Les médias sud-africains, et particulièrement la presse écrite caractérisée par sa grande diversité, reflètent aujourd’hui la société post-apartheid du pays avec la prise de pouvoir progressive de la majorité noire.
Dès janvier 1994, une loi portant création de l’Office indépendant de Radiodiffusion et de Télévision entrait en vigueur pour veiller à ce que tous les Sud-africains bénéficient de services de radio et de télévision plus équitables et de meilleure qualité, sans parti pris injustifié ni intervention intempestive à caractère répressif du gouvernement.
Deux ans plus tard, l’adoption de la nouvelle constitution sud-africaine garantit à chaque citoyen le droit à la liberté d’expression qui intègre la liberté de la presse et des médias, la liberté de recevoir ou de transmettre des informations ou des idées, la liberté de la création artistique, la liberté académique et la liberté de la recherche scientifique. Le pays abandonnait la discrimination raciale et les droits des citoyens ordinaires étaient désormais protégés par un texte plaçant à égalité la liberté d’expression et le droit à la dignité et l’égalité.
L’industrie des journaux elle-même a pris une initiative pour encourager la diversité à la base : elle s’est jointe au gouvernement sud-africain pour créer l’Agence pour le Développement et la Diversité dans les Médias afin de faciliter la croissance des petits journaux. Au total, selon les responsables sud-africains, la presse de leur pays est aujourd’hui la plus active et la plus libre du continent. Avis nuancé par l’organisation Reporters sans frontières qui, dans son classement mondial de la liberté de la presse 2006, place certes le pays dans une bonne position (44e sur 131, avant le Japon et les États-Unis) mais après le Bénin, la Namibie, Maurice, le Ghana et le Mali.
Les progrès toutefois ont été spectaculaires, étant donné la situation qui prévalait avant la fin de l’apartheid. Dans les années 1980, il y avait plus de 100 lois pour restreindre la presse. Parmi ceux ayant défié le gouvernement et son régime de répression, bon nombre de journaux et de journalistes, particulièrement les rédacteurs noirs, furent harcelés et mis en détention alors que les journaux étaient censurés, menacés de fermeture, et parfois frappés d’interdiction.
Ces années virent la naissance d’une presse parallèle, avec des titres tels que The Weekly Mail, Grassroots, Vrye Weekblad et South, connus pour leur opposition acharnée au régime. Quand un État démocratique a émergé en 1994, très peu de titres de cette presse parallèle purent survivre. La grande exception fut The Weekly Mail qui, ayant gagné en importance, est devenu le Mail and Guardian.
Les changements ont également été considérables du point de vue du contrôle et de l’économie du monde de la presse. Avant 1994, l’industrie se partageait en deux groupes bien distincts : la presse de langue anglaise et la presse de langue afrikaans.
Un changement clé a eu lieu en 1995, lorsque le groupe Independent News and Media, sous contrôle étranger, est devenu majoritaire dans le groupe Argus (propriétaire de titres tels que The Star, Cape Times, The Argus et Daily News).
Autre bouleversement : en 1996, Johnnic Communications a pris le contrôle total de TML (propriétaire de The Sunday Times et de 50% de Business Day et Financial Mail), ce qui en a fait la plus grande société de médias au capital noir. Deux ans plus tard, sa filiale Caxton prenait le contrôle de Perskor (propriétaire de The Citizen) et consolidait son intérêt dans les journaux communautaires et les feuilles gratuites.
Ces mutations, ajoutées à d’autres, ont transformé le monde des médias, qui est passé d’un contrôle entièrement blanc à un contrôle blanc et noir, ouvert à des intérêts locaux et étrangers. Elles ont aussi permis l’ouverture au sein des équipes rédactionnelles : selon des études sud-africaines, la majorité des rédacteurs des journaux quotidiens et hebdomadaires sont en effet issus, depuis la fin de 2003, de la communauté noire. Ces changements n’ont toutefois pas encore atteint le domaine de l’égalité des sexes : il n’y a encore que peu de femmes aux postes clés de journaux importants.
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