Prenez un best-seller autobiographique et commencez le film par « basé sur une histoire vraie ». Rien à dire : on est dans le réel, pourquoi ergoter davantage ? Le livre de Corinne Hofmann a été traduit en 16 langues et vendu à quatre millions d’exemplaires dans le monde tandis que le film, distribué dans de nombreux pays, a été diffusé sur Canal + en France et n’y est accessible qu’en DVD. Cette Suissesse née en 1960 a vécu de 86 à 90 au Kenya, mariée à Lketinga (Lemelian dans le film), un guerrier samburu (une branche dérivée des Massaï) après un coup de foudre durant ses vacances. Elle quitte le confort suisse pour vivre en brousse dans le village de Barsaloï, se plie aux traditions, habite dans une manyatta (hutte de terre et de bouse de vache), affronte la dureté de vie et la malaria, aura une fille et s’enfuira finalement avec elle pour échapper à la jalousie dévastatrice de son mari.
Corinne Hofmann a également raconté sa vie en Occident avec sa fille (de son vrai nom Napiraï) dans Retour d’Afrique et le tournage du film 14 ans plus tard au Kenya dans Retrouvailles à Barsaloï où elle revoit Lketinga et toute sa famille. C’est ce destin de femme de caractère qui réjouit nombre de lectrices ou spectatrices. Elle est effectivement omniprésente à l’écran, le ressort du récit se réduisant à sa façon de percevoir son environnement et d’y réagir. Ce filtre ethnocentrique fait écho aux cartes postales de la nature sauvage. Il est constant, si bien que des Samburu nous ne saurons pas grand-chose et que même son mari Lemelian est réduit à de la figuration. Son élégante figure altière de guerrier en habit traditionnel qui la séduit au départ cache une animalité qui ne fera que se renforcer : il la prend sexuellement comme un chien, boit le sang à même le cou d’une chèvre, est incapable de mener un commerce et sera finalement d’une maladive jalousie. Comment s’étonner, à voir la répétition de ce genre de vision en littérature, au cinéma et dans les médias en général, que les gens, et notamment les jeunes, accueillent les joueurs noirs avec des cris de singes dans les stades de football ?
De victime fascinée et consentante, la belle Carola devient pédagogue et héroïne de la force féminine. Mais son aventure en terre d’Afrique se solde par un échec et confirme que le couple mixte est impossible, comme dans tout bon film colonial dont La Massaï blanche est un nouvel avatar moderne. Elle n’y aura rencontré que le machisme, des femmes belles mais soumises, la corruption des chefs, la dictature de la tradition et des murs inhumaines. La caricature de ces réalités autrement plus complexes est à son comble et cette histoire étant située il y a une vingtaine d’années, le film évite – tout comme Massaï, les guerriers de la pluie du cinéaste animalier Pascal Plisson (2002) – toute référence aux transformations actuelles que connaissent ces peuples.
Que Corinne Hofmann ait vécu le drame qu’elle raconte n’est pas à mettre en doute, mais c’est son regard et non une prétendue vérité qui s’étale à l’écran, celui d’une Occidentale qui explore avec courage la séduction qu’elle éprouve, mais dont le plongeon dans l’altérité tient davantage de la performance que de la compréhension.
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Un commentaire
Bonjour je recherche le DVD la massai blanche en français
Pourriez vous m’aider ? Même occasion où achat téléchargement
Merci beaucoup pour votre réponse
Cordialement
Bellanger Christel