Pays-Bas : un pays où le racisme s’ignore

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Connus pour leur tolérance, les Pays-Bas revendiquent pourtant une tradition contestée : Zwarte Piet, un personnage blanc grimé en noir accompagnant Saint-Nicolas chaque année. Le New urban collective décrypte la place des Noirs néerlandais.

Réseau d’étudiants et de professionnels, le New urban collective (NUC) a été fondé à Amsterdam en 2010 pour défendre les intérêts et encourager le développement personnel des Hollandais noirs. « Nous organisons des formations et des manifestations antiracistes. Nous sommes 300 membres à Amsterdam et dans les grandes villes du pays » (1), explique l’anthropologue Mitchell Esajas, président de NUC. Ayant construit leur richesse grâce au commerce naval, les Pays-Bas accueillent depuis longtemps des populations noires : « Amsterdam était le plus grand port esclavagiste au XVIIe siècle. Les Pays-Bas possédaient des colonies en Indonésie, en Afrique du Sud, en Afrique de l’Ouest et en Afrique du Sud, au Surinam – d’où viennent mes parents – aux Caraïbes néerlandaises… La plupart des Hollandais noirs viennent de ces colonies. Depuis une ou deux décennies, on assiste aussi à l’arrivée de migrants d’Afrique de l’Ouest venant de pays comme le Ghana et le Nigeria », rappelle Mitchell Esajas, né aux Pays-Bas.
Discriminations
Quels sont donc les problèmes actuels rencontrés par les populations noires hollandaises ? Contrôle au faciès, utilisation des mots « nègre » et « allochtone » (étranger, N.D.L.R.) dans les livres et les médias, système scolaire à plusieurs vitesses… « Les Hollandais ne savent même pas ce qu’est le racisme, analyse l’universitaire Jessica de Abreu, membre de NUC. On parle de racisme pour ce qui arrive au Royaume-Uni, aux États-Unis, mais pas dans la culture hollandaise ». La Hollande, pourtant, devient de plus en plus impopulaire à cause de sa traditionnelle fête où Saint-Nicolas « le sauveur blanc est accompagné de ses stupides servants noirs, les Zwarte Piet (personnages blancs peints en noir, N.D.L.R.) », nous explique Mitchell Esajas. « C’est une fête célébrée chaque année. Mais la figure de Zwarte Piet a été inventée en 1850 par l’écrivain Jan Schenkman, à une période coloniale où les Blancs regardaient les autres peuples de façon raciste » .
Interpellations politiques
Si de nombreuses personnes contestent cette « tradition » depuis les années 1960, le sujet demeure sensible. Pour preuve, malgré le refus des autorités, la manifestation pacifiste organisée, par NUC avec 20 autres organisations en novembre 2014 a conduit à l’arrestation de près de 90 personnes. Malgré l’émergence de quelques personnalités noires – comme la politicienne Tanja Jadnanansing ou l’animateur Humberto Tan – la lutte contre les discriminations reste essentielle. NUC organise donc des formations d’accès à l’emploi et aux études supérieures, des échanges européens autour de l’abolition de l’esclavage, la publication d’un livre sur l’histoire de l’esclavage et a adressé en décembre 2014, avec 40 associations européennes, une lettre sur Zwarte Piet au Premier Ministre néerlandais (2) qui n’en a, au moment de notre bouclage, toujours pas accusé réception.

1) Tous les propos de l’article ont été recueillis et traduits
de l’anglais par Claire Diao
2)www.enar-eu.org
///Article N° : 12667

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