S’il était donné à un être humain de faire le tour du monde et de parler toutes les langues, il serait à coup sûr le plus heureux. S’exprimer en tous lieux sans besoins d’interprète susceptible de censurer ou de déformer ses propos, lui procurerait sans doute un merveilleux sentiment d’appartenir intimement à tous les groupes sociaux rencontrés au cours de son périple. Mais ceci de toute évidence, n’est qu’un rêve pieux, une impossible prouesse depuis la tour de Babel. Cependant, si personne ne peut comprendre toutes les langues du monde, il est un langage qui peut se targuer d’être compris par les hommes et les femmes de tous les continents, c’est le langage artistique et, plus singulièrement le langage théâtral, à condition toutefois que les règles essentielles de ces techniques d’expression soient respectées et bien appliquées par ceux qui prétendent vouloir le parler, car c’est un métier extraordinaire où personne ne peut tromper personne. En effet, le théâtre est plus ouvert dans son expression de langue vivante, ponctuée de gestes, de silences et très souvent de paroles. Le théâtre a toujours un message direct avec des points d’impact et, dans tous les cas, ce message est perçu même par ceux qui n’ont que des yeux pour voir. Quand même bien l’Acteur fermerait la bouche, son corps seul continuera malgré tout à s’exprimer, et dans la même langue. On appelle les membres de la race qui parlent cette langue LES COMEDIENS. C’est une tribu très peuplée et qui s’étant sur les cinq continents. C’est sont les hommes et des femmes comme tout le monde , mais qui ont la curieuse particularité de porter des lorgnons pour scruter la manière de vivre des gens, des communautés, des peuple et même des animaux. Dès qu’ils trouvent la moindre coquille dans les comportements de leurs victimes, ils les font venir en sonnant un alarme dont ils ont seul le secret, et usent des techniques bien comprises pour exposer publiquement leur côtés négatifs et positifs. La plupart du temps tout ce passe bien au cour de ces fameuses séances. Si à un moment donné le public rigole à en perdre son dentier, c’est sûrement qu’à ce moment là, chacun se convainc lui même que la situation que les comédiens viennent de reproduire sur la scène n’est pas de lui mais de » l’autre « . C’est quand les flèches du message théâtral font mouche pour n’avoir pu être détournées sur le voisin d ‘à-coté, alors le comédien devra s’attendre a recevoir des ufs pourris enveloppés dans des critiques acerbes .
Fort heureusement, l’incorrigible comédien et son public se réconcilient toujours et entretiennent même une complicité qui autorise avec insistance le comédien à recommencer ce jeu à la moindre occasion.
Seulement les membres de la race des comédiens sont très malins. Eux aussi jouent de temps en temps aux petits démons sociaux, et même qu’il leur arrive de se faire aussi des crocs-en-jambe, mais il s’en inquiètent pas outre mesure, convaincu que les autres ne pourront jamais le dénoncer devant le grand public dont ils sont incapables de sonner la cloche de rassemblement. De plus personne ne pourrait le comprendre n’étant guère initié aux techniques du langage théâtral.
Mais vu sous un autre angle, les comédiens sont finalement sociables, surtout entre eux. Quand ils se retrouvent, c’est comme s’ils ne s’étaient jamais séparés. Ils sont heureux ensembles, ils ont, dirait-on, les mêmes réactions, les mêmes préoccupations. Ils ont surtout la même passion : le théâtre.
Si le FIA comme les RETIC compte aujourd’hui parmi les événements qu’ils attendent avec une certaine impatience, c’est parce que ces événements sont pour eux un lieu de rassemblement où ils peuvent jouir d’une communion profonde, exprimer leur vision du monde, se ressourcer, s’enrichir de nouvelles idées et de nouvelles techniques de leur art qu’ils sont sûrs d’y trouver et enfin, de découvrir de nouvelles identités culturelles qui, jusque-là leur étaient inconnues. Ils ont hâte de retrouver le public, leur complice de toujours et qui les attend, de savourer le plaisir de lui faire plaisir, et de lui procurer ce sacré sentiment de plénitude qui l’entraîne à sa suite, dans les méandres de l’incarnation de son personnage. Et pendant ce laps de temps que dure le spectacle, ensemble ils riront, ensemble ils pleureront.
Quand le spectacle s’achève sur la scène, le public prend la relève à sa façon dans les foyers et les bistrots, racontant en s’efforçant de faire vivre à ceux qui n’étaient pas là les bons morceaux retenus au cours des spectacles.
Au festival, et en dépit de quelques coups de gueule feutrés à l’adresse du comité d’organisation en proie à quelques zones de turbulences, les comédiens suscitent tout de même une certaine admiration. L’acceptation de l’autre tel qu’il est, le désir d’être son ami, de le découvrir, de recevoir ce qu’il apporte et de comprendre même l’incompréhensible. Le plaisir de montrer ce qu’on est, ce qu’on a et ce qu’on sait faire, ils s’y adonnent sans faux – fuyants, sans retenue.
Mais comme les bonnes choses ne durent jamais, le rideau tombera fatalement sur l’événement et ce jour-la, le comédien devra se séparer des amis, anciens et nouveaux, avec le sentiment d’avoir vécu en quelques jours, l’équivalent du temps écoulé depuis le dernier festival. Empoignant sa valise, le carnet d’adresses rempli, la tête pleine d’idées nouvelles et de souvenirs chargés d’amitié, le comédien affronte le vent de tristesse qui souffle sur le village du festival, et qui le pousse presque sans ménagement vers le hall d’embarquement.
Sans autre choix, il ne peut que s’accrocher bec et ongles à un espoir qui plie mais ne rompt pas, celui de retrouver bientôt cette belle ambiance à la prochaine édition.
Qu’il est exaltant le métier de comédien !
Qu’il est beau le monde du théâtre !
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