À l’honneur de l’exposition Beauté-Congo à la Fondation Cartier (Paris 14e) le 12 octobre, le Québéco-congolais Pierre Kwenders repeint la pop d’une esthétique afro-futuriste.
Il vient de remporter le prix de l’Espoir 2015 au festival d’été au Québec. À Montréal, la toque bantoue de Pierre Kwenders est un repère de la scène électro depuis quelques années. Aux platines, sur scène, le personnage s’est frayé une place depuis sa collaboration avec les Canadiens Radio-Radio en 2011. En France, il intrigue depuis la sortie en octobre 2014 de son premier album, Le Dernier Empereur Bantou. Né à Kinshasa dans un Congo qui s’appelait encore Zaïre, José Louis Modabi a inventé un Pierre Kwenders dans une esthétique impériale, empruntant même la toque habituelle de Mobutu Sese Soko, ancien dictateur du pays de 1965 à 1997. Un hommage aux bantous davantage qu’au despote, même si l’artiste joue avec la fierté culturelle encouragée par ce dernier. Il a notamment valorisé les langues bantoues, élément culturel commun de ce peuple réparti du Cameroun aux Comores, et du Soudan à l’Afrique du Sud. À 29 ans, dans ce jeu plaçant l’Afrique dans un imaginaire et une esthétique pop, Kwenders pose des influences musicales puisées à Montréal, où il a immigré à l’âge de 14 ans. Puis, venu au chant à travers la chorale de l’Église où sa mère et la communauté congolaise se rendaient, il a évolué sur les scènes de la ville. Ses rencontres avec le producteur Nom de plume, le rappeur Baloji, le Poncho French et The Posterz dessinent une bande présente dans ce premier album, oeuvre de famille. Les titres évoquent un imaginaire fantasque autour de personnages réels ou mythiques, teinté de références à des cultures traditionnelles.
« Ani Kuni », chanson indienne qui berce tous les petits Québécois est ainsi chantée en anglais, français et lingala, lorsque le parler cajun est rappé sur le titre « Mardi gras ». La rumba congolaise y est aussi, comme la soul, le hip-hop, le r’n’b, l’électro, et le classique si l’on y prête bien attention. On aimerait classer l’oeuvre en « world », avec déjà, pourtant, l’intuition de se tromper. Voilà de la pop, tout simplement, dirait Kwenders. Ou non, de l’afrofuturisme, clamerait-il, terme qu’il utilise pour définir sa musique, à la croisée des influences. Kwenders revient en France en octobre, à l’occasion de l’exposition Beauté- Congo 1926-2015. Son oeuvre artistique, audacieusement hybride, y a toute sa place.
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