Photographe installé à son compte au Cameroun, Nicolas Eyidi est l’un des rares professionnels reconnu. Reporter, photographe de studio, parfois administrateur, il se bat sur tous les fronts, pour la reconnaissance de son métier.
Quels travaux réalisez-vous au Cameroun ?
Il y a une quinzaine d’années, j’ai eu envie d’avoir une banque d’images. Aujourd’hui, je continue de fournir cette banque en images locales. Je commence à sortir du Cameroun, à aller vers d’autres pays africains comme le Tchad. Je travaille aussi avec les agences de communication de la place, je réalise des images publicitaires.
Comment expliquez-vous la carence de photographes au Cameroun ?
Dans les années 90, des jeunes ont été contraints de devenir photographes par manque de boulot, ce qui a eu pour effet de dégrader l’image de la photographie. Je me rappelle qu’avant cette époque, on pouvait compter les photographes sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, chacun se débrouille pour avoir un appareil. Il arrive que les gens soient étonnés de voir qu’on peut faire ce métier correctement et dans de bonnes conditions. Un photographe professionnel est celui qui fait de la recherche, qui connaît son éclairage, développe un thème.
Pourquoi ne voit-on pratiquement pas d’expositions photographiques au Cameroun ?
Il y a des structures comme le Centre culturel français qui peuvent accueillir des photographes, mais cela n’a jamais été fait parce que personne n’y croit et parce que les photographes camerounais pensent que lorsqu’on expose une photo on doit automatiquement gagner de l’argent.
Il y avait un projet de sensibilisation de la photographie auprès de jeunes, qu’est-il devenu ?
C’est un projet qui a été mis en place il y a près de 10 ans et qui n’a pas fonctionné. Nous avions réunis, à l’époque, des jeunes au centre culturel français afin d’organiser des semaines d’explications ; à partir du moment où ça ne leur rapportait pas de l’argent, ils sont partis. C’est la mentalité des photographes » filmeurs » au Cameroun.
J’ai constaté que pour qu’un photographe puisse s’accréditer lors d’un événement culturel, il faut qu’il paie pour le droit de travailler.
Le Camerounais veut le beurre et l’argent du beurre : il veut qu’on parle de son événement et il veut qu’on paie pour en parler. Il y a un ministère de la Culture qui n’aide pas beaucoup les photographes. Il n’y a aucune campagne d’explication, ils veulent des archives mais il faut payer pour obtenir le droit de faire des images. Un journal peut publier un article sur un événement sans aucune image. Parfois on ne peut pas toujours payer et nous sommes obligés de travailler comme des paparazzis. On est obligé de se cacher ! Il m’est déjà arrivé de me faire arrêter par la police tout simplement parce que je faisais des photos.
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