On rigole dans La Première étoile, mais pas d’un rire franchouillard. On rigole des Noirs mais le mépris dégradant n’est pas de mise. C’est rare et réjouissant. Firmine Richard en rajoute sur son accent créole, l’autodérision est permanente, les jeux de mots fusent autour de noir, black, nègre, etc. mais sans condescendance ni paternalisme. La réussite de La Première étoile est d’abord là : faire rire un large public autour de la différence sans la réduire.
Car la différence est le sujet, largement mis en avant : des Noirs aux sports d’hiver, ça fait tache. Jean-Gabriel essaye de convaincre sa femme que malgré son irresponsabilité chronique, il fait encore un bon père. Cela le pousse à l’impossible : il promet à ses enfants de les emmener aux sports d’hiver, alors qu’il n’a pas un rond.
La catastrophe annoncée donne des scènes hilarantes mais aussi de simple tendresse, Jean-Gabriel et sa famille étant tout simplement humains, comme tout un chacun. La différence se vit dans la similitude et c’est la définition de la diversité : partager beaucoup, sauf une altérité bien à soi, et que Firmine Richard exprime avec bonheur dans son humour ou ses chansons. Un alter ego est un autre semblable.
Pas besoin dès lors de verser dans le gros rire ou la caricature pour enfoncer le clou : La Première étoile affronte le racisme sans crier gare, comme une donnée présente avec quoi il faut faire avec, sans drame mais sans lâcher prise. On pourra trouver trop gentil ou consensuel ce film tourné classique mais bien rythmé. Disons plutôt que c’est un film sincère et généreux, qui distille en douce une envie de tolérance. Premier film aux relents autobiographiques, c’est aussi une évocation de l’imposante mère antillaise et du père absent, mais aussi de l’école de la débrouille et du rêve déçu face à la nécessité de partager le destin commun (devenir postier !). Acteur et doubleur, Lucien Jean-Baptiste se donne le premier rôle et l’assume sans problème. Il emmène son petit monde ou se laisse entraîner, trouve sa place face à Firmine Richard, dans l’histoire comme dans le jeu, et réussit là un bon divertissement qui pose une pierre de plus dans l’édifice d’une société plurielle.
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