Le Salon de la Plume noire se cherche encore

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Exilé à la périphérie de Paris, le Salon de la Plume noire (15-17 oct.), malgré un net sursaut de fréquentation le dimanche après-midi, n’a pas recueilli le public qu’il méritait et qui lui semblait promis après le succès de l’année dernière. Pourtant, ce rendez-vous annuel reste essentiel pour assurer une vitrine de la littérature africaine et proposer des débats de qualité. Nous nous y étions nous-mêmes engagés : Boniface Mongo-Mboussa et Sylvie Chalaye ont organisé et animé une intéressante table-ronde sur la figure de l’enfance dans le roman et le théâtre africains, qui réunissait Kossi Efoui, Koffi Kwahulé, Caya Makhélé, Henri Lopès et Jean-Louis Sagot-Duvauroux. Mais ce débat n’a trouvé qu’un faible public. Il est vrai que celui-ci pouvait difficilement digérer une suite ininterrompue de débats réunissant sur deux jours un nombre impressionnant d’écrivains sur deux lieux différents. Ne vaudrait-il mieux pas se concentrer sur quelques débats-événements bien annoncés par voie de presse ? Une nouvelle dynamique est à trouver, qui permette au Salon de véritablement jouer son rôle de tribune pour la littérature africaine en France. Tour d’horizon des réactions dans les stands présents.

Chez les éditeurs, on note une déception relative quant aux ventes. M. Agoncé (Editions Présence africaine) : « La promotion est sauvegardée mais, bien que situé dans le 20ème arrondissement, un quartier à forte population africaine, le lien ne s’est pas fait et l’emplacement a finalement desservi la manifestation. » Même écho chez L’Harmattan et Dapper, et confirmation de M. Menaibuc, libraire et éditeur : « L’affluence du dimanche après-midi a permis de rattraper un départ délicat, sans combler l’écart. Nous espérons un autre salon l’année prochaine, avec une meilleure promotion sur le quartier. Nous gardons l’espoir ! »
Par contre, le Salon reste une possibilité de découverte. Laure Dosseh (Classiques africains): « Le public du 20ème n’est pas le même que celui du Trocadéro, mais la richesse des contacts est la même. » Méliane Boguifo (Nouvelles éditions ivoiriennes, directrice de la collection Adoras) : « Les gens découvrent nos livres dont ils avaient entendu parler et achètent pour voir, notamment ceux de la collection enfantine et Adoras. » Pierre Rostini (Revue Kouakou) : « Kouako, puis Kalao, existaient depuis 30 ans mais ne paraissent plus, depuis l’arrêt du soutien du ministère de la Coopération qui s’est reporté sur Planète Jeunes. Nous espérons les relancer. Le Salon nous permet de continuer à montrer notre travail. »
Avec un « plus » de convivialité typiquement Plume noire. Chantal Gay (Librairie de Paris) : « Une atmosphère chaleureuse et de nombreuses rencontres, notamment l’occasion de découvrir de jeunes auteurs ! » Yann Rioux (Librairie du Québec à Paris): « Le public de la Plume noire est moins surfait que dans les autres salons : les gens sont plus intéressés par les livres, d’autant plus qu’on les trouve peu en librairie. Bien sûr la présence des auteurs haïtiens du Québec, comme Dany Laferrière et Joël des Rosiers, motive les gens à venir voir leurs livres. »
Car le public du Salon est curieux et fouineur : M. Merlin (Servedit) : « Notre maison exporte des ouvrages vers l’Afrique et représente des éditeurs africains comme CEDA de Côte d’Ivoire ou Baobab de Mayotte, mais aussi de Nouvelle Calédonie ou de Polynésie en France. Le public de la Plume noire est friand de découvertes : les ouvrages de Nouvelle Calédonie éveillent par exemple beaucoup d’intérêt. » Nathalie Hahn-Castera (Haïti, association Rencontre) : « Nous cherchons à faire connaître la littérature haïtienne et les livres qu’on ne trouve pas ici, auprès des Européens mais aussi des Haïtiens de la diaspora. Les résonances sont bonnes au Salon. »
Le Salon est donc avant tout lieu de contacts et d’échange. Kouam Koumasi (Editions Jasor, Guadeloupe) : « Il ne nous est pas simple d’assurer une double présence avec le Salon de l’Outre-mer mais les contacts valent le coup et le nombre d’auteurs déplacés est impressionnant ! » Alain Dafouka (Institut congolais d’Etudes et de Sondages ICES, France) : « Le Salon est davantage un lieu de contact que de vente de notre revue. » Faustin Rwamfizi (Association pour la Diffusion des Cultures francophones au Rwanda) : « Notre association cherche à promouvoir le livre et la lecture auprès des enfants. Le Salon est un excellent lieu d’échange d’expériences : il faut le soutenir ! »
Quant à Caya Makhélé (Editions Acoria, France), il reste l’homme des conclusions : « Le Salon semble s’éloigner du public pour se concentrer sur la profession, ce qui me chagrine. Sans doute faudrait-il cibler davantage un public à définir. Il faudrait aussi donner une place importante aux enfants qui sont les lecteurs de demain. Et s’ouvrir à d’autres écritures que françaises, y compris dans la diaspora, ainsi qu’à d’autres sources de création. Le Salon est une belle tribune qui demande à devenir adulte. »

///Article N° : 1142

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