» Nous voulons faire de Douala la capitale des arts plastiques « 

Entretien de Robert Essombe Mouangue avec Marilyn Douala-Bell et Didier Schaub, gérants de Doual'Art

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Marilyn Douala-Bell et Didier Schaub animent le centre d’art contemporain le plus en vue de la capitale économique, donc du pays. Leur engagement dans la promotion et le développement des arts plastiques les place en tête ou en partenaire privilégié de toutes les initiatives novatrices dans le domaine.

Comment procède t-on pour exposer à Doual’Art ? Quels sont les critères de choix ?
Notre choix se porte généralement sur des travaux contemporains présentant une réelle lucidité thématique. Des travaux réalisés en milieu urbain. Nous devons y voir aussi un sincère engagement de l’artiste par rapport à son œuvre. En tout et pour tout, nous sélectionnons des travaux d’avant-garde plutôt que ceux versant dans des aspects purement commerciaux. Il nous arrive aussi de procéder d’abord par un accrochage de groupe, puis d’en arriver à une exposition individuelle par rapport à un artiste donné. Il nous est arrivé aussi de prendre des artistes dans notre catalogue, par le biais de recommandations.
La maison Doual’Art est-elle ouverte à tous les plasticiens toutes tendances confondues ou existe-il un pré-carré ?
Nous sommes un centre d’art contemporain. Nous sommes donc ouverts à tous les plasticiens à partir du moment où le jugement que nous avons de leurs travaux correspond à notre cahier de charges. Il est vrai que certains noms apparaissent plus souvent dans nos expositions que d’autres, mais ils ne le sont que par la qualité de leurs travaux et non parce que faisant partie d’une liste d’artistes prédéterminés.
Combien d’expositions organisez-vous en moyenne par an ?
Une quinzaine. Quelquefois plus. Dans ce domaine, nous sommes sans concurrent. Les galeries professionnelles de la place, que ce soit à Yaoundé où à Douala, ont à peu près une moyenne de quatre à six expos par an.
Vous arrive-t-il de beaucoup vendre ? Et quelles sont vos ventes record ?
Il est difficile de parler de vente tout court pour certaines de nos expositions qui sont avant tout d’énormes prises de risque. C’est la possibilité donnée au public d’approcher des œuvres d’avant-garde à la valeur marchande assez difficile à établir. Notre rôle à nous est de prendre des risques, de présenter des travaux qu’on ne peut voir nulle part ailleurs, là où d’autres maisons, à cause d’impératifs commerciaux, mettent la bannière basse. N’empêche que certaines de nos expositions se sont pas mal vendues, comme le sculpteur Sumégné, Goddy Leye, Louise Epée etc.
Existe-il un réseau d’amateurs d’arts sur la place ou Doual’Art compte-t-il sur ses contacts à l’extérieur du pays ?
Il y a un petit cercle de fidèles et de collectionneurs d’art ici. Mais ça reste très limité. Vraiment pas de quoi (pour l’heure) révolutionner le marché de l’art au Cameroun. Mais nous avons aussi des acheteurs potentiels à l’extérieur, ce qui rentre aussi dans notre rôle de populariser l’art camerounais.
Quelles sont, d’après vous, les grandes faiblesses des plasticiens camerounais ?
Ils font généralement preuve d’un énorme déficit en culture visuelle. Ceci s’explique par le fait qu’ils ne font pas un grand effort de documentation. Doual’Art dispose par exemple du plus grand centre de documentation en matière d’arts plastiques mais vous n’y verrez pratiquement pas d’artistes venant s’y ressourcer. Il y a aussi un peu trop de mimétisme dans le travail des uns et des autres, malgré le grand nombre de créations produites. Il n’y a pas assez d’effort de recherche, de mise en place d’une écriture personnelle. On peut le comprendre dans un pays où il n’y a pas pratiquement pas d’école d’arts plastiques, ni de formation dans le domaine. L’absence d’une véritable critique de leurs travaux leur est aussi préjudiciable.
Quels rapports entretenez-vous avec le ministère de tutelle ? Etes-vous satisfaits de leur action ?
Ils restent assez cordiaux. Il y a un nouveau délégué provincial de la culture qui semble vouloir venir en aide à la filière. Nous attendons de voir. De toute façon, Doual’Art est disponible pour tout travail de fond.
Que faut-il faire selon vous, pour dynamiser les arts plastiques au Cameroun ?
Beaucoup de choses ! Il faut continuer à sensibiliser les habitants à l’expression plastique. Créer un public qui consomme les œuvres d’arts contemporains. Investir aussi les établissements scolaires, les ateliers pour enfants dans les quartiers populaires. Il faut trouver un budget au niveau communal, le mettre à la disposition des artistes pour stimuler tout ça. Il faut créer un musée d’art contemporain et professionnaliser les journalistes dans la critique d’art. Notre objectif est de faire de Douala la capitale sous-régionale des arts plastiques !

///Article N° : 3517

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