Esclavages, Histoire d’une diversité de l’Océan Indien à l’Atlantique Sud, par Katia de Queirós, L’Harmattan, 1997, 110 F.
Katia de Queiros n’est pas une nouvelle venue dans l’étude de l’esclavage : en 1994, elle avait déjà publié Etre esclave au Brésil, XVIe-XIXe siècles (L’Harmattan). Avec le Centre d’études sur le Brésil qu’elle codirige avec Idelette Dos Santos et Denis Rolland, elle a également publié Mémoire et identité au Brésil (L’Harmattan).
En collaboration avec des chercheurs internationaux, son dernier ouvrage se propose de comprendre les spécificités des systèmes esclavagistes. Les auteurs partent du postulat selon lequel l’esclavage n’est pas une spécificité occidentale tout en distinguant d’entrée de jeu l’esclavage du mercantilisme. Trois thèmes sont abordés :la traite négrière, les lieux (Afrique, Maghreb) où hommes et femmes deviennent des captifs avant d’être produits d’échange et les conditions d’existence des esclaves dans le Nouveau monde. L’article d’Herbert Klein, professeur à la Columbia University de New-York, s’appuie sur les recherches réalisées sur la traite au cours des trente dernières années. Malgré son importance dans l’histoire économique et sociale de l’impérialisme occidental, son rôle fondamental dans l’histoire américaine et son influence profonde sur la société africaine, la traite atlantique est restée l’un des domaines de l’historiographie occidentale les moins étudiés. Ce retard ne se justifie pas par l’absence de sources, ignorée par manque d’intérêt pour un problème moralement difficile. Klein démonte certains mythes faisant de l’esclave un produit onéreux ou de la traite un commerce triangulaire Europe-Afrique-Colonie-Europe.
Los codigos negros de la América Española, par Manuel Lucena Salmoral, préface de Doudou Diène, UNESCO/Alcalá de Henares, 1997.
A la fin du XVIIIe siècle, contrairement aux colonies espagnoles, les colonies françaises et anglaises aux Amériques tiraient leur prospérité d’une abondante main d’oeuvre esclave. Cette prospérité était due, en partie, à une invention de Colbert, le Code noir, proclamé par Louis XIV en 1685. L’Espagne, le plus grand propriétaire d’esclaves et de territoires en Amérique, ne disposait à cette date que de quelques ordonnances, lois, règlements et brevets aussi contradictoires qu’imprécis. En pleine Réforme des Bourbons, l’Espagne voulait se doter à l’instar de la France d’un instrument juridique précis et coercitif capable de délimiter les libertés des esclaves et définir « les délits et excès » (entendre les légitimes aspirations de liberté des esclaves). Le modèle sera le Code noir français. En 1768, le premier Codigo negro espagnol voit le jour : son application est un échec. En 1769, la France cède la Louisiane à l’Espagne par le traité de Fontainebleau, qui y trouve un système de gestion et d’exploitation élaboré sur la base du Code noir français. Il sera considéré comme le deuxième Code noir espagnol. Il se révèle pourtant aussi un échec car l’Espagne est incapable de gérer la masse esclave. En 1783, l’Espagne essaie un nouveau Code, qui demeure tout aussi infructueuse car les propriétaires créoles ne veulent pas perdre le contrôle des esclaves et s’opposent à la Couronne pour imposer leur gestion.
Les codes noirs se résument à surveiller et punir les esclaves, en somme interdire, interdire et interdire. Assujettir les esclaves, prévenir le cimarronnage, réprimer de manière implacable les nègres marrons… Ils prévoyaient tout avec une minutie répressive inimaginable à notre époque : les sorties, les jours de fêtes, l’habillement, l’alimentation…. Ce livre a l’originalité de restituer les trois versions du Code noir espagnol peu étudié jusqu’à présent, les sources en étant dispersées dans les archives espagnoles et sud-américaines.
Bordeaux Port Négrier (XVIIe -XIXe siècles), Par Éric Saugera Ed. Karthala, 1995, 378 p., 180 F.
Bordeaux, second port négrier de France après Nantes, mais peu de traces dans la ville. L’auteur préfère parler d’amnésie plutôt que de tabou, et s’en explique par la destruction des archives du port en 1919 par un incendie, puis celles du greffe du Tribunal de Commerce en 1944 par les bombardements. L’apogée de la traite se situe entre 1783 et 1792, puis reprend de 1802 à 1826. L’ouvrage présente une comptabilité précise des expéditions, de la répartition des lieux de vente, du coût moyen d’un armement… et offre d’intéressant éclairages sur le rôle joué par la concurrence internationale, sur la valse-hésitation du pouvoir politique et administratif, le rôle modérateur joué par les conflits avec l’Angleterre, etc.
Nouveau voyage aux îles de L’Amérique, De Jean-Baptiste Labat Ed. Phébus, 1993
Un reportage « in vivo » vie sur les Caraïbes des 17e et 18e siècles, le quotidien de l’esclavage, la récolte de la canne, les rapports des Blancs avec leurs esclaves, l’attitude ambiguë des ecclésiastiques, leur regard sur le bon sauvage, par ce Dominicain né à Paris en 1663. Un religieux qui ne mâchait pas ses mots.
Nantes au XVIIe siècle : L’ère des négriers, 1714-1774, de Gaston Martin, Éd. Karthala, 1993, 560 pp., 160 F.
Un livre publié en 1931 qui démonte le processus de la traite, ses retombées commerciales et financières sur le port de Nantes, et décrit la bourgeoisie négrière dans la vie de la cité. Informations sur les capacités des navires, les équipages, les capitaux, la durée des voyages, le sort réservé aux captifs à bord des bateaux.
Victor Schoelcher et l’abolition de l’esclavage, de Nelly Schmidt, Ed. Fayard, 1994, 436 pp., 150 F.
Biographie d’un fils de bourgeois qui a passé le plus clair de sa vie (1804-1883) à se battre contre l’esclavagisme et pour les idées républicaines. L’auteur met en valeur son rôle de pionnier de l’abolitionnisme dans un environnement hostile. Aimé Césaire avait tenu à lui rendre hommage : « Méditons quelques unes des phrases les plus vigoureuses de cet homme admirable, dont il serait vain de commémorer la mémoire, si l’on n’était pas décidé à imiter la politique ».
Confessions d’un négrier, de Théodore Canot, Petite Bibliothèque Payot Voyageurs, 1993.
Théodore Canot, célèbre négrier, marin audacieux, aventurier fascinant, a décidé au déclin de sa vie de livrer à la postérité son existence, mêlant envolées lyriques et tristes aveux. L’esclavage a aveuglé des milliers d’être avides de richesses faciles. Ces marins n’avaient pourtant pas la vie facile et traversaient les mers, la houle et les écueils dans l’espoir, souvent dérisoire, de faire fortune. Le témoignage de Théodore Canot a cela de profondément utile qu’il nous aide à ne pas comprendre, à demeurer les bras ballants devant tant de cruauté, si peu de scrupules et cette bonne conscience terrifiante dont on se demande de quelle certitude elle est faite.
Les Editions L’Harmattan ont publié de nombreux ouvrages sur l’esclavage, ainsi que les Editions Caribéennes qu’ils diffusent :
– Figures de l’esclave au Moyen-Age et dans le monde moderne, Henri Bresc (Ed.), 268 p. 150 F.
– Esclavage, colonisation, libérations nationales de 1789 à nos jours, 354 p., 180 F.
– Etre esclave au Brésil (16e-19e s.), Katia de Queiros Mattoso, 332 p., 160 F.
– Histoire de l’esclavage à l’Ile Bourbon (Réunion), J.V. Payet, 128 p., 80 F.
– L’esclavagisme à la Réunion (1794-1848), Sudel Fuma, 186 p., 120 F.
– Nègres, danse et résistance : la Caraïbe du 17e au 19° s., Gabriel Entiope, 292 p. ; 155 F.
– Citoyenneté et sujétion aux Antilles francophones. Post-esclavage et aspiration démocratique, Mickaëlla Périna, 208 p., 120 F. (prix Frantz Fanon 97)
– La civilisation du bossale. Réflexions sur la littérature orale de la Guadeloupe et de la Martinique, Maryse Condé, 70 p., 55 F. (le bossale était l’esclave d’Afrique amené par la traite).
– Les soeurs de solitude. La condition féminine dans l’esclavage aux Antilles du 17e au 19e s., Arlette Gautier, Ed. Caribéennes, 284 p., 168 F.
– Histoire de l’industrie sucrière en Guadeloupe (19e-20e s.). La crise du système esclavagiste 1835-1847, Ch. Schnakenbourg, 254 p., 150 F.
– Le collier de servitude. La condition sanitaire des esclaves aux Antilles françaises du 17e au 19e s., Dr. F. Tardo-Dino, Ed. Caribéennes, 304 p., 125 F.
– Les Ibos de l’Amélie. Destinée d’une cargaison de traite clandestine à la Martinique (1822-1838), Françoise Thésée, Ed. Caribéennes, 134 p., 106 F.
– La véridique histoire (par lui-même) d’Olaudah Equiano. Africain, esclave aux Caraïbes, homme libre, Ed. Caribéennes, 166 p., 150 F.
– Les Jacobains noirs : Toussaint-Louverture et la révolution de St Domingue, C.L.R. James, Ed. Caribéennes, 376 p., 152 F.
– La traite des Noirs par l’Atlantique : nouvelles approches, Sté fr. d’Histoire d’Outre-mer, 370 p., 125 F.
– Répertoire des expéditions négrières françaises au 18e s., 2 tomes.
Livres pour enfants
Kalinago, Naissance d’un guerrier caraïbe ; Cétout et Misérine, Nègres marrons, 30 p., 50 F.
Sur l’esclavage moderne
deux titres de Lomomba Emongo :
– L’esclavage moderne, le doit de lutter, 116 p., 70 F.
– Le devoir de libération. Esclave, libère-toi toi-même, 100 p., 70 F.
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