s’est produit le même phénomène avec les groupes du Mozambique.
Beaucoup croient appartenir à la Nation Mozambique, bien qu’aujourd’hui les groupes aient fait une découverte importante sur l’origine du moçambique et de toutes les autres formes de danses :  » En fait, on sait désormais que ce n’est pas le Moçambiqueiro [danseur du Mozambique], parce que, à cette époque, le pays Mozambique n’existait pas. C’est MAçambique. Maçambique qui signifie « danse sacrée ».  » (Casimira, 2013).
Les danses sacrées se distinguent par les vêtements, les instruments et surtout par le rythme. C’est la raison pour laquelle on dit que les Congados, les Moçambiques, les Marujos, entre autres manifestations d’adoration de Notre Dame du Rosaire, peuvent être reconnus partout et  » les yeux fermés  » ; il suffit que le rythme se différencie par les intervalles entre les battements du tambour et le rythme des chants. Bien que ces manifestations soient semblables dans tout le pays, une particularité de ces fêtes a été créée dans le Minas Gerais, de manière à afficher la singularité des groupes de cet État. Aujourd’hui, les fêtes du Congado Mineiro sont reconnues et territorialisées.
Actuellement, juste dans l’État du Minas Gerais, au Brésil ont été identifiés 1052 groupes qui réalisent des fêtes de Notre Dame du Rosaire (fraternités, gardes, royaumes, ensembles, orchestres), répartis dans 327 municipalités de l’État, selon un premier recensement de la surintendance régionale de l’IPHAN (Institut du Patrimoine Historique et Artistique National). Parmi ces 1052 groupes, 614 possèdent le Congado comme expression festive.
Dans les prochains articles, on va analyser les fêtes du Congado à Minas Gerais, afin de comprendre cette pratique festive contemporaine, et ses enjeux politiques et culturels. Nous montrerons, par le biais du personnage de Preta Velha, comment ces expressions se constituent comme une forme de visibilité et d’ascension sociale des groupes minoritaires.

Thaíse Valentim Madeira

ANDRADE, Mário de. As danças dramáticas no Brasil. In:______. Danças Dramáticas do Brasil– 1o Tomo. Ed. Itatiaia/Instituto Nacional do Livro, Belo Horizonte:, 1982.
ARAUJO, Alceu Maynard de. « A congada nasceu em Roncesvales », Revista do Arquivo municipal, São Paulo, CLXIII, 1959.
CASCUDO, Camara. Dicionário do Folclore Brasileiro. 
Editora Itatiaia. Belo Horizonte, 1988.

GOMES, Nubia, PEREIRA, Edimilson. Negras raízes mineiras: os Arturos. Ministério da Cultura, 1988.
MARTINS, Saul. Congado: família de sete irmãos. Belo Horizonte: SESC, 1988.

POEL, Francisco Van Der. Dicionário da religiosidade popular. Editora Nossa Cultura, Curitiba, 2013.

SOUZA, Marina de Mello. Reis Negros no Brasil escravista: História da Festa do Coração do Rei do Congo. Belo Horizonte: UFMG, 2006.

TINHORÃO, José Ramos. Os Sons dos Negros no Brasil. Cantos, danças folguedos: origens. São Paulo: Editora 34, 2008.///Article N° : 12964

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Les images de l'article

Fête de Notre Dame du Rosaire du Royaume Treze de Maio, mai 2011.

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